Le rituel kabyle, au service de la pérennité du couple

Le rituel kabyle, au service de la pérennité du couple

Nous allons à la rencontre d’un rituel ancestrale, pratiquée par la femme berbère, et plus précisément kabyle, destiné à faire revenir un mari parti au loin depuis trop longtemps.

La tehjija : l’appel de loin

La femme restée au village, pendant que l’homme est en voyage, doit effectuer un appel, servant à invoquer le retour de l’époux à son foyer. Le rituel se passe la nuit, sans clair de lune, et sur le toit de la maison. Elle doit s’y rendre, pourvue d’une bassine d’eau et sept branches de grenadiers. Elle se dénude alors, s’assied sur le faîte du toit et se met à frapper l’eau avec les branches du grenadier (cet arbre est reconnu pour la valeur de fécondité de ses fruit, et les sociétés antiques lui ont attesté un rôle certain, dans les rôle de la pérennité du couple). Se faisant, l’épousée dit :

« Ce n’est pas frapper avec les branches que je fais, c’est la tehjija* que je fais à untel, fils de une-telle, elle même fille de une-telle ».

Son mari est alors apte à entendre la requête, qui lui sera transmise à travers le temps et l’espace. Sa femme lui demande de rentrer très vite; et à partir de ce moment-là, elle s’en va… Rassurée, et persuadée du retour prochain de l’époux.

On rencontre des rites d’appel dans toute la Kabylie et peut se dérouler dans des lieux saints, et n’intègre pas à ce moment-là, le critère de nudité, propre au rite d’appel sur le toit qui doit se passer dans une nuit noire, pour éviter d’être vue.

La menace de « l’étrangère »

la nudité dans les relations conjugale est en réalité taboue, en accomplissant ce rite de la sorte, la femme semble braver la timidité et la pudeur qui lui incombent pour montrer à son mari qu’il est bon de rentrer à la maison…

Une vielle femme rencontrée au lieu saint de Sidi-Khaled (commune des Iflissen), témoigne en précisant que si la femme ose ainsi s’adonner à cette pratique, et dans le plus simple appareil, c’est aussi pour faire de la concurrence à la femme Européenne, ou la citadine (tout dépend du lieu de séjour du mari).

La femme française, tarumit, fut longtemps le thème de poèmes chantés féminins, ayant fait part de l’angoisse engendrée par une concurrence vécue comme déloyale, entre française hypersexuelle et attirante, et une femme kabyle pudique et discrète. Ces chants mettent en scène la femme étrangère à laquelle sont accolés maints détails physiques (maquillée, bien habillée, en pantalon…), et qui utilise l’érotisme de son corps pour séduire; contrairement à la femme kabyle dont les qualités sont tournées vers la procréation, le travail, la fidélité, la patience et la capacité d’endurer des souffrances.

Ces poème, qui mettent en avant la « Kabylité » ne constituent d’une défense bien maigre contre les désirs des hommes émigrés entourés, de « femmes à portée de la main »… Reste le rituel de la tehjija…

Mira B.G

*tehjija : C’est un mot dont on ignore l’origine réelle et le sens strict, il fonctionne comme un mot magique, et reste propre au rituel d’appel.