« Le repenti » : L’Algérie garde ses blessures ouvertes

« Le repenti » : L’Algérie garde ses blessures ouvertes

Cela se passe en Algérie, mais ce pourrait être dans n’importe n’importe quel pays déchiré par une guerre civile meurtrière (on a, hélas, le choix aujourd’hui !) où l’on croit, par une loi de « Concorde civile », pouvoir en finir avec la haine et les atrocités, et, où, finalement, on s’aperçoit que rien n’est plus fragile que la paix, et le pardon…

Avançant péniblement dans la neige avec son baluchon, un homme vient retrouver les siens. Il était parti, on le devine, combattre, il revient. Ses vieux parents l’accueillent avec effusion, les hommes de son village, au contraire, l’agressent. De quoi est-il coupable ? A la ville, où il va se présenter aux autorités, le commissaire de police lui trouve un emploi : il aidera le vieux tenancier du bistrot sur la place, qui le logera. Rachid rase sa barbe d’islamiste, travaille dur, ne se fait pas remarquer. Parfois, pourtant, il s’absente. Donne des coups de téléphone, qui restent mystérieux. En parallèle, on découvre que le charismatique pharmacien, qui vit seul dans un capharnaüm sans âme, tout entier investi dans son officine où il se révolte d’être en permanence à court de médicaments, reçoit, parfois, des coups de téléphone tout aussi mystérieux. Le lien se fait bientôt, sans que l’on comprenne, encore, de quoi il est tissé. On devine une douleur, inguérissable, un marché, sordide, et l’on découvre, au bout d’une route de bout du monde, l’horreur, à vif, toujours…

MON AVIS

Merzak Allouache, qui a étudié le cinéma à la Femis à Paris, s’est fait connaître en 1976 avec « Omar Gatlato » et, depuis, alterne comédies sociales (« Salut cousin ! », « Chouchou ») et drames. En 1993, il avait fait sensation avec « Bab el Oued City », tourné clandestinement pendant la guerre civile dans le quartier d’Alger où il avait grandi. Aujourd’hui, il revient sur cette période noire dans un film choc, presque muet, d’une sobriété confinant au dépouillement. Présenté au dernier Festival de Cannes à la Quinzaine des Réalisateurs, ce « Repenti », qui montre que le feu couve toujours sous la cendre des guerres civiles islamistes, fait froid dans le dos. On a du mal à l’oublier.