Plus d’une vingtaine de secrétaires généraux de l’UGTA figureront en tête de liste du PT. Sa présidente opte pour les cols bleus lors des prochaines législatives et entend faire de l’hémicycle une tribune pour les représentants des travailleurs. C’est comme qui dirait que Louisa Hanoune s’en va pêcher dans les eaux de l’UGTA. Sauf que c’est avec
l’«appât» que lui offre cette puissante organisation que la Dame forte de la politique algérienne compte remplir sa
«gibecière». L’harmonieuse vision résultant d’un schéma fusionnel aurait fini par rassembler les deux partisans du monde du labeur. Leur solidarité commencera déjà au lendemain de la dernière tripartite. Pour Mme Hanoune, celle-ci n’aurait «finalement profité qu’au patronat». Elle affichera sa «compassion» pour Sidi-Saïd qui «est sorti les mains pratiquement vides» de cette tripartite, lui suggérant de «ne pas baisser les bras». Le pacte est vraisemblablement scellé entre l’UGTA qui va pourvoir aux besoins du PT et ce dernier parti qui aura à porter l’étendard des travailleurs sur le front parlementaire. Désormais, le Parti des travailleurs pourra venir s’abreuver dans ce creuset qu’est le monde du travail. Et le temps est venu, en cette veille d’élections législatives, pour Louisa Hanoune de cueillir les fruits de son labeur. Pas moins de 27 SG de wilayas appartenant à l’organisation syndicale de Sidi Saïd sont portés candidats – tête de liste chez le Parti de Hanoune. Cela donne un nouveau souffle au PT qui enrichit ses rangs «prolétaires» par des cadres syndicaux favorables à ses thèses. Cela lui épargne aussi les risques de défections que génère le nomadisme politique dont elle a souffert. Les choses se passeront en «famille». Il est loisible de compter des noms connus dans le monde des cols bleus. L’on peut citer celui du secrétaire national, Telli Achour, chargé des conflits au niveau de la Centrale syndicale et qui est tête de liste à M’sila. Cela est identique pour le SG de l’union de wilaya / UGTA de Khenchela, celle de Jijel ou encore de l’U/W de Skikda dont la liste est menée par Zair. L’on peut encore nommer le très pétillant Smaïn Kouadria, président du syndicat d’ArcelorMittal et membre de l’exécutif de la puissante Fédération nationale des travailleurs de la mécanique et de l’énergie (FNTME) qui compte quelque 70 000 ouvriers. Mais quoi de bizarre dans le fait qu’un parti de travailleurs puise ses futures représentants dans le monde ouvrier ? Rien, sinon qu’au PT, une stratégie a été étoffée et mise en branle commençant par un repérage dans les rangs des syndicats, à commencer par l’UGTA. PT et UGTA développent les mêmes principes et partagent les mêmes visions. Leur tandem est de fait. L’un et l’autre défendent la même cause en dépit du fait que jusque- là, les deux partenaires se trouvaient au même port mais pas au même bord. Qu’est-ce qui a fait changer les choses ? Ce travail remonterait à trois ans déjà. C’est d’abord la conférence mondiale, tenue en novembre 2010 à Zéralda et à laquelle avaient pris part une soixantaine de pays qui a permis de rapprocher le PT de l’UGTA. C’est aussi l’université d’été du PT à laquelle a participé Abdelmadjid Sidi Saïd. Mais l’élément catalyseur qui a favorisé le rapprochement reste l’échec et la déception du patron des cols bleus qui a, par le passé «dégagé» plusieurs cadres de la Centrale syndicale au profit du RND et du FLN qui les ont parrainés pour en faire des députés. L’ascenseur n’a jamais été renvoyé au bienfaiteur de la Maison du peuple qui a toujours «fourni» les formations proches du pouvoir. Pis encore, celles-ci et une fois les réformes politiques passées, ont vite oublié l’existence de l’UGTA et son potentiel humain. La preuve, en cette veille de législatives, aucun cadre syndical ne figurera sur les listes du Parti de Ouyahia ou de Belkhadem. Ce désamour est assimilé à une trahison. Au sein de l’UGTA, le sentiment d’avoir été abusé et exploité est profond. Cette ultime «ingratitude» dépite les défenseurs du monde du travail. Ce dé-sappointement a affecté le staff de Sidi Saïd. Le très actif Djenouhat avait même pensé à établir une liste indépendante proche des visions de l’UGTA et que parrainera la Centrale syndicale. Le risque d’un manque de représentation au sein de l’APN dérange les syndicalistes, d’autant que le monde du travail, en ébullition, risque de connaître des retournements de situations défavorables menaçant certains acquis. Des indiscrétions seraient parvenues aux oreilles de Sidi Saïd et de Louisa Hanoune faisant état d’un projet cultivé par l’actuel ministre du Travail, Tayeb Louh qui consiste à reformer le code du travail. Il serait question de
«précariser» l’emploi par un projet d’amendement des lois sociales. Une dizaine d’amendements destinés à réviser le code du travail et le faire passer devant le prochain Parlement qui sera, selon les calculs des uns, vidé de syndicalistes. Cela permettrait de faire disparaître beaucoup d’acquis et facilitera la vie aux patrons. L’on cite le cas de la loi 90/11 relative aux relations de travail qui serait ciblée par cette refonte. C’est sur

«recommandations» du patronnat qui perd beaucoup d’argent dans les conflits prud’hommaux l’opposant aux travailleurs, qu’une refonte du contrat à durée indéterminée serait donc nécessaire et reste à prévoir. L’ébauche laisserait entrevoir que ce CDI prendra la forme d’un contrat à durée déterminée (CDD) et qui sera généralisé à travers toutes les entreprises. Ce dernier patronnat accule le gouvernement et l’incite à trouver des artifices afin de précariser le travail. Ce projet «funeste» aurait été la goutte qui a fait déborder le vase poussant l’UGTA à penser à puiser au sein des syndicalistes, notamment ceux du secteur de la sidérurgique et en faire un groupe qui sera parrainé par Louisa Hanoune avec la bénédiction de l’organisation syndicale.
Azzedine Belferag