Les patrons et chefs d’entreprises qui revendiquaient un régime dérogatoire pour les pièces de rechange et les matières premières d’appoint n’auront, en fin de compte, qu’une moitié de gain de cause.
Il n’y aura pas d’exonération de recours au crédit documentaire pour les entreprises productrices, mais il y aurait plutôt un léger assouplissement pour les besoins dits « imprévisibles » en pièces de rechange, matières d’appoint et « importations d’urgence ». Cet assouplissement devrait être introduit dans la loi de finances complémentaire 2010, dont la mouture finale est en attente de la caution du Conseil des ministres.
Le paiement des importations par le seul moyen d’une lettre de crédit demeure une religion inchangée, mais un assouplissement est apporté par la LFC 2010 à propos du transfert libre de fonds, fixé jusqu’ici à 100 000 DA par la Banque d’Algérie, dans le cadre de ses prérogatives en matière de réglementation des changes.
Ce seuil de non-recours obligatoire au crédoc devrait être révisé à la hausse par la loi de finances complémentaire 2010, avons-nous appris hier d’une source bancaire. Le relèvement du montant des transferts libres de fonds concerne les importations d’urgence, à l’instar des pièces de rechange et des matières d’appoint nécessaires à la production.
Autrement dit, « les fournitures concernées par cet assouplissement doivent répondre exclusivement aux impératifs de production », nous a expliqué la même source, contactée, hier, par nos soins. Les commandes unitaires opérées dans ce cadre pourraient dépasser le seuil de 2 millions de dinars par trimestre pour une même entreprise auprès de l’ensemble des guichets bancaires, avons-nous appris également.
Cependant, cette « dérogation » introduite au profit des entreprises productrices n’exonère pas les opérateurs de l’obligation de domicilier l’opération, quel que soit le mode de paiement. Les banquiers relèvent, néanmoins, le fait que la gestion de cette espèce de « dérogation » pourrait s’avérer complexe puisqu’ils seront appelés à statuer sur les cas de milliers d’entreprises.
Dans la foulée, il est utile de rappeler que l’institution, par la LFC 2009, de la lettre documentaire comme seul moyen de paiement des importations a pénalisé plusieurs entreprises, dont la trésorerie s’est révélée incapables de soutenir les coûts exigés par le crédoc. Les entreprises privées ne sont pas les seules à subir les « contrecoups » du crédit documentaire.
Le patron d’Air Algérie, Abdelwahid Bouabdallah, a déclaré la semaine dernière que la compagnie aérienne publique a été gravement pénalisée par l’institution du crédoc comme seul moyen de paiement des importations. Air Algérie importe périodiquement des pièces de rechange pour l’entretien de ses avions et la constitution de stocks nécessaires au fonctionnement de la compagnie et de sa base de maintenance.
De son côté, le Forum des chefs d’entreprises (FCE) a estimé, récemment, par la voix de son président, que « les mesures censées restreindre l’importation, à l’image de cette obligation de passer par le crédit documentaire, sont des mesures qui, aux yeux des chefs d’entreprises, pénalisent nettement plus les producteurs qu’elles ne contribuent à réduire les importations ».
C’est dire que l’onde de choc provoquée par la mise en application subito presto du crédoc a fragilisé plusieurs entreprises, y compris les sociétés publiques qui, pourtant, bénéficient d’un soutien financier de l’Etat. Par ailleurs, notre source nous a indiqué que la LFC 2010 allait introduire un autre texte de loi relatif au traitement fiscal du leasing.
La loi de finances complémentaire 2010 fera bénéficier les opérateurs d’un sursis de 3 ans avant l’application de la nouvelle réglementation comptable dans le traitement fiscal du leasing. Les importations de céréales devraient être taxées aussi par la LFC 2010, qui vient également renforcer le droit de préemption de l’Etat sur l’achat des actifs des entreprises à capitaux étrangers.
Par Ali Titouche