Le constat peu encourageant est donné par des spécialistes qui ont assisté au débat animé hier au Forum d’El Moudjahid. De l’avis de ces derniers, il existe des réticences qui renvoient à l’interrogation de savoir si l’État est effectivement convaincu de la nécessité de lancer un programme devant permettre de remplacer dans le futur l’énergie fossile dont les sources sont appelées à disparaître dans quelques décennies.
Cette logique ne semble pas s’inscrire en droite ligne avec la politique des responsables au pouvoir même si une volonté, somme toute timide eu égard à son faible impact, est exprimée çà et là lors de séminaires et de rencontres officielles.
Sinon comment expliquer ce manque d’ardeur à concrétiser un programme qu’on ne fait qu’annoncer depuis plusieurs années si ce n’est des décennies ? Le Maroc a lancé son programme.
La Tunisie propose 14 projets. L’Algérie n’a annoncé le sien qu’en 2011. La production chez nous est infime : 0,1%. Elle atteindra, disent les experts, 40% en 2030 essentiellement en énergie électrique. C’est vrai qu’on annonce une production frénétique dès 2016 avec un déploiement à grande échelle et comme l’a présenté Yahia Zane, DG de Licorne Communication et président de l’Association des agronomes algériens, le programme des énergies renouvelables, qui constitue un énorme défi, créera 200 000 emplois dont 100 000 dans la production, concernera l’énergie solaire, éolienne et géothermique.
Mais qu’en est-il de l’enjeu du choix et la synergie des compétences comme Sonelgaz et Sonatrach sachant que la concurrence est rude au niveau mondial ? Là aussi, on affirme que ces grosses boîtes s’attellent à faire de leur mieux pour des projets de fabrication de panneaux solaires ou d’encapsulation de modules. Parallèlement, l’Algérie opte pour des projets de partenariat notamment Désertec (germano-espagnol) ou Apollo (japonais). À rappeler que le président Bouteflika porte un grand intérêt pour le premier projet en recommandant de “ne pas fermer la porte aux partenaires étrangers potentiels”. L’État pose alors trois conditions à savoir le transfert de technologie, la fabrication locale des équipements adéquats et l’exportation du surplus vers l’Europe.
Défendre ses intérêts est tout à fait légitime, mais dans un monde de donnant-donnant, ce n’est pas toujours évident. “Le secteur de l’agriculture dans les Hauts-Plateaux et le Sud souffre actuellement de la consommation d’énergie électrique. Les expériences conjuguées de la DGF, du HCDS, du CDARS permettent aujourd’hui de se fixer des perspectives plus ambitieuses en matière de recours aux énergies renouvelables. Un programme est en vue pour répondre aux besoins : il s’agit de l’acquisition et de l’installation de 6 327 stations photovoltaïques devant couvrir 18 wilayas et 44 300 individus. Pour abreuver un cheptel de 161 000 têtes, il y a nécessité de prévoir 39 forages en énergie solaire, équiper 9 unités de pompage en énergie solaire, 95 puits et 8 unités en éolienne”, affirme Yahia Zane. Cependant, cette volonté paraît fragile devant le peu d’engouement de l’État quand on sait que d’une part rien n’est fait pour rendre accessible le panneau solaire au citoyen. Il y a nécessité de faire baisser le prix. “Nous attendons que cette dynamique s’amorce”, dira M. Zane. Des intervenants ne cachent pas leur scepticisme sur la question. “Il n’y a pas de vision et de stratégie globale en Algérie et ceux qui sont directement concernés sont exclus du débat”, confie l’un d’eux.
D’autres soulèvent l’implication timide des opérateurs dans le projet Désertec, faisant savoir que l’État doit annoncer clairement et franchement qu’il y a nécessité de créer cette industrie. À commencer par l’élaboration d’une batterie de dispositions devant accompagner ce grand projet. Au Maroc, les banques, les assurances et tous les concernés sont impliqués”, fera savoir un intervenant. “Est-ce que l’État croit vraiment à cette option ?” s’interroge enfin M. Zane. La réponse de certains ministères, notamment celui de l’Énergie et des Mines est, selon lui, plutôt froide. Et c’est toute la question.
A F