Le professeur Chitour réclame un comité des sages: «La constitution n’est pas le Coran!»

Le professeur Chitour réclame un comité des sages: «La constitution n’est pas le Coran!»

Par 

Chems Eddine Chitour soutient que les conditions actuelles ne permettent pas d’organiser une élection présidentielle. «Ce comité est inévitable pour assurer la transition.»

Le professeur Chems Eddine Chitour n’y est pas allé par quatre chemins: le divorce est consommé entre le peuple et le système. Connu pour ne pas avoir sa langue dans sa poche, cet universitaire qui était, hier, l’invité du forum du quotidien El Moudjahid déplore le fait que nos dirigeants s’accrochent au pouvoir. Il profite de cette tribune pour lancer un «SOS» pour une sortie de crise rapide et sans embûches. «Le pays est ingouvernable en ce moment. Il n’y a qu’à voir la réaction des populations de Béchar et de Tébessa contre deux membres du gouvernement en les empêchant d’effectuer leurs visites de travail», souligne-t-il afin de conceptualiser la chose. «Il est urgent de trouver une porte de sortie afin d’éviter le chaos», soutient ce professeur émérite non sans balayer d’un revers de la main l’«excuse» constitutionnelle. «Les dirigeants actuels sont décriés par la rue. Il leur est impossible de continuer leurs missions.

On parle du légalisme constitutionnel pour justifier leur maintien, mais ce n’est pas comme si c’était la 1ère fois qu’on allait toucher à la Constitution», soutient-il. Chems Eddine Chitour rappelle que la Constitution a été modifiée 8 fois en 57 ans, assurant qu’une fois de plus ou de moins ne changera rien. «Surtout si cela doit sauver le pays de la dérive. Je suis un légaliste, mais il y a des raisons d’État comme celle-là qui nécessitent un tel sacrifice», explique-t-il avant de rappeler que le président qui sera élu démocratiquement par les Algériens aura la lourde tâche de doter le pays d’une nouvelle Constitution. «Il aura la légitimité des urnes pour le faire, donc cette Constitution sera appelée tôt ou tard à sauter. Mieux vaut que cela se fasse maintenant afin d’éviter l’enlisement de la crise», estime-t-il. Le professeur Chitour fait confiance, dans ce sens, au savoir de juristes algériens qui «sauront trouver une formule pour faire passer légalement cette éventualité».

Il plaide dans ce sens pour la nomination d’un comité des sages qui aura à gérer la transition. «Ce comité devra être composé de personnalités en qui les Algériens ont confiance. Il gérera la transition pour préparer une élection qui se tiendra dans un délai raisonnable», prône-t-il. Ce «délai raisonnable» est -il le 4 juillet prochain? (rire). «Une élection pour qui, avec qui?», se demande-t-il. «Il est inconcevable et en même temps impossible d’organiser une élection à cette date», réplique-t-il très en colère. «Non seulement le délai de trois mois est trop court pour préparer une transition, mais ceux qui vont organiser cette élection n’ont pas de légitimité populaire. Il n’y aura donc pas d’élection le 4 juillet», atteste-t-il avant d’argumenter ses dires par le «référendum populaire» de vendredi dernier qui a rejeté cette joute électorale.»

«Mais surtout la prise de position des magistrats et avocats qui ont refusé de les encadrer si elle se tenait à cette date et dans ces conditions», poursuit-il son réquisitoire. «On est donc dans l’impasse et la situation économique et sociale du pays ne permet pas que la crise dure encore plus longtemps», avertit le professeur, en mettant en avant les finances qui sont dans le rouge, l’inflation galopante et la forte croissance démographique. «Plus ça durera, plus le chaos approchera et plus cela ouvrira la porte aux ingérences étrangères qui n’attendent que cela», met-il en garde. D’ailleurs, il n’écarte pas un durcissement du mouvement populaire avec des grèves illimitées dans les secteurs de l’éducation, de l’enseignement supérieur ou pis encore, de l’énergie.

«Cela mettra le pays à genoux», s’angoisse-t-il. Le professeur Chitour, qui avertit sur l’excès de populisme, en appelle à la sagesse de nos responsables civils et militaires pour mettre fin à cet imbroglio et répondre aux doléances du peuple. «Laissez le rêve devenir réalité…», conclut-il avec beaucoup d’espoir.