Les ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur ont revu à la baisse l’âge de postuler au concours de chef de service pour exclure sciemment des personnes bien connues.
Invité hier au Forum de la santé du quotidien El Moudjahid pour parler de la santé publique et de la formation médicale en Algérie, le professeur Abdelouaheb Bengounia exerçant au CHU Mustapha Pacha, n’y est pas allé par quatre chemins pour critiquer différentes réformes initiées depuis l’indépendance. L’une des erreurs monumentales commises justement dans ce sens, a indiqué le conférencier, est l’ouverture à partir des années 1986 des Centres hospitalo-universitaires(CHU) à la place des secteurs sanitaires(SS).
«Ces centres, qui n’existent nulle part, en dehors de la France, dans le monde, ont consacré les disparités en termes d’accès à la santé entre les citoyens du même pays», a déploré le professeur Bengounia. «Ces 13 CHU, qui n’ont de prestige que le nom, sont de véritables établissements budgétivores.
Ils consomment 31% de la totalité du budget accordé au secteur de la santé», a-t-il ajouté, soulignant que ces centres ont fait disparaître la formation de qualité des médecins qui se faisait par le passé au sein des secteurs sanitaires. Le drame aurait pu être évité, si par exemple les responsables du secteur de la santé avaient le génie de multiplier ces centres à travers toutes les wilayas.
«Hélas, le nombre de ces centres est resté le même jusqu’à 2011 et uniquement dans 10 wilayas, au nord du pays», a-t-il ajouté. L’autre anomalie que le professeur Bengounia a longuement critiqué est le fait de confier la gestion du secteur de la santé aux walis. «Cette décision est à l’origine de la faiblesse de la couverture sanitaire dans le pays», a-t-il fait observer. «En plus du fait que le wali ignore tout dans le secteur de la santé.
Cela a créé aussi un déséquilibre dans la promotion de la santé à travers les wilayas. Développée là où il y a de bons walis et très en retard où les walis ne font pas comme il se doit leur travail», indique-t-il. Evoquant longuement par la suite le volet formation, le professeur Abdelouaheb Bengounia, a dit sans mâcher ses mots que cet aspect est le parent pauvre du secteur de la santé en Algérie, particulièrement ces dernières années.
«Auparavant, les étudiants en médecine fréquentaient les centres de santé et les autres polycliniques dès la première année de leur cursus à l’université. «Aujourd’hui, la formation pratique ne leur est permise que vers la fin de leur cursus. C’est ce qui a fait que beaucoup d’étudiants ne savent rien de la médecine avant qu’ils se voient affectés dans des structures sanitaires», a-t-il poursuivi.
Enchaînant dans le même ordre d’idées, l’invité du Forum d’El Moudjahid s’est étalé sur le dernier concours d’accès au poste de chef de service. Les conditions qu’ont arrêtées les ministres actuels de la Santé et de l’Enseignement supérieur sont le parfait exemple de l’exclusion des compétences. «En effet, et contre la Constitution qui garantit l’égalité des chances, ces derniers ont décidé d’exclure les candidats âgés de plus de 62 ans de postuler à ce concours.».
L’âge limite pour postuler à ce concours selon le Journal officiel, précise l’invité d’El Moudjahid, est de 67 ans. «Cette condition que les deux ministres ont appliquée pour exclure sciemment des personnes bien connues dont je fais partie, a fait perdre 12 candidats de haut niveau au secteur de la santé en Algérie», a-t-il signifié.Et de poursuivre: «A cause de ces conditions arrêtées sur 461 postes à pourvoir, il n’y avait que 260 candidats qui se sont présentés.
Il y a encore 201 postes vacants», a indiqué le professeur, faisant remarquer qu’actuellement de nombreux services sont gérés par des maîtres-assistants. S’exprimant par ailleurs sur la dernière polémique créée par la campagne de vaccination contre la rougeole et la rubéole, Bengounia a dit qu’il est tout à fait normal que les parents et les élèves aient peur et refusent le vaccin quand une telle opération n’est précédée d’aucune campagne de sensibilisation et quand également les responsables du secteur de la santé ne savent pas communiquer. «Ils ont fait preuve de plus de peur que d’assurance, en s’adressant aux parents», a-t-il ajouté, en indiquant que ce n’est pas la première fois qu’un vaccin est refusé par des Algériens.»