Le Président de la Commission européenne, José manuel Barroso “L’Algérie est un partenaire-clé pour l’Union européenne”

Le Président de la Commission européenne, José manuel Barroso  “L’Algérie est un partenaire-clé pour l’Union européenne”

Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, effectuera une visite officielle en Algérie aujourd’hui et demain à l’invitation du Premier ministre, Abdelmalek Sellal. Le président de la commission signera un mémorandum d’entente sur le partenariat stratégique sur l’énergie entre l’Union européenne et l’Algérie. En exclusivité pour “Liberté”, il évoque les grands axes de sa visite entre énergie, accord d’association, lutte contre la corruption et l’avenir des relations Algérie-UE.

Liberté : Monsieur le président, vous allez effectuer une visite en Algérie les 6 et 7 juillet. Peut-on savoir qu’est-ce qui motive cette visite ?

José Manuel Barroso : Il s’agit de ma première visite en Algérie où je souhaitais me rendre depuis longtemps. Le partenariat entre l’Union européenne et l’Algérie est un partenariat fort, fondé sur la confiance réciproque et nous voulons le développer encore davantage et l’inscrire dans le long terme. C’est bien de cela dont témoignera ma visite notamment avec la signature d’un mémorandum d’entente sur l’établissement d’un partenariat stratégique entre l’Algérie et l’Union européenne dans le domaine de l’énergie.

Votre visite est importante puisque vous restez deux jours à Alger. Quelles sont les personnalités que vous allez rencontrer ?

J’accorde effectivement beaucoup d’importance à cette visite car l’Algérie est un partenaire de tout premier plan pour l’Union européenne et je me réjouis de l’intensification et de l’approfondissement très positifs de nos relations depuis 2011. Mes diverses rencontres au cours de ces deux jours illustreront d’ailleurs l’étendue de notre partenariat. Je vais ainsi rencontrer le Premier ministre qui sera accompagné de divers membres du gouvernement, les présidents des deux Chambres du Parlement algérien, les ambassadeurs de l’Union européenne présents en Algérie, mais aussi des hommes d’affaires algériens et européens, des intellectuels et des représentants de la société civile algérienne.

Beaucoup de voix à Alger commencent à craindre un changement dans les relations énergétiques entre UE et l’Algérie. Pensez-vous que cela va arriver ou bien se dirige-t-on vers un renforcement de cette relation ?

Ma réponse est claire : nous nous dirigeons vers un renforcement de cette relation. Et c’est précisément l’objectif du mémorandum d’entente sur l’établissement d’un partenariat stratégique entre l’Algérie et l’Union européenne dans le domaine de l’énergie que je signerai au cours de cette visite.

L’énergie est un domaine prioritaire du partenariat euroméditerranéen, car c’est un élément fondamental dans la construction d’une zone partagée de prospérité et de stabilité. Dans ce cadre, l’Algérie est un partenaire-clé pour l’Union européenne tant au niveau bilatéral qu’au niveau régional.

Comme vous le savez, l’Algérie est un fournisseur majeur de l’Europe en gaz naturel et l’Europe est de loin le principal client de l’Algérie, nous partageons donc là un enjeu stratégique important. Les énergies renouvelables sont un autre domaine dans lequel notre potentiel de coopération est très grand. La stratégie algérienne pour les énergies renouvelables est compatible avec la politique européenne, qui vise à la fois la sécurité et la soutenabilité environnementale des approvisionnements d’énergie. C’est pourquoi nous voulons appuyer le plan algérien en mettant à disposition l’expérience et les technologies européennes.

Le mémorandum que nous allons signer nous permettra d’établir un cadre de coopération qui couvrira l’ensemble de ces sujets d’intérêt commun, à savoir les hydrocarbures, les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, la réforme du cadre législatif et réglementaire, l’intégration progressive de nos marchés de l’énergie, le développement des infrastructures d’intérêt commun, le transfert de technologie et le développement local.

Certaines forces politiques algériennes critiquent ouvertement l’accord d’association qui lie les deux parties et le considèrent en défaveur d’Alger. Pensez-vous qu’il faut renégocier cet accord ?

Tout d’abord, j’aimerais souligner que le développement de relations commerciales solides avec l’Algérie avec des avantages économiques réciproques a toujours été l’un de nos principaux objectifs. Le volet commercial du partenariat UE-Algérie, dont l’accord d’association est le point d’ancrage, peut certainement être encore amélioré, élargi et diversifié. Je suis persuadé que plus d’échanges et d’intégration économique entre l’UE et l’Algérie est aussi dans l’intérêt de l’économie algérienne qui cherche à se diversifier, de se moderniser et d’attirer plus d’investissements. L’Union européenne est le partenaire naturel de l’Algérie pour réussir tous ces objectifs.

En plus, les défis économiques internationaux auxquels l’Europe et le Maghreb en particulier doivent faire face aujourd’hui et nos intérêts communs nécessitent sans aucun doute un renforcement de la coopération bilatérale dans tous les domaines de notre accord d’association.

L’UE est restée silencieuse envers les graves dossiers de corruption étalés dans la presse algérienne et mondiale. Comment expliquez-vous ce silence avec un partenaire si important dans la région ?

Nous avons un dialogue régulier avec les autorités algériennes, dans lequel nous appuyons la nécessité de garantir de jure et de facto les principes de l’État de droit et de bonne gouvernance qui sont au cœur même du dialogue politique entre l’Union européenne et l’Algérie. Et je peux vous assurer que l’Union européenne est très attachée au processus de réformes en Algérie et nous suivons avec beaucoup d’attention son évolution et la mise en œuvre des réformes politiques dernièrement adoptées. En ce qui concerne les enquêtes en cours, nous n’avons pas l’habitude de commenter des procès judiciaires.

Comment voyez-vous les relations futures avec Alger, tant politiques qu’économiques ?

L’année 2012 a été marquée par des progrès tangibles au niveau des relations bilatérales entre l’UE et l’Algérie et je souhaite que nous continuions sur cette lancée.

Nous entretenons des contacts intenses. L’invitation à la mission d’observation électorale de l’Union européenne, la visite du commissaire européen Füle au mois de mars, la visite de la haute représentante et vice-présidente de la commission et la visite d’une délégation parlementaire algérienne à Bruxelles en novembre, les visites de représentants du Parlement européen, les visites fréquentes de hauts fonctionnaires, la réunion du Conseil d’association en décembre et la réunion du sous-comité “Dialogue politique, sécurité et droits de l’Homme” en mai témoignent de l’intensification des échanges au plus haut niveau. Et les deux jours que je passerai en Algérie illustrent bien l’intensité de ces relations.

Nous avons de nombreux dossiers importants en cours, tels que le partenariat dans le domaine de l’énergie, les négociations d’un plan d’action dans le cadre de la Politique européenne de voisinage, les négociations en vue de l’adhésion à l’OMC et l’appui à la diversification économique en Algérie.

La réalisation de ces objectifs hissera nos relations à un niveau qualitatif plus élevé.

Par ailleurs, le contexte régional actuel et la situation dans la région du Sahara/Sahel, aggravée par la crise au Mali, nous encouragent à davantage de concertation et de dialogue notamment à un renforcement de notre dialogue politique et un approfondissement de notre coopération dans différents domaines d’intérêt commun.

Nos relations bilatérales doivent être à la hauteur de nos ambitions réciproques et des opportunités qu’offrent notre partenariat dans des domaines très divers. Et je suis confiant que les années à venir permettront de concrétiser nos objectifs communs.