Le président Bouteflika qualifie “la crise des prix du pétrole de sévère ” Budget : le gouvernement revoit sa copie

Le président Bouteflika qualifie “la crise des prix du pétrole de sévère ” Budget : le gouvernement revoit sa copie
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Des coupes budgétaires seront prises et des arbitrages seront prononcés, mais pas au détriment des transferts sociaux qui seront, à court terme, préservés.

L’optimisme, affiché ostentatoirement par le gouvernement quant à l’amortissement de l’effet de la chute importante et prolongée du prix du baril du Brent sur l’économie et la finance nationales, s’est brutalement dissipé, cédant la place à de sérieuses inquiétudes. L’Exécutif, faussement serein, depuis notamment la fameuse réunion de l’Opep où le niveau de la production du pétrole a été maintenu, accentuant du coup la tendance déjà fortement baissière des prix, finit par admettre la réalité d’une crise aiguë. Une crise tellement préoccupante d’ailleurs qu’un mini-Conseil des ministres lui est consacré mardi.

C’est très significatif, au demeurant, que le président de la République, peu enclin à la convocation du Conseil des ministres depuis son AVC et la convalescence qui s’en est suivie, intervienne pour couper court au laïus gouvernemental, lequel était jusque-là loin de cadrer avec la réalité. Mardi, donc, le président Bouteflika instruisait son gouvernement de revenir de sa fuite en avant et de se mobiliser pour faire face à cette crise de pétrole qualifiée, pour la première fois, de “sévère” et dont les lendemains sont incertains. “La crise actuelle des prix du pétrole est sévère, avec des perspectives imprévisibles à court terme. Aussi le gouvernement est chargé d’en assurer un suivi permanent et d’examiner, trimestriellement, sous la direction du Premier ministre, toute adaptation qui s’avérerait nécessaire dans la gestion économique est budgétaire”, a-t-il averti à l’issue du conseil restreint. La recommandation ainsi faite de procéder à des évaluations trimestrielles, autrement dit de s’astreindre à une vigilance accrue, est, à vrai dire, le signe patent d’une panique à bord. Et pour cause ! Dans le cas du gouvernement algérien, les implications économiques et financières de la chute du prix du baril du pétrole en appellent à des corollaires politiques. Les difficultés économiques qu’occasionnerait cette chute des prix du pétrole sont source d’inquiétudes pour le pouvoir en place dont la survie se trouve menacée. L’indigence financière mettrait inéluctablement à mal un pouvoir qui se maintient et se perpétue par la rente. D’ailleurs, c’est par le recours à l’outrance dans la subvention et à la hausse salariale qu’il s’est mis à l’abri des bourrasques qui ont soufflé en Afrique du Nord et au Moyen-Orient en 2011 à tel point d’ailleurs que, surpris par la crise, il se retrouve face à un terrible dilemme : rationnaliser la dépense publique sans toutefois renoncer à la subvention et à l’investissement.

Choix cornélien

LG Algérie

Le gouvernement est rattrapé par son imprévision et son autisme qui a fait qu’il a refusé d’écouter les voix, fort nombreuses, au demeurant, alertant sur les risques encourus à maintenir un tel train de dépenses en l’absence de niches financières exploitables en dehors de l’exportation des hydrocarbures. À quelle politique se rendra-t-il pour ne pas subir de plein fouet les effets de la crise ? Pour Bouteflika, il n’est pas question de tailler dans les dépenses qui ont aidé à la “stabilité”. “Le président Bouteflika a instruit le gouvernement d’exclure toute remise en cause de la politique d’investissements publics qui demeure le moteur de la croissance et de la création d’emplois et qui permet aussi de répondre aux besoins sociaux de la population, notamment dans le domaine de l’éducation, de l’enseignement et de la formation, de la santé et du logement”, est-il souligné dans le communiqué sanctionnant le Conseil restreint des ministres. C’est donc dans le budget de fonctionnement qu’il va falloir opérer des coupes, sinon à tout le moins le rationnaliser. “Le président de la République a également chargé le gouvernement de s’atteler à la rationalisation de la dépense publique, notamment au niveau du budget de fonctionnement.” La crise est donc bien ressentie, même si, pour ne pas avoir à avouer des erreurs d’aiguillage économique, l’Exécutif invité à ne pas céder au désarroi, rappelant que l’État “dispose d’une certaine marge de manœuvre résultant d’un désendettement public anticipé quasi total, des réserves de changes constituées, ainsi que de l’épargne publique accumulée au Fonds de régulation des recettes”. Mais pour combien de temps l’État puisera encore dans la réserve accumulée ? Le Fonds de régulation des recettes (FRR) est passé de 7 000 milliards de dinars en 2012 à juste 4 500 milliards de dinars en 2014.

Si la courbe des prix du pétrole continue à décroître, les réserves vont corrélativement s’épuiser. C’est pour cela que le discours du gouvernement, qui se veut rassurant, manque de pertinence. En effet, les experts ne perçoivent pas comment s’en tenir à une feuille de route, conçue en fonction d’une opulence financière, alors que le tableau affiche un net reflux des recettes. Une équation quasi impossible à résoudre pour un gouvernement qui estime pouvoir réussir, durant les courts rattrapages, ce qu’il n’a pu faire durant 15 ans.

S. A. I.