La démarche du pouvoir qui a voulu domestiquer l’islamisme est pour quelque chose dans cette foire de bric-à-brac qu’est devenue la scène politique nationale.
La polémique sur l’arabe parlé à l’école qui n’en finit pas d’être alimentée de toute part est symptomatique de la fracture qui existe entre deux visions de l’Algérie. En effet, les élites nationales ne voient pas toutes dans la même direction, c’est le moins que l’on puisse dire.
La polémique sur l’arabe parlé à l’école qui n’en finit pas d’être alimentée de toute part est symptomatique de la fracture qui existe entre deux visions de l’Algérie. En effet, les élites nationales ne voient pas toutes dans la même direction, c’est le moins que l’on puisse dire.
Il y a d’un côté ceux qui prônent une approche pragmatique et tentent de trouver des solutions «universelles» aux questions de l’heure, et il y a d’un autre côté, ceux qui chahutent les premiers et passent toute décision gouvernementale au «scanner» des dogmes islamo- conservateurs qui, le plus souvent, s’affole et met sens dessus dessous la scène nationale, convoquant pour les besoins de la propagande des chefs de partis et d’associations religieuses, les réseaux sociaux, la presse acquise aux idées archaïques et créent un climat lourd qui impose un «recadrage» de la part de l’Exécutif.
Sur plusieurs projets de loi et autres circulaires ministérielles, le Premier ministère s’est vu dans l’obligation de stopper le processus de mise en oeuvre, pour, dit-on à chaque fois, éviter des escalades dangereuses. On en est donc en 2015 à faire deux pas en arrière pour un pas en avant sur des questions centrales en rapport avec le projet de société devant conduire l’Algérie dans un sens ou dans l’autre. Résultat: le pays fait du surplace ou avance à grand-peine en traînant des contradictions dans sa législation et même dans la pratique politique quotidienne.
Celle-ci est devenue très étonnante pour tout observateur. On ne sait désormais plus qui défend quoi, au pouvoir comme dans l’opposition. Il faut dire que la redistribution des cartes à travers les alliances, coordinations et autres conglomérats partisans, les formations politiques ont cru bon mettre de côté leurs programmes pour se concentrer sur le soutien au président de la République ou pour dénoncer la politique suivie par le pouvoir depuis 1999.
L’on peut trouver ce genre de «cloisonnements» quelque peu bénéfique pour la pratique politique dans le pays, au sens où deux pôles s’opposent. Il suffirait de régler la problématique de la crédibilité des suffrages universels pour espérer des alternances, comme cela se produit de par le monde.
Mais cette façon de voir la politique en Algérie est totalement fausse, pour la simple raison qu’il n’existe pas de pôle à proprement parler. Le conglomérat démocrato-islamo-conservateur, actuellement au pouvoir a montré ses limites justement de par sa composition idéologique qui amène le président du groupe du parti majoritaire à l’APN critiquer ouvertement deux ministres de la République sur des projets assumés et discrètement soutenus par des partis de l’opposition, eux-mêmes membres d’une Coordination qui trouve toutes les tares au gouvernement en place.
Dans la même Coordination, des partis défendent la même thèse que le président du groupe parlementaire du parti majoritaire.
Ainsi, comme on peut critiquer le pouvoir sur ses contradictions idéologiques qui lui ôtent toute profondeur identitaire, il y a lieu de constater la même faiblesse dans l’opposition qui, à travers ses discours, qui vont dans tous les sens, n’est pas apte à assumer pleinement une prise de pouvoir. On tomberait fatalement sur la même configuration dans les pouvoirs exécutifs et législatifs.
Il semble donc que la question des projets de société qui avait surgi au lendemain des événements d’octobre 1988 ne soit toujours pas réglée et la démarche du pouvoir qui a voulu domestiquer l’islamisme est pour quelque chose dans cette grande foire de bric-à-brac qu’est devenue la scène politique nationale.
Cela envoie un signal très négatif à une société qui ne sait plus qui fait quoi et pour qui faut-il voter pour voir tel ou tel autre sujet pris en considération.
Bref, après plus de 26 ans d’ouverture démocratique, le gouvernement issu d’élections censées être démocratiques recule devant une opposition censée être très minoritaire sur des thèmes majeurs lié au projet de société.