Le pouvoir égyptien promet la fermeté,Les islamistes affirment leur détermination

Le pouvoir égyptien promet la fermeté,Les islamistes affirment leur détermination

Les rassemblements des islamistes pro-Morsi squattent les places du Caire

«Nous ne laisserons aucun mercenaire ni aucune personne animée par la rancune tenter de perturber l’atmosphère d’unité et nous les affronterons avec la plus grande force et la plus grande fermeté», a déclaré le ministre de l’Intérieur.

L’impasse politique semblait totale hier en Egypte, le nouveau pouvoir insistant sur sa ligne de fermeté face aux partisans du président islamiste déchu Mohamed Morsi, toujours mobilisés au lendemain de la mort de 72 personnes dans des affrontements avec la police. Les violences politiques ont fait hier deux morts parmi les fidèles de M.Morsi, un à Port-Saïd (nord-est) et un à Kafr el-Zayat (nord), et une trentaine de blessés. Les forces de sécurité ont en outre annoncé avoir tué dix «terroristes» dans la péninsule du Sinaï, en proie à une rébellion larvée. «Nous ne laisserons aucun mercenaire ni aucune personne animée par la rancune tenter de perturber l’atmosphère d’unité et nous les affronterons avec la plus grande force et la plus grande fermeté», a déclaré le ministre de l’Intérieur Mohamed Ibrahim. Le ministre, qui s’exprimait en présence du président par intérim Adly Mansour et du chef de l’armée et nouvel homme fort du pays, le général Abdel Fattah al-Sissi, avait annoncé samedi la dispersion «très prochaine» des deux campements dressés au Caire par des milliers de partisans de M.Morsi depuis son renversement. Les fidèles du chef de l’État destitué le 3 juillet ne montraient pas davantage de volonté de faire des concessions. «Il y a des sentiments de tristesse et de colère, mais aussi une énorme détermination» dans le camp des partisans du président destitué, a affirmé un porte-parole des Frères musulmans, Gehad el-Haddad. «Nous acceptons toute initiative, pourvu qu’elle soit fondée sur la restauration de la légitimité et annule le coup d’État. Nous ne négocierons pas avec l’armée», a-t-il dit, excluant tout compromis qui avaliserait la destitution de M.Morsi, premier président du pays élu démocratiquement. Aux abords de la mosquée Rabaa al-Adawiya, dans le nord-est du Caire, plusieurs milliers de pro-Morsi ont passé une nouvelle nuit dans un village de tentes, au milieu d’affiches et de banderoles à l’effigie du président déchu. Ignorant la menace des autorités de mener une action de force «très prochainement», certains scandaient «Sissi dégage!» à l’adresse du chef de l’armée. «Ce n’est pas une question de personne, mais de légalité et de démocratie», a affirmé un sympathisant de M.Morsi. «Nous faisons face aux balles, aux chars et aux blindés de manière pacifique», a déclaré Ali Chafiq, militant des Frères musulmans, dans le campement, dénonçant le «massacre» de la veille. Le bilan de 72 morts des affrontements de samedi matin au Caire est le plus lourd depuis la destitution par l’armée de M.Morsi. Les heurts, dont les deux camps se sont rejeté la responsabilité, ont éclaté quelques heures après la dispersion des manifestations massives rivales vendredi des partisans de l’armée et des Frères musulmans. Le secrétaire d’État américain John Kerry s’est dit «très inquiet» par cette dernière «explosion de violence», qui porte à plus de 300 le nombre de tués dans les troubles politiques en un peu plus d’un mois. L’organisation Human Rights Watch a dénoncé un «mépris criminel» des autorités «pour la vie humaine». Ces morts montrent «une volonté choquante de la part de la police et de certains (responsables) politiques de faire monter d’un cran la violence contre les manifestants pro-Morsi», a estimé HRW. «L’Égypte est structurée par ses deux forces politiques: les Frères musulmans et l’armée, qui parfois collaborent, parfois s’opposent, et font l’ordre et le désordre politique», a souligné Jean-Yves Moisseron, chercheur à l’Institut de Recherche pour le développement (IRD) et rédacteur en chef de la revue Maghreb-Machrek. «Les progressistes égyptiens n’ont pas saisi la chance historique qu’ils avaient en 2011 de se structurer de manière autonome», a-t-il rappelé, estimant que «les conditions historiques d’une transition démocratique en Egypte sont loin d’être acquises».