Pas du tout intimidé par l’oukase. La marche du 12 février aura lieu en dépit de l’interdiction signifiée aux organisateurs lundi 07 février par la wilaya (préfecture) d’Alger. L’avocat Mostefa Bouchachi, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme, un des initiateurs de cette manifestation qui devra se tenir à Alger, a réaffirmé son intention de marcher dans la capitale. « Nous allons marcher samedi prochain et au pouvoir de prendre ses responsabilités », a-t-il déclaré. Pour ça part, le gouvernement continue de marteler que les marches sont interdites.
« On s’attendait à cette réponse, mais il n’est pas question de reculer, nous allons marcher samedi prochain et au pouvoir de prendre ses responsabilités, a averti Me Mostefa Bouchachi, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme, dans une déclaration à l’Associated Press.
Le gouvernement algérien, via la wilaya d’Alger, avait annoncé dans un communiqué officiel que cette manifestation était interdite. « En application des textes réglementaires en vigueur, un refus a été notifié aux auteurs de cette demande », indiquait le communiqué.
En revanche, les pouvoirs publics autorisaient un rassemblement dans une des nombreuses salles de la Capitale, notamment La Coupole d’Alger, sises prés du grand stade du 5 juillet. La manifestation peut être tenue dans « l’une des différentes salles de la capitale, y compris la coupole du complexe olympique Mohamed Boudiaf d’une capacité de 10.000 places », ajoutait le communiqué diffusé par l’agence de presse officielle APS.
La coordination nationale pour le changement démocratique (CNCD), née dans la foulée des émeutes du mois de janvier 2011 qui ont fait 5 morts et plusieurs blessés, est composée de syndicats autonomes, d’organisations de jeunes chômeurs, de partis politiques d’opposition et de personnalités de la société civile.
La coordination a appelé à une marche à Alger pour revendiquer « l’abolition de l’état d’urgence », instauré depuis le 09 février 1992, « l’ouverture des médias publics » et « le changement du système politique ».
Depuis l’annonce de cette manifestation, les autorités algériennes multiplient les mises en garde pour marteler le caractère interdit de cette marche. Les manifestations dans la capitale algérienne sont interdites depuis juin 2001, mais aucun texte de loi n’a été promulgué dans ce sens pour signifier cette interdiction.
Mercredi 02 février, Yazid Zerhouni, Vice-Premier ministre et ancien ministre de l’Intérieur entre décembre 1999 et mai 2010, avait rappelé cette interdiction. « Officiellement, a-t-il indiqué aux journalistes, la marche est interdite. Mais ceux qui appellent à cette marche doivent assumer leurs responsabilités quant à la casse et aux dérapages. Une expérience malheureuse a eu lieu le 14 juin 200. Et nous avons tiré les leçons du 14 juin 2001. »
Pour appuyer cette mesure, le gouvernement s’appuie sur l’état d’urgence en vigueur depuis 19 ans ainsi que sur la menace terroriste que pourrait induire la tenue d’une marche dans la capitale.
Le président Bouteflika avait rappelé jeudi 03 févier lors d’un Conseil des ministres que la capitale était toujours interdite aux manifestations, toutefois il a précisé que des marches pouvaient être organisées ailleurs sur le territoire national. Pour les autorités, l’interdiction des marches à Alger est justifiée par « des raisons d’ordre public ».
C’est que cette marche du 12 février revêt un enjeu crucial. Confronté à un vaste mouvement de mécontentement populaire, le gouvernement algérien tente de verrouiller les espaces d’expression pour tenter de desserrer l’étau autour du président Bouteflika, 73 ans, de plus en plus critiqué non seulement pour son mode de gouvernance, basé sur sa mainmise sur presque tous les leviers du pouvoir, mais aussi pour son incapacité à assumer convenablement les affaires du pays.
Ce verrouillage s’accompagne, au demeurant, de quelques effets d’annonce sensés ramener le calme et amadouer l’opinion publique. Pour ce faire, le président Bouteflika n’a pas hésité à annoncer la création de nouveaux postes d’emploi, la lutte contre la corruption, la construction de nouveaux logements ainsi que la stabilisation des prix de consommation.
Bref, rien de nouveau que ce qu’il avait déjà proposé lors de sa réélection à un troisième mandat en avril 2009.
Une éventuelle réussite de cette marche pourrait désormais mettre le président Bouteflika dans une très mauvaise posture.