Depuis l’annonce de nouvelles mesures par le gouvernement avec pour objectif de contenir le marché informel, les trabendistes ont paradoxalement occupé de plus belle l’espace public au grand dam des commerçants notamment mais aussi les automobilistes et les habitants des quartiers envahis de marchandises.
Les pouvoirs publics veulent en finir avec le marché informel. Un marché qui, par la force des choses, devient formel et légal. Dans ce cadre, les ministères du Commerce et de l’Intérieur et des Collectivités locales ont arrêté six mesures pour encadrer le commerce informel et trouver des espaces commerciaux aux jeunes vendeurs à la sauvette.
Autrement dit, les autorités locales devront recenser les vendeurs sur les trottoirs et placettes publiques aux fins de leur octroyer des locaux commerciaux et les régulariser administrativement. En attendant que ces promesses ne se traduisent dans les faits, sur le terrain, la réalité est tout autre.
Les vendeurs à la sauvette sont omniprésents. À Alger, pratiquement, aucun quartier n’y échappe. À titre illustratif, au marché des Trois Horloges de Bab El-Oued, tout y est étalé à même le sol.
Des produits cosmétiques sont proposés à des prix compétitifs. Des fruits et légumes, du matériel électroménager et des affaires scolaires sont également proposés à la vente. Ici, tout se vend et les jeunes y trouvent l’opportunité de faire écouler leurs marchandises sans trop de difficultés.
« Ce métier, je l’exerce depuis presque trois ans. Au vu de la loi, je suis convaincu que c’est là une activité illégale, mais, que voulez-vous que je fasse d’autre, que d’étaler ma marchandise sur un trottoir », regrette Mohamed. Je dois répondre à mes besoins financiers, chose qui est impossible sans travail. Notre interlocuteur, la cinquantaine, affirme, en outre, que si l’État lui facilite l’accès au travail, les données seront assurément différentes.
« Je défie les autorités concernées de me trouver un poste de travail fixe et digne et ce ne sont pas les dossiers qui manquent. Juste après les dernières mesures annoncées incitatives dans le cadre de la Caisse nationale d’assurance chômage (Cnac), je me suis présenté à l’agence Abane Ramdane.
Et jusque-là, aucune suite n’a été donnée à ma demande. En attendant, je suis là chaque matin au marché des Trois Horloges. Quoi qu’il en soit, je préfère revendre mes produits avec une maigre marge bénéficiaire que d’emprunter le chemin des agressions ou encore sombrer dans la vente de drogues », a-t-il ajouté.
D’autre part, cette situation n’est pas sans causer des désagréments aux commerçants, dont les magasins, selon eux, sont quasiment désertés par les clients. « Je comprends parfaitement leur besoin d’un revenu, mais cela ne pourrait en aucun cas justifier le fait de squatter un trottoir au nom du travail et, ainsi, nous mettre dans une situation embarrassante vis-à-vis des services des impôts », se lamente Mehdi, buraliste.
Et de préciser : Si cela perdure, moi également je me dis qu’il serait préférable de résilier mon registre de commerce et d’opter pour ce genre de commerce puisque l’activité émerge au su et au vu des autorités et que c’est tout le pays qui sombre dans l’informel.
Les commerçants ne sont pas les seuls à se plaindre. Les automobilistes disent être dans l’incapacité de traverser la ruelle jouxtant le marché car, à leurs dires, la circulation devient infernale sachant que les piétons qui n’ont pas le choix, se voient dans l’obligation d’empiéter sur la chaussée. Cette situation n’est pas spécifique à Bab El-Oued. Plus à l’Est, dans le quartier de Boumaâti (El Harrach), le constat est le même.
Là, si les revendeurs à la sauvette revendiquent une régularisation de l’activité, les commerçants (avec registre du commerce) estiment tout bonnement que l’État est quasiment absent et fait dans le bricolage afin de mettre un terme à une activité illégale.
Belfort, bastion du téléphone portable
Aborder le marché informel dans la Capitale, c’est aussi, évoquer le marché du téléphone portable qui a connu une croissance exponentielle ces dernières années. Belfort (El Harrach) demeure le marché par excellence de tout modèle des téléphones portables.
Tout y est et les prix, selon les connaisseurs sont très abordables. Mais là, le fait marquant est que cette activité concerne en premier lieu le produit nouveau qui est importé de toute part. Et ce n’est pas tout. Ces mêmes appareils se vendent sur des tables posées dans la plupart des cas face à des vitrines de magasins spécialisés. « Ce qui a été, à maintes reprises, la cause de rixes entre des vendeurs à la sauvette et les propriétaires de magasins », indiquet- on sur place.
Farid Houali