L’Algérie doit-elle assurer les besoins de la consommation d’énergie de sa population ou celle de ses besoins alimentaires…?
«Nous n’avons d’autre alternative que de mobiliser toutes les sources d’énergie…», a déclaré, le 27 janvier, le ministre de l’Energie, Youcef Yousfi, face aux membres du Conseil de la nation.
La déclaration est apparemment passée comme une lettre à la poste. Les élus de la République n’ont rien eu à redire. La nouvelle est pourtant grave.
Le pétrole et le gaz ne suffisent plus… à assurer la demande nationale d’énergie et permettre en même temps de régler l’astronomique addition de la facture globale des importations qui depuis trois années consécutives dépasse les 45 milliards de dollars dont quelque 9 milliards de dollars sont consacrés à l’alimentation de base des Algériens (céréales, lait, légumes secs…).
La facture des importations alimentaires, à elle seule, avoisine les 20% de l’enveloppe globale des importations. L’Algérie paie cher pour répondre aux besoins alimentaires de sa population (voir L’Expression du 22 janvier 2013).
Les exportations d’hydrocarbures n’ont plus vraisemblablement les «épaules assez larges» pour assurer les besoins des consommateurs malgré le prix du baril de brut qui se maintient au-dessus des 110 dollars.
L’Algérie est-elle devant un choix cornélien? Doit-elle assurer les besoins de la consommation d’énergie de sa population ou celle de ses besoins alimentaires…? Faire face à ces deux impératifs est devenu insupportable pour l’économie nationale dont 98% des recettes en devises reposent sur les exportations de pétrole et de gaz. La question est difficile à trancher.
L’Algérie doit recourir davantage à la prospection d’autres ressources pour tenter de la régler.
Le choix est porté sur l’énergie nucléaire, solaire et éolienne. «Nous n’avons d’autre alternative que de mobiliser toutes les sources d’énergie, car les hydrocarbures devront couvrir 90% de la demande énergétique de l’Algérie à l’avenir», a déclaré le 27 janvier, le ministre de l’Energie, Youcef Yousfi, face aux membres du Conseil de la nation. «Nos besoins en énergie augmentent constamment, en parallèle, les revenus nécessaires à notre économie s’accroissent», a reconnu le ministre. Que faire? Une telle conjoncture exige l’intensification des efforts d’exploration dans les régions sous-exploitées (nord du pays, en offshore et dans le sud-ouest) suggère-t-il. De fil en aiguille, la lumière est faite sur la fragilité de l’économie nationale. Elle remet sur le tapis la problématique de l’épuisement des gisements d’hydrocarbures.
«Nous sommes dans le même niveau de production que celui réalisé l’année dernière, mais avec une petite diminution de la production de nos partenaires en association qui est justifiée par certains gisements qui sont en déclin», avait affirmé le 23 décembre 2012, le P-DG de Sonatrach, Abdelhamid Zerguine, aux journalistes en marge de sa visite d’inspection du site de la future raffinerie de Tiaret (voir L’Expression du 26 décembre).
Paradoxalement, ces «révélations» du ministre de l’Energie interviennent au moment où le débat sur la dépendance par rapport aux hydrocarbures bat son plein et que des ministres sillonnent le territoire national pour annoncer des mesures pour l’en affranchir.
Le ministre de l’Agriculture, Rachid Benaïssa, des Ressources en eau, Hocine Necib étaient à Ghardaïa… Le ministre de l’Industrie, de la PME, Chérif Rahmani, à Oran… Les propos de Youcef Yousfi anticipent-ils l’échec de telles initiatives? Le ministre de l’Energie ne s’est pas prononcé sur ce sujet.
La mise en oeuvre d’une économie productrice de richesses qui est la bête noire des gouvernements successifs depuis l’accession de l’Algérie à son indépendance est devenue pourtant incontournable.
Le Fonds monétaire international avait conseillé aux pays exportateurs de pétrole, dont l’Algérie, de tirer profit des niveaux élevés de pétrole pour promouvoir d’autres secteurs d’activités.
«La priorité est de tirer profit de la hausse actuelle des prix du pétrole pour diversifier leur économie», a recommandé l’institution de Bretton Woods aux pays exportateurs de pétrole de la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord) dans son rapport sur les perspectives économiques mondiales publié à l’occasion de la tenue de son assemblée annuelle qui s’est tenue du 9 au 12 octobre 2012 à Tokyo, au Japon.
La lecture du discours du ministre de l’Energie n’indique pas qu’ils en prennent le chemin….