le petit zoo de tifrit, comment devenir grand ?

le petit zoo de tifrit, comment devenir grand ?

arton36872.jpgSid-Ali Kouiret n’a sûrement pas oublié la plaisanterie dont il a fait l’objet quand il est allé visiter son ami à Bejaïa, plus précisément au village Tifrit, à Akbou.

Keffous Hocine, à la silhouette longiligne, s’en est rappelé presque avec délectation, tant sa barbe fournie et grisonnante n’a pu cacher le sourire qui a éclairé son visage émacié.

Il faut préciser d’abord que Keffous Hocine est propriétaire d’un petit zoo. « Oui, gloussa-t-il, je l’ai enfermé dans la cage du lion et je lui ai lancé “Ali, moute waqef !” ». Cette célèbre réplique, pour simple rappel, lancée au personnage qu’il a campé dans le film « L’opium et le bâton », colle comme une seconde peau à Sid-Ali Kouiret, qui ne s’attendait pas à vivre une situation aussi singulière. Il faut imaginer la tête de l’acteur, devenu blême à la vue du félin, sans échappatoire possible.

« On n’est pas au cinémaaa ! », hurla-t-il, horrifié, à son ami. Mais ce n’était qu’une farce, un peu osée, mais une blague quand même. Le brave lion d’Afrique, couché sur sa litière, n’a pas bougé une griffe. Mais peut-être que, pour lui, Sid-Ali Kouiret n’était pas vraiment appétissant ! « J’ai commencé en 1987, chez moi, à la maison. Puis en 1994, quand j’ai acquis ce lion, j’ai déplacé ma ménagerie à l’endroit actuel », nous apprend Keffous Hocine.

Outre le félin, le zoo accueille une variété d’animaux, tels que l’hyène, le sanglier, le renard, le chacal, le vautour, l’aigle royal, l’autruche, le hibou, paon, et autre volailles, porc-épic, singe-magot, caprins, abrités dans des cages que lui-même avait confectionné, aidé en cela par son métier de ferronnier.

Avant il n’y avait qu’une piste, ce qui rebutait un peu les visiteurs, mais aujourd’hui qu’il y a une route bitumée, la fréquentation est plus conséquente (le prix d’entrée est d’ailleurs modique, 50 DA pour un adulte et 20 DA pour un enfant), de sorte que les frais d’entretien des animaux est plus aisée. Il faut dire que le zoo a passé des heures difficiles, car toutes les dépenses étaient prises à partir du budget familial.

N’étaient la passion et l’aide précieuse des associations qui montaient des activités au bénéfice de cette structure, des chasseurs qui contribuent avec du gibier par exemple, et du vétérinaire local, Boumezirene Amar, dont notre interlocuteur a tenu à souligner la disponibilité, et en tout bénévolat, pour soigner et maintenir en bonne santé les animaux, le sort en aurait peut-être été tout autre.

Deux de ses enfants, à qui il a communiqué sa passion des animaux, s’occupent également de faire fonctionner le parc. Les autorités, quant à elles, n’ont pas été emballées par l’idée d’un zoo sur le territoire de Bejaïa et n’ont fourni aucune assistance à son promoteur.

Le football ou la politique accaparent trop. Toutefois, l’intérêt de l’APC s’est éveillé cette année puisqu’elle va financer une petite opération de pose de nouveaux enclos. Le parc zoologique de Ben Aknoun (Alger) a également promis de lui fournir des animaux, tout en conservant la propriété, en fonction de la disponibilité.

Par contre, aucun grand entrepreneur de la région n’a estimé digne d’intérêt de contribuer, par le sponsoring par exemple, au développement de cette activité. « Leurs enfants fréquentent le zoo », dit Keffous Hocine qui reconnaît, par contre, qu’il ne les a pas trop démarchés, révélant qu’il était le genre de gars que l’amour-propre empêche autant de quémander une aide que d’importuner son monde.

Ce petit parc animalier, d’un hectare environ, commence à avoir une certaine notoriété, car des visiteurs viennent de Bejaïa bien sûr, mais aussi des wilayas environnantes comme Tizi Ouzou, Bouira, M’sila ou Bordj Bou Arréridj où aucun zoo n’existe. Et ce zoo peut constituer une véritable attraction touristique dont Akbou pourrait s’enorgueillir. D’autant que, jamais découragé, Keffous Hocine, qui dispose d’un terrain de 3 ha, compte bien avoir l’opportunité de l’agrandir. Avis aux amateurs.

O. M