A lui seul, ce temple représente près de 50 années d’histoire et de diplomatie de l’Algérie indépendante.
Le président de la République procédera demain lundi, à la pose de la première pierre du nouveau Centre international des conférences mettant ainsi une croix définitive sur le Palais des Nations du Club des Pins. Une question se posera avant même sa fermeture: faut-il faire un musée de ce temple qui représente près de 50 années d’histoire et de diplomatie de l’Algérie indépendante?
Construit au début des années 1960, le Palais des Nations devait abriter et consacrer un événement de taille de l’Algérie naissante. Il s’agissait du Sommet afro-asiatique à la fin du mois de juin 1965, lequel sommet devait être suivi par le Festival mondial de la jeunesse. A cette époque, un bras de fer était déjà engagé entre l’ex-président Ahmed Ben Bella, et le chef d’état-major de l’ANP, un certain colonel Houari Boumediene. Le président Ben Bella tenait énormément à ces deux événements pour asseoir son autorité sur le plan national mais surtout international. Houari Boumediene a dégainé plus vite. Le coup d’Etat du 19 juin 1965 a eu raison des plans de Ben Bella et les deux événements sur lesquels il comptait, n’auront jamais lieu. C’est par ce travers, cette malédiction que commence la longue histoire du Palais des Nations. A lui seul, il concentre la gloire de la diplomatie algérienne de la fin des années 1960 et du début des années 1970. C’est au Palais des Nations que s’est déroulée la Conférence des non-alignés qui avait placé l’Algérie au-devant de la scène internationale, c’est dans ce même palais que se sont déroulés de nombreux sommets arabes, sommets de l’OUA et la fameuse réunion de réconciliation entre le Shah d’Iran et Saddam Hussein en 1975. Les photos de Houari Boumediene réconciliant les deux voisins ennemis sont encore jalousement gardées par des adeptes de Boumediene. En septembre 1980, le président Saddam Hussein annula ces Accords d’Alger et repartit en guerre contre l’Iran jusqu’à 1988. Que dire encore des rencontres organisées en l’honneur des chefs des mouvements de libération en Asie, en Amérique latine, au Cambodge et en Afrique. C’était l’époque où l’Algérie s’appelait la Mecque des révolutionnaires. Il y a eu la rencontre avec le Chilien Allende dont une place sur les hauteurs d’Alger à Hydra porte toujours le nom. C’est dans ce temple qui a été lue la Déclaration, pour la première fois, de l’Etat de Palestine en 1988. C’est là que se déroulaient également tous les congrès de l’OLP, les rencontres des partis palestiniens comme le Fatah, le Fdlp et le Fplp. Alger offrait le gîte et le couvert à tous les combattants de la liberté en lutte contre le colonialisme et l’impérialisme. Les révolutionnaires défilaient sans crainte. Alger avait bien reçu les fameux Black Panters, un mouvement paramilitaire américain. A la fin de la guerre israélo- arabe de 1967, l’Algérie avait rompu ses relations avec les Etats-Unis d’Amérique. A l’époque, le bloc soviétique était assez puissant pour garder en respect les Américains avec lesquels il était facile de rompre les relations diplomatiques et se permettre même le luxe d’accueillir des mouvements paramilitaires de ce pays. Autres temps, autres moeurs. Plus encore, l’Algérie avait même accueilli les responsables du mouvement de libération des îles Canaries dont l’un a été agressé à Alger. C’était également au Palais des Nations qu’a eu lieu la réunion ayant abouti à la constitution du Front du refus. Ce front était constitué par l’Algérie de Boumediene, la Syrie de Hafez Al Assad, la Libye d’El Gueddafi et du Sud-Yémen de Mohammed Ali Nacer. C’est à partir de cette tribune également que le président Houari Boumediene, par une belle journée printanière, annonçait fièrement la nationalisation des hydrocarbures. La nouvelle a eu l’effet d’une bombe dans le monde occidental.
Pour la génération d’Algériens qui ont vécu pleinement cette époque, rien qu’à voir certaines images défiler sur les écrans de télévision, ils cèdent à l’émotion et aux frissons que procure la nostalgie d’une certaine époque. Plus récemment, ce sont des partis politiques qui y sont nés comme le RCD, et c’est surtout la rencontre des 60 partis avec Sid Ahmed Ghozali pour la conférence nationale. Quant aux coulisses de ce temple, que de coups fourrés, de complots, de combines et manigances a abrités ce palais! Toute une histoire!