Que reste-t-il de l’islamisme politique?
Le MSP est perpétuellement secoué par des crises organiques, débouchant sur la création d’autres partis politiques.
A travers le MSP, c’est toute la décadence de la pratique politique en Algérie qui se décline. Sans état d’âme, il balance d’une alliance (présidentielle) à l’autre (islamiste). Le jour, il défend un projet politique de société, la nuit il en défend un autre.
Dans son fonctionnement organique et ses prises de position politiques, il est perpétuellement secoué par des crises organiques, débouchant la plupart du temps sur la création d’autres partis politiques. Durant ces deux dernières années, le MSP est l’exemple type de la désagrégation et du délitement de la pratique politique dans une scène polluée et parasitée.
D’une alliance à l’autre Son acte de passer d’une alliance à l’autre défie toute logique. Il fait preuve d’un opportunisme indéniable. Un petit rappel du contexte. Les islamistes du MSP ont été intégrés dans le gouvernement au lendemain des élections présidentielles de 1995 remportées par Liamine Zeroual dans le double objectif de neutraliser les islamistes politiques et d’affaiblir les radicaux militairement.
En 2004, avec le FLN et le RND, le MSP fera partie de l’Alliance présidentielle. Depuis, il a cautionné toutes les dérives du système, et les départements gérés par ses ministres sont régulièrement éclaboussés par des scandales financiers.
En 2011, toute la région de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient est secouée par des révolutions populaires dans l’objectif de déchoir les dictateurs. La Tunisie, l’Egypte, la Libye, le Yémen, la Syrie, l’effet domino a bien fonctionné. L’Algérie et le Maroc ont échappé de peu à ce tourbillon. Dans la foulée de ces révolutions, les islamistes ont réussi des percées historiques dans les pays de Tamazgha (Afrique du Nord) à l’occasion des élections législatives.
Obnubilé par ces victoires et galvanisé, le MSP rêvait déjà à une contagion. Le pouvoir serait à portée de main, surtout que l’Algérie s’apprêtait à organiser ses législatives.
En opportuniste incontesté, le MPS signe le divorce d’avec l’Alliance présidentielle le premier jour de 2012. De bon augure?
Le président du parti, Bouguerra Soltani, a expliqué alors cette démarche arguant que «l’année 2012 sera celle de la compétition et non des alliances».
Mais dans sa tête, la boussole tourne. Et moins de deux mois plus tard, le 25 février 2012 plus précisément, il déroge à sa parole et contracte une autre alliance avec deux autres partis islamistes,
En Nahdha et El Islah, dénommée l’Alliance de l’Algérie Verte (AAV).
Obsession du pouvoir, quand tu nous tiens!
Cela porte bien évidemment un nom: en politique ça s’appelle l’opportunisme, en religion, l’hypocrisie.
Les élections législatives du 10 mai approchent et le trio islamiste se voit déjà majoritaire à l’APN.
Sauf que le 10 mai en a décidé autrement. Le MSP, qui voulait se refaire une virginité, a hypothéqué le très peu de crédibilité qui lui restait.
En essayant de piéger ses anciens alliés et de contourner les voies loyales de prise de pouvoir en Algérie, le MPS est tombé dans son propre piège.
Passer d’une manière aussi brutale d’une alliance à l’autre suppose prendre des risques inconsidérés. L’alliance des islamistes est laminée. Les trois partis ont crié à une fraude généralisée qui les a privés de ce qui leur revient de droit. Le FLN, a réalisé un score astronomique et irréel, Or, aussi paradoxal que ça, le peuple n’a fêté ni la victoire des uns, ni pleuré la défaite des autres, ni dénoncé le détournement de ses voix. Ce qui prouve, si besoin est, que le peuple a boycotté massivement les élections législatives.
Ainsi, le MPS a décidé, avec ses deux compères, de ne pas figurer dans le futur gouvernement et de boycotter les instances de l’APN. Et bonjour les dégâts.
D’une crise à l’autre
L’issue des élections législatives a sonné le début d’une crise au MSP dont les décisions ne sont pas toutes du goût des cadres du parti. L’ex-ministre des Travaux publics, actuel député élu sur la liste de l’AAV Alger, Amar Ghoul a fini, après moult tergiversations, par annoncer sa démission du parti et des intentions de créer sa propre formation lui sont prêtées.
La défection de Amar Ghoul a affolé Bouguerra Soltani. Toutefois, la démarche de l’ex-ministre était dans l’air depuis l’installation de la nouvelle APN, le 26 mai dernier.
M.Ghoul n’avait pas jugé utile d’adopter la même attitude que les députés de l’AAV qui ont brandi des pancartes dénonçant la fraude électorale.
A l’annonce du MSP de ne pas faire partie du futur Exécutif, Amar Ghoul a répondu par une déclaration de divorce: «Je suis au service de l’Algérie.»
Le départ de Ghoul du MSP, suivi déjà par six membres du Bureau national du parti, risque de provoquer une hémorragie au sein de la formation.
Cependant, la crise actuelle n’est pas la seule que le MSP traverse sous Bouguerra Soltani. Il y a deux ans, une crise plus ravageuse est passée par là. La fronde conduite par Abdelmadjid Menasra a vidé le parti de plusieurs de ses cadres. La crise a été sanctionnée par le divorce et la création d’un nouveau parti par Menasra, le Front du changement (FC). Ironie du sort, les partis de l’AAV veulent que le FC rejoigne leurs rangs. Ils veulent aussi gagner à leur cause le Front de la justice et du développement (FJD) de Abdellah Djaballah, fondateur des mouvements En Nahda et El Islah.
Précision
Dans notre article paru dans
l’édition d’hier intitulé Six membres du bureau national suivent Ghoul, une erreur a été commise sur l’identité des personnes concernées. Dans l’article, il est fait mention de Hachemi Djaâboub, Abdelkrim Mechaï, Djafer Chelbi, Brahim Bedar et Farouk Tifour qui sont les nouveaux membres du bureau national et non ceux qui ont rejoint Ghoul