La région fait figure de nouveau relais de croissance pour les groupes pharmaceutiques. En particulier ceux impliqués dans le diabète, qui s’est propagé très rapidement dans certains pays.
Le Moyen-Orient est-il en passe de devenir le nouvel eldorado des groupes pharmaceutiques ? Avec le ralentissement de la croissance dans les grands pays émergents comme la Chine, la Russie ou le Brésil, les régions du Moyen-Orient et du Maghreb apparaissent comme de sérieux relais pour les laboratoires pharmaceutiques. Les marchés y sont certes de moindre taille, mais des pays comme l’Egypte, l’Arabie Saoudite, l’Algérie, la Turquie ou l’Iran comptent malgré tout 80 à 100 millions d’habitants, avec une population qui vieillit du fait de la transition démographique.
Développer une couverture sociale
« Dans beaucoup de ces pays, il y a la volonté politique de développer une couverture sociale », explique Pierre Savart, directeur des opérations internationales du LEEM – le syndicat professionnel qui regroupe en France les laboratoires. C’est déjà chose faite dans certains pays comme la Turquie ou l’Arabie saoudite pour leurs ressortissants. En Iran et au Liban, les médicaments sont aussi partiellement remboursés.
« Il existe une classe moyenne qui aspire à une meilleure qualité de vie est qui est prête à mettre la main à la poche pour accéder aux médicaments fabriqués par les laboratoires étrangers », explique Bernard Parrin, directeur de la région Moyen-Orient chez Servier. Selon BMI Research, ce marché privé est par exemple estimé à 7,5 milliards de dollars pour l’Arabie Saoudite, 4,6 milliards pour les autres pays du Golfe ou 3,25 milliards pour l’Egypte.
« Epidémie » de diabète
Cet intérêt pour le Moyen-Orient est particulièrement marqué dans les laboratoires qui travaillent dans le domaine du diabète. En l’espace d’une génération, les modes de vie ont été transformés et le diabète prend, dans cette région, des allures d’épidémie. C’est particulièrement vrai dans les pays du Golfe – 19 % de la population des Emirats Arabes Unis est touchée – avec l’urbanisation et la sédentarisation des populations, mais l’Egypte, elle aussi, paie un lourd tribut. « Aujourd’hui, 70 % des Egyptiens marchent moins de 10 minutes par jour et on estime à 14 millions le nombre de diabétiques », explique Stéphane Mascarau, qui dirige la filiale égyptienne de Servier. Pas étonnant dans ces conditions que les grands – et moins grands – du diabète soient tous présent sur place.
Plusieurs freins
Des programmes d’éducation, de prévention et de diagnostic ont été mis en place par Novo Nordisk mais aussi par des groupes qui s’intéressent au diabète en dehors de l’insuline, comme Bayer ou l’allemand Merck KGaA. Ce dernier est associé depuis 2012 à Neopharm, un laboratoire des Emirats arabes unis, pour produire son traitement Glucophage, pour les patients qui n’en sont pas encore au stade où ils ont besoin d’insuline. De même, Servier fabrique en Egypte son Diamicron, destiné lui aussi aux diabétiques légers.
Principaux freins au développement dans ces pays ? Selon Pierre Savart, « l’hétérogénéité dans la qualité du système de soins, en dépit d’un personnel médical bien formé comme en Iran ou en Egypte, mais aussi la lenteur et l’imprévisibilité des procédures d’homologation des médicaments, ainsi que l’instabilité politique ». Pendant la révolution égyptienne, Sanofi a ainsi dû suspendre l’activité de son usine et celle de Servier tournait au ralenti, sans compter qu’au Yémen, ainsi que dans des pans entiers de Syrie ou d’Irak, plus aucune activité n’est possible. Mais l’Iran, du fait de l’abandon des sanctions internationales, apparaît comme une nouvelle terre de conquête avec un marché privé évalué à 2,4 milliards de dollars.