En prolongeant son moratoire jusqu’à janvier 2012, Rachid Benaïssa, qui avait donné comme dernier délai fin septembre 2011 aux laiteries privées pour se conformer au nouveau dispositif de fonctionnement de la filière, fait marche arrière. Bon nombre d’observateurs affirment que le ministre de l’Agriculture a pris conscience des limites d’un dispositif, pourtant annoncé en grande pompe.
Janvier 2011. Le nouveau dispositif de l’Office national interprofessionnel du lait (Onil), fixant les conditions et les modalités de distribution de la poudre de lait subventionnée par l’Etat entre en vigueur. Rachid Benaïssa fixe un moratoire de neuf mois aux laiteries privées pour se conformer au nouveau cahier des charges. Alors que le délai a expiré fin septembre dernier, une dizaine de transformateurs n’ont pas encore adhéré et les points forts du nouveau dispositif demeurent non respectés. L’objectif initial de cette nouvelle démarche est la réduction de l’importation de la poudre de lait à travers l’encouragement de la production nationale du lait cru.
Le département de Benaïssa a ainsi exigé des laiteries privées qui s’approvisionnent en poudre de lait auprès de l’ONIL d’introduire du lait cru dans la production de lait pasteurisé en sachet (LPS). Certains transformateurs, même si c’était à contrecœur, ont tout de suite adhéré. Pour les autres, le ministre a donné un moratoire pour la signature du nouveau cahier des charges.Le 11 septembre dernier, Rachid Benaïssa a réuni le Comité interprofessionnel du lait (CIL) pour faire le bilan semestriel de la filière. A la grande surprise, le ministre, qui s’est dès le départ montré ferme et menaçant, prolongea le moratoire pour ceux qui n’ont pas encore signé le fameux cahier des charges. Mais ce n’est finalement pas le seul point fort du nouveau dispositif qui demeure non respecté. Le principe de distribution du lait pasteurisé en sachet et de la collecte du lait cru par zone n’ont point été appliqués, encore moins exigés. «Il est impossible d’imposer à chaque laiterie d’écouler uniquement sa production dans sa région.
Encore moins collecter du lait cru chez les éleveurs limitrophes. Pour cela, il faut une étude et une évaluation globale de la filière. Il faut d’abord définir la demande de chaque région en matière de consommation de lait et la capacité de production de chaque transformateur. Idem pour la collecte du lait cru, car les éleveurs le cèdent au plus offrant, parfois pour une marge de 1 DA», explique Mohamed Seffari, président de la commission régionale de Constantine du CIL, chargée de la collecte, de la qualité et la transformation. De son côté, le vice-président du pôle laitier d’Alger du (CIL), Mourad Bouzekrini, qui d’abord trouve injuste que la poudre distribuée par l’ONIL soit cédée à parts égales, 50 % pour les 15 unités publiques et 50% pour les 119 transformateurs privés. D’autant plus, ajoute-t-il, que «certaines laiteries privées, qui reçoivent des quantités importantes de poudre de lait, plus de 300 tonnes par mois, les utilisent pour d’autres produits dérivés». Concernant la distribution du lait en sachet pasteurisé et la collecte du lait cru par zone, ce dernier affirme aussi qu’il s’agit d’un principe qui relève de l’impossible. Enfin, le ministère de l’Agriculture, qui avait annoncé, en grande pompe, en décembre 2010, le nouveau dispositif organisant la filière, s’est-il aperçu au bout du compte de la difficulté à appliquer sur le terrain de telles dispositions ? Surtout que l’importation de la poudre de lait a augmenté depuis. Le moratoire prolongé par Rachid Benaïssa ainsi que la mise à l’écart du principe de «zoning» sont peut-être la réponse.
M. M.