Le monde reste spectateur passif,Génocide en Libye

Le monde reste spectateur passif,Génocide en Libye
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Lors d’un discours-fleuve prononcé hier, Kaddafi est resté égal à lui-même, menaçant et cultivant le culte de la personnalité. Il a joué sur la fibre patriotique des Libyens en mettant en exergue les actions accomplies sous son règne et, comme son fils l’avant-veille, il a brandi le spectre de la guerre civile, en revenant sans cesse sur la peine encourue par ses adversaires et par les révoltés contestant son pouvoir, la condamnation à mort. Kaddafi aura ainsi prouvé que, plus que jamais, il transcende les pressions, celles de son peuple et celles internationales, pour mieux s’accrocher au pouvoir.

Ainsi, des médias rapportent que la nuit de lundi dernier a été le théâtre d’une guerre contre des citoyens sans armes. Des avions ont bombardé plusieurs villes, notamment Messrata et Benghazi qui a enregistré 160 morts. A ce propos, l’ambassadeur de Libye en Inde, qui a démissionné pour protester contre la répression sanglante des manifestations, a rapporté hier que «l’armée de l’air avait bombardé la population à Tripoli» avant de lancer un appel aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. «Il est temps maintenant d’être juste et honnête afin de protéger le peuple libyen».

Au total, on parle déjà de 300 à 400 morts, selon Patrick Baudoin, président d’honneur de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), qui a dit tenir cette information de la Ligue libyenne des droits de l’homme. C’est la guerre. Des tribus menacent de s’en prendre à la production pétrolière.

Donc , les menaces de Seif Al Islam sont passées à la pratique alors que le monde entier reste distant et observe ce spectacle du sang. Et ce n’est qu’après la montée des prix du pétrole que certains commencent à réagir. Ainsi, l’ONU s’est réunie sur la Libye à la demande de l’ambassadeur adjoint de la Libye à l’ONU.

Lundi, le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a exigé lors d’une conversation téléphonique avec Kaddafi que «les violences contre les manifestants devaient cesser immédiatement».

Après un discours menaçant tenu par son fils dimanche soir, c’est le père Kaddafi qui est apparu brièvement à la télévision libyenne pour réagir aux rumeurs qui faisaient état de son départ pour le Venezuela.

Le colonel Kaddafi s’est montré quelques secondes à la télévision libyenne, pour dire:

«Je veux prouver que je suis à Tripoli et non au Venezuela» en qualifiant de «chiens» les médias qui ont rapporté sa fuite pour le Venezuela. Ajoutant qu’«il voulait parler aux jeunes de la Place Verte, et même veiller avec eux, mais qu’il en avait été empêché par la pluie».

Des chaînes de télévision avaient relayé la déclaration de William Hague, le ministre britannique des Affaires étrangères, qui avait affirmé dans l’après-midi de lundi que «Kaddafi était en route pour Caracas».

Des activants des droits de l’homme ont déclaré à la chaîne Al Jazeera que «cette apparition de Kaddafi n’est qu’une mascarade et que ce dernier s’apprête à quitter la Libye».

Hémorragie dans le corps diplomatique

Comme réaction internationale, personne ne lève le petit doigt pour arrêter la tuerie à huis clos en Libye. Mais avec la montée du prix du panier-Opep qui a franchi la barre des 100 dollars pour la première fois depuis 2008, certains pays et organisations mondiales commencent à réagir tout en restant au stade de la dénonciation alors que les arabes cultivent encore une fois le silence même si la ligue arabe tient une réunion extraordinaire au niveau des ambassadeurs. Toutefois, le Qatar avait appelé à l’arrêt des massacres et le président syrien a appelé hier à «mieux comprendre la volonté des peuples» suite à une réunion avec les américains tenue à Damas.

Par ailleurs, l’hémorragie continue dans le corps diplomatique de la Libye. Puisque l’ancien ambassadeur de Libye en Inde, Ali Essaoui, a indiqué que

«les ambassadeurs de Libye en Chine, en Pologne, en Tunisie, à la Ligue arabe et aux Etats-Unis avaient quitté leur poste et dit s’attendre à d’autres démissions de diplomates si la répression se poursuivait».

De son côté, l’ancien ambassadeur de Libye en Inde a affirmé hier que «les militaires ne supportent pas de voir des étrangers tuer des Libyens. Ils se sont ralliés au peuple».

Panique aux frontières

Les pays ayant des frontières avec la Libye sont alerte maximum. Du côté de l’Egypte,

«l’armée égyptienne va renforcer ses effectifs à la frontière avec la Libye et ouvrir le passage de Salloum pour permettre l’accueil en Egypte de personnes malades ou blessées». Et les Tunisiens ont installé des refuges d’aides médicales. Selon l’Egypte, les pistes de l’aéroport de Benghazi ont été détruites. A ce propos, le ministre égyptien des Affaires étrangères Ahmed Aboul Gheit lors d’une conférence de presse a déclaré :

«Aucun avion ne peut atterrir à l’aéroport de Benghazi, dont les pistes ont été détruites dans les violences qui secouent la Libye. Il n’est pas possible pour les vols d’Egypte air ou tout autre avion d’atterrir sur cet aéroport».

L’Algérie a exprimé sa préoccupation face aux événements en Libye. Le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, a exprimé son souhait dans un entretien accordé à la chaîne TV France 24 que les «mouvements de protestation en Libye soient entendus et que s’instaure un dialogue entre les frères libyens pour qu’ils puissent transcender cette période difficile».

En Turquie, selon l’AFP, le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré hier que «le régime de Kaddafi ne devait pas commettre ‘’l’erreur’’ d’ignorer les demandes de son peuple pour plus de démocratie».

De son côté, Navi Pillay, Haute commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, s’est prononcée hier également pour l’ouverture d’une enquête internationale sur la répression des manifestations en Libye. Et la Chine s’est dit «préoccupée par la situation en Libye» et espère voir le pays «restaurer la stabilité sociale et la normalité», selon le ministère chinois des Affaires étrangères. Pékin demande à Tripoli d’«enquêter sur les incidents ayant visé des entreprises ou des ressortissants chinois dans le pays».

Pour Washington, les USA «ne peuvent en aucun cas interférer dans les affaires de la Libye d’autant plus qu’ils n’ont aucune autorité sur Kaddafi», selon une correspondant d’El Jazeera. Et le président de la République italienne, Giorgio Napolitano, a appelé à la «cessation immédiate des violences en Libye».

Une fatwa pour tuer Kaddafi

Réagissant lundi soir sur Al Jazeera à la situation en Libye, CheikhYoussef Al Karadaoui, président de l’Union internationale des oulémas musulmans, a décrété une fatwa «autorisant à assassiner le président libyen». Il a appelé «les militaires libyens à tuer Mouamar Kaddafi». «Je lance une fatwa. Que celui qui peut tuer Kadhafi le fasse». Il a également appelé les militaires libyens à «désobéir aux ordres de tuer des civils». Et l’Organisation de la conférence islamique a exhorté hier les autorités libyennes à «entamer un dialogue sérieux» avec les protestataires.

Par Nacera Chenafi