Le monde arabe en ébullition,Le Premier ministre tunisien jette l’éponge

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Alors qu’en Libye la contestation au régime de Kaddafi s’étend désormais de Benghazi à la capitale Tripoli, les Tunisiens et les Egyptiens continuent de battre le pavé pour défendre «leurs révolutions». Au Yémen, à Oman mais également en Irak, les manifestations ne faiblissent pas.

Le premier ministre tunisien par intérim Mohamed Ghannouchi a annoncé hier sa démission à la télévision nationale, suite aux manifestations à Tunis qui réclamaient depuis plusieurs jours son départ. L’opposition lui reprochait d’être trop proche de l’ancien président Ben Ali, renversé le 14 janvier dernier. Les manifestants l’accusent aussi de ne pas met-tre en œuvre des réformes.

De nouvelles violences ont éclaté hier en début d’après-midi dans le centre de Tunis, où des jeunes se livraient à des saccages en règle au lendemain d’affrontements ayant fait trois morts, a rapporté l’agence France Presse. La police a riposté en tirant en l’air et en lançant des grenades lacrymogènes. Scandant des slogans hostiles au gouvernement de transition, les protestataires, rassemblés en petits groupes sur l’avenue Bourguiba, épicentre des émeutes, tentaient d’avancer en direction du ministère de l’intérieur et d’une rue adjacente où était positionné un blindé de la police. Le calme était pourtant revenu hier matin, après que le ministère de l’intérieur ait annoncé l’arrestation de plus de 100 personnes, qui s’ajoutent aux 88 autres auteurs d’actes de vandalisme interpellés vendredi lors des premiers affrontements. Le ministère avait attribué ces actes de violence contre la police «à un groupe d’agitateurs infiltrés dans les rangs des manifestants pacifistes et qui se sont servis de jeunes lycéens comme boucliers humains pour se livrer à des actes de violence, d’incendies visant à semer la terreur parmi les citoyens et visant les forces de sécurité intérieures». Les manifestants et forces de l’ordre se sont livrés une véritable bataille rangée samedi. Des policiers ont tiré de nombreuses grenades lacrymogènes et effectué des tirs de sommation, tandis que les manifestants les bombardaient de pierres. Des dizaines de rafales d’armes automatiques, des tirs incessants de gaz lacrymogènes, des tirs de sommation, des sirènes de voitures de police et d’ambulances, des hurlements de policiers et de manifestants ont résonné pendant plus de quatre heures.

Oman : 3 morts lors d’une journée meurtrière

Au lendemain d’un remaniement gouvernemental opéré par le sultan Kabous ben Saïd, Oman est le théâtre de manifestations, pour la deuxième journée consécutive. Au moins deux manifestants ont été tués à Sohar, lors d’affrontements avec la police. Des policiers ont tiré des bombes lacrymogènes et des balles en caoutchouc contre des manifestants qui tentaient d’attaquer un poste de police à Sohar, à 200 km au nord de la capitale d’Oman, Mascate, a rapporté l’AFP. Les manifestants, quelque 250 chômeurs demandant des emplois, ont tenté d’attaquer le poste de police de la ville côtière avant d’être dispersés par les policiers. Deux manifestants ont été tués. Ils se sont repliés sur un rond-point proche, rebaptisé «rond-point de la réforme». La police a tenté de les disperser à nouveau avant de quitter les lieux. L’armée a été déployée dans cette cité industrielle pour sécuriser la zone. Il s’agit de la première manifestation violente dans le sultanat d’Oman qui a connu ces dernières semaines des marches à caractère social.

Bahreïn remanie son gouvernement

A Bahreïn, le roi Hamad ben Issa Al-Khalifa a procédé samedi à un remaniement ministériel et changé les attributions de cinq de ses ministres tout en les gardant au gouvernement. Le groupe chiite au parlement bahreïni a confirmé sa démission en bloc, hier, suite à cette annonce. Il juge insuffisant le remaniement. Les 18 députés du parti Wefaq avaient déjà annoncé leur démission après les violences qui ont marqué les premiers jours des manifestations populaires à Manama, exigeant la fin du régime monarchique des Al-Khalifa.

L’opposition a plus globalement déploré l’absence de dialogue avec le gouvernement en dépit des promesses du pouvoir. Le roi Hamad ben Issa Al-Khalifa a désigné son fils, le prince Salman Ben Hamad Al-Khalifa, pour conduire le dialogue avec toutes les composantes de l’opposition, qui conteste la monarchie sunnite dans cet archipel à la position stratégique et allié clef des Etats-Unis dans le Golfe. Mais selon un élu de l’opposition, ces consultations n’ont pas encore commencé. De retour de son exil londonien, Hassan Machaimaa, leader d’un groupe de l’opposition chiite, a appelé à l’unité nationale et prôné le dialogue.

Yémen : le président crie au «complot»

Confronté à une contestation grandissante dans la rue, le président yéménite Ali Abdallah Saleh, a évoqué un «complot» contre l’unité de son pays et juré de défendre le «régime républicain» dans un discours devant les commandants de l’armée et des forces de sécurité, rapportent dimanche 27 février les médias de Sanaa. «Notre nation passe depuis quatre ans par des difficultés énormes (…) et nous essayons d’y faire face par des moyens démocratiques et par le dialogue avec tous les leaders politiques, mais en vain», a déclaré le président samedi 26 février dans la soirée devant les chefs des forces armées et des unités de sécurité. «Il y a un complot contre l’unité et l’intégrité territoriale de la république yéménite et nous, au sein des forces armées, nous avons prêté serment de préserver le régime républicain, l’unité et l’intégrité territoriale du Yémen jusqu’à la dernière goutte de notre sang», a-t-il ajouté.

Irak : 100 jours au gouvernement pour entamer des réformes

En Irak, le Premier ministre, Nouri Al-Maliki, a donné hier 100 jours à ses ministres pour faire leurs preuves, à la suite des manifestations de colère vendredi et samedi dans les principales villes du pays contre l’incompétence du gouvernement. «Maliki a fixé au gouvernement et aux ministères une période de 100 jours au terme de laquelle un bilan sera tiré sur les échecs et les réussites de chacun dans leurs missions», a annoncé un communiqué du cabinet du chef du gouvernement à l’issue d’un conseil des ministres «extraordinaire». «Des changements auront lieu sur la base de ce bilan», a-t-il prévenu ses ministres. Cet audit intervient après des manifestations dans tout le pays pour dénoncer l’absence de services publics décents et la corruption. Depuis le début du mois, ces manifestations ont fait 23 tués, dont un policier. Maliki a également présenté durant la réunion du cabinet les moyens de lutter contre la corruption et a prévenu les ministres qu’ils étaient «responsables» de ce qui se passait dans leur ministère et qu’ils devaient agir contre la concussion avant même l’intervention de la «Commission pour l’intégrité».

Maroc : appel à une manifestation pour vendredi

Un rassemblement pour réclamer des changements politiques au Maroc s’est tenu hier à Rabat à l’appel du Mouvement de «Jeunes du 20 février». Ce sit-in qui a réuni environ 500 personnes fait suite au rassemblement de samedi pour maintenir la mobilisation autour des revendications lancées par les initiateurs de ce mouvement en préparation des prochaines actions qui auront lieu en mars. Les participants ont, pendant deux heures, scandé les slogans propres au mouvement, notamment «la réforme de la constitution», «la dissolution du parlement» et «la chute du gouvernement» et porté banderoles à caractère social et économique. Ils ont également dénoncé la répression contre les manifestants en Libye et condamné le régime de Kaddafi. Un appel à une nouvelle manifestation a été lancé pour vendredi prochain.

Arabie saoudite :une mini-révolution

Une centaine d’intellectuels saoudiens lancent un appel pour des réformes politiques, économiques et sociales, réclamant notamment l’instauration d’une «monarchie constitutionnelle», «la séparation des pouvoirs» et l’adoption d’une Constitution. Les signataires, dont le nombre était parvenu à 132 en milieu de journée, réclament également «l’adoption de mesures permettant d’accorder aux femmes le droit au travail, à l’éducation, à la propriété et à la participation à la vie publique» et réclament l’interdiction de «toute discrimination confessionnelle, tribale, régionale ou raciale».

Qatar : un appel à l’éviction de l’émir

Un appel à l’éviction de l’émir du Qatar Hamad ben Khalifa al-Thani, lancé sur une page Facebook, a rassemblé samedi plus de 20 000 sympathisants, une nouvelle initiative pour un changement de régime dans le monde arabe. La page appelle les Qataris à descendre dans la rue le 16 mars pour une journée consacrée à la «Révolution pour la liberté».

Hocine Larabi