Saâd-Eddine El Othmani, ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération, est attendu à Alger pour une visite officielle lundi, -a-t-on appris auprès du ministère algérien des AE. La visite du chef de la diplomatie marocaine, la première de ce rang depuis 1989, devrait permettre la relance d’un processus de normalisation entre les deux pays voisins liés par la géographie et l’histoire.
Le déplacement d’El Othmani, lundi et mardi, sera aussi la première visite officielle à l’étranger du nouveau chef de la diplomatie marocaine — un des principaux dirigeants du Parti islamiste Justice et Développement (PJD, modéré) — qui verra son homologue algérien Mourad Medelci et sera probablement reçu par le Président Abdelaziz Bouteflika.
Le chef de l’État avait balisé les conditions de la relance de l’Union du Maghreb Arabe et avait souligné que cette relance se fera sur le strict respect du droit et de la légalité internationale. Une relance qui ne saurait se faire sur le dos du peuple sahraoui et qui devra nécessairement tenir compte de son droit imprescriptible à l’autodétermination et à l’indépendance. La position de l’Algérie est claire et précise à ce sujet et elle est conforme aux résolutions des Nations unies.
Or précisément et avant même la visite à Alger du chef de la diplomatie marocaine, certains médias marocains et une grande agence d’information francophone, depuis Rabat veut donner un sens et une orientation particuliers à une visite qui doit mettre à plat le contentieux bilatéral algéro-marocain et qui ne saurait interférer avec le fait national sahraoui. Un contentieux né de la volonté de Rabat de lier la question du Sahara occidental à ses relations avec Alger et de faire d’un problème de décolonisation, une simple question bilatérale.
Il faut rappeler au demeurant que c’est le Maroc qui s’est empressé de fermer ses frontières internationales avec l’Algérie au lendemain des attentats de Marrakech, dont les auteurs étaient des terroristes marocains. C’est aussi le Maroc, sur les conseils de Paris, qui a tourné le dos à ses engagements internationaux pour ce qui est du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui et ressortit la recette éculée de l’autonomie, soufflée naguère à Hassan ll, par Giscard d’Estaing.
C’est pourquoi et si l’on parle aujourd’hui de réchauffement des relations entre Alger et Rabat, amorcé avec le précédent gouvernement marocain, c’est sur la base de la dissociation, comme ne l’a cessé de le demander l’Algérie, de la question du Sahara occidental de la relation bilatérale.
La visite du MAE marocain, El Othmani, interviendra quelques jours avant celle de Moncef Marzouki. Le nouveau Président tunisien effectuera à partir du 6 février une visite qui le conduira en Algérie et au Maroc.
Mourad Medelci, ministre des Affaires étrangères, rencontrera également ses homologues de Mauritanie et de Libye, en marge du sommet de l’Union africaine et de la réunion des «pays du champ» prévus en février à Nouakchott . Ces rencontres seront suivies d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Union du Maghreb Arabe (UMA), prévue à la mi-février à Rabat. Enfin, une réunion des 5+5, le 20 février à Naples, en Italie, devrait être l’occasion de rencontres entre Medelci et ses homologues maghrébins.
Ces visites et rencontres interviennent au moment où l’Union du Maghreb Arabe (UMA) tente de prendre un nouvel essor après les bouleversements dans la région au lendemain du Printemps arabe. Pour Rabat, la visite d’El Othmani , « s’inscrit dans le cadre de la consolidation du processus des rencontres et des concertations entamé par les deux pays pour hisser leurs relations au niveau des aspirations des deux peuples frères.
Les deux ministres « examineront les voies et moyens susceptibles de relancer l’Union du Maghreb Arabe (UMA) en réorganisant certaines de ses institutions et de ses mécanismes en vue d’une meilleure efficacité », a-t-il ajouté. Mais comme l’a souligné depuis Tunis, le Président Bouteflika, un essor et une relance qui se fera dans « le strict respect de la légalité internationale».
Un principe intangible de l’Algérie, au moment précisément et avant une visite importante où à Rabat on continue à user du double langage et on réactive des réseaux et des relais dont les seuls intérêts sont mercantiles et n’ont cure des intérêts de l’économie algérienne. Ainsi, il serait faux de parler de « réconciliation » entre les deux pays , comme l’écrit un grand média , les relations entre les deux pays n’ayant- jamais été interrompues et Dieu merci, aucun conflit meurtrier ne les ayant opposé.
Quant aux récentes déclarations du nouveau chef du gouvernement marocain, l’islamiste Abdalilah Benkirane, qui a appelé en décembre à un « rapprochement » avec l’Algérie, susceptible, selon lui, de résoudre le problème du Sahara occidental, l’amalgame est vite fait.»Si nos différends avec l’Algérie sont réglés avec l’ouverture des frontières, le problème du Sahara occidental sera résolu. La fraternité avec l’Algérie résoudra tous les problèmes », avait-il déclaré, dans un bel optimisme mais avec une profonde méconnaissance du dossier.
Contrairement à ce qu’a toujours prétendue la propagande marocaine, l’Algérie, qui n’est pas le tuteur du peuple sahraoui, a toujours refusé de se laisser entraîner dans une dérive criminelle, contraire à ses principes sacro-saints et n’a jamais lié ses relations, avec quelque pays que ce soit, à un marchandage qui se ferait sur le dos des Sahraouis.
En outre, c’est l’Algérie et non le Maroc, comme on est en train de souffler depuis Rabat, qui a imposé fermement que l’on ne lie pas la question de l’autodétermination du peule sahraoui – qui est du ressort des Nations unies- à ses relations bilatérales.
Mokhtar Bendib