Le médicament objet de pratiques mafieuses: Trafic sur ordonnance

Le médicament objet de pratiques mafieuses: Trafic sur ordonnance

Des trafiquants se sont organisés en réseaux puissants et n’ont aucun mal à passer les filets de la douane pour introduire toutes sortes de médicaments.

La mafia des importateurs et le trabendisme n’épargnent aucun secteur. Celui des produits pharmaceutiques en paye lourdement les frais, selon le président de l’Ordre des pharmaciens, le Dr Lotfi Benbahmed qui s’est exprimé hier sur les ondes de la Chaîne 3. Le phénomène prend une ampleur sans précédents, et constitue une réelle menace sur la santé publique.

Le président de l’Ordre des pharmaciens dénonce un nombre grandissant de trabendistes qui ne reculent devant rien pour faire leur beurre sur le dos des malades. Et ce, depuis les nouvelles restrictions de la loi de Commerce sur l’importation, cette activité dénoncée depuis déjà plusieurs années prend une tournure inquiétante. Et pour cause, ces trafiquants se sont constitués en lobbys puissants, et n’ont aucun mal à passer les filets de la douane pour introduire toutes sortes de médicaments, notamment les psychotropes.

A ce niveau d’impunité, il est clair que la complicité entre les médecins prescripteurs, les pharmaciens et les importateurs, n’est plus à démontrer.

Le Dr Benbahmed attire fortement l’attention sur les produits pharmaceutiques qui ne comportent pas de vignette, «cela veut dire qu’ils sont d’origine douteuse, et qu’ils peuvent être dangereux. Il faut les signaler, d’autant plus qu’ils ne sont pas remboursables sans vignette».

Dans ce sens, le président de l’Ordre des pharmaciens explique que les produits les plus contrefaits concernent les maladies chroniques telles que le diabète et l’hypertension, et se vendent sans ordonnance à plus de deux fois leurs prix. En outre, il s’agit d’une vingtaine de produits qui reviennent régulièrement Effectivement, le Dr Benbahmed explique que certains médecins prescrivent des médicaments, tout en sachant qu’ils n’existent pas sur le marché et orientent leurs patients vers des pharmacies où ces derniers peuvent trouver ces produits frauduleusement importés.

A ce titre, il rappelle que son organisme condamne ces pratiques depuis longtemps par des retraits définitifs ou temporaires d’exercer et des sanctions pénales allant de 2 à 5 ans de prison, avec des amendes de cinq à 10 millions de dinars.

Par ailleurs, ce qui est plus grave aux yeux du Dr Benbahmed, c’est l’argument avancé par ces importateurs malhonnêtes, et qui consiste à faire croire qu’ils rendent service aux malades, en intervenant pour rendre les produits disponibles. Or, en réalité ce qui les intéresse n’est autre que l’aspect financier de ces opérations. Il explique que l’absence des vignettes permet également d’afficher les prix et fixer les marges librement, amassant ainsi à leur guise des revenus colossaux.

Par ailleurs, un autre phénomène, non moins grave mine le secteur de la santé, et précisément celui des pharmaciens, et représente également une menace sur la santé publique, en l’occurrence, la prolifération des herboristes, et des pharmacies «ce n’est plus l’herborise traditionnel qu’on connaissait, ils se sont transformés en vraies officines, et proposent des produits sous la forme pharmaceutique, gélules, comprimés, etc. En plus, ils les vendent à des prix astronomiques, prétendant apporter des remèdes à toutes les maladies, alors qu’en réalité c’est de la pratique illégale de la médecine et de la pharmacie», précise le Dr Benbahmed qui ajoute que ces produits qu’on trouve chez ces herboristes peuvent s’avérer très dangereux, du fait qu’il contiennent des principes actifs à des doses non contrôlées.

Il précise néanmoins, que plusieurs plaintes et actions ont été effectuées par l’ordre des médecins, auprès de la justice pour mettre fin à ces pratiques, mais en vain.

A cela, s’ajoute le manque cruel de formation en milieu pharmaceutique, et donne lieu à des comportements plus ou moins irresponsables de la part de certains pharmaciens, qui n’hésitent pas à se faire remplacer par des jeunes sans expérience.

A ce sujet, le Dr Benbahmed explique que des réformes ont été engagées, et donneront pour les années prochaines des milliers de pharmaciens spécialistes.

Par ailleurs, malgré ce déficit en formation, le Dr Benbahmed, rassure et indique que la production arrive à 45% de substitution à l’importation et ce, également grâce à la promotion de l’investissement dans ce secteur, la prise en charge des maladies chroniques et les centres anticancer.

A cet effet, sur le terrain la volonté politique est réellement ressentie et donne lieu en plus des 73 producteurs nationaux, à la prévision de 150 projets inscrits au ministère de la Santé. Sauf que la vraie problématique réside dans le manque de régulation «nous demandons plus de régulation dans cette production, dans le sens où la plupart des producteurs produisent la même molécule, avec un investissement lourd, qui logiquement aurait dû être orienté vers la production de molécules qui n’existent pas sur le marché algérien», précise-t-il.