Une autre manoeuvre du Maroc qui a trouvé une occasion pour relancer le dossier de la réouverture des frontières avec l’Algérie.
L’annonce a été pour le moins surprenante. Réunis le 10 mai dernier en sommet à Riyad en Arabie Saoudite, les dirigeants du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), se sont déclarés favorables à une adhésion du Maroc à leur groupement régional. Le CCG réunit l’Arabie Saoudite, Oman, le Koweït, Bahreïn, les Émirats arabes unis et le Qatar. Et pour bien faire passer la pilule qu’ils veulent faire avaler aux Arabes, ils lancent également l’invitation à la Jordanie.
Ce qui est encore plus surprenant a été la réaction en deux temps du Maroc à cette invitation. Dans un premier temps, il décline diplomatiquement la proposition du CCG. Un refus qui avait déjà les relents d’une manipulation à grande échelle. Puisqu’il a a réitéré son «attachement naturel et irréversible» à la construction de l’Union du Maghreb Arabe (UMA). Une autre manoeuvre du voisin marocain qui a trouvé une occasion pour relancer le dossier de la réouverture des frontières avec l’Algérie. Comme quoi vis-à-vis de la communauté internationale, c’est le Maroc qui s’attache à la construction de l’UMA et c’est l’Algérie qui bloque cette construction. Des assertions totalement fausses. Mais c’est de bonne guerre.
Dans un second temps, le Maroc se rétracte. Une adhésion du Maroc au Conseil de coopération du Golfe (CCG) «prendra du temps» et devra être «progressive», a estimé le ministre marocain des Affaires étrangères, en tournée dimanche dans la région. Taïeb Fassi, qui se trouvait à Abou Dhabi au lendemain d’une visite à Riyadh, est porteur de messages du roi Mohammed VI «remerciant» les dirigeants du CCG pour leur offre en vue d’une adhésion de son pays à leur club. «Le Maroc a réagi positivement à cette offre, qui doit se concrétiser selon une approche progressive», a dit M.Fassi au quotidien arabe Al-Hayat. «Nous sommes volontaires pour adhérer» au CCG mais cela «prendra du temps», a ajouté le ministre, qui a été reçu avant-hier, à Riyadh, par le roi Abdallah d’Arabie Saoudite et dimanche à Abou Dhabi par le président des Emirats arabes unis, cheikh Khalifa Ben Zayed Al-Nahyane. D’autre part, il convient de se poser la question de savoir «pourquoi le Yémen, qui fait le pied de grue depuis des années devant ce Conseil, n’a-t-il pas bénéficié du même accueil que le Maroc?» Voilà donc les monarques du Golfe se souciant de leur sécurité en ouvrant grandes leurs portes au royaume du Maroc. Tous les observateurs s’accordent à dire que l’un de leurs principaux objectifs consiste à isoler l’Algérie.
Tout simplement parce que l’Algérie a toujours servi d’intermédiaire entre les Occidentaux et l’Iran dans le cadre des négociations pour la dénucléarisation. Un rôle de leadership que les monarques contestent à l’Algérie. D’autre part, l’Algérie refuse de s’impliquer dans le conflit libyen. Il faut alors faire feu de tout bois contre l’Algérie allant jusqu’à l’accuser de soutenir le régime d’El Gueddafi. Depuis le déclenchement des révoltes arabes, les potentats du Golfe ont ressenti le besoin d’avoir leurs propres réseaux pour renforcer leur sécurité et protéger et leurs intérêts et leur sécurité. Ils se manifestent alors par des actions spectaculaires exhibant leur forces contre…d’autres Arabes, jamais contre Israël. N’a-t-on pas vu des chars rutilants appartenant aux soi-disant forces du Bouclier de la Péninsule, se déployer en mars dernier pour mater un mouvement de contestation au Bahreïn? Il s’agissant en fait de protéger un roi sunnite dans un pays majoritairement chiite. N’a-t-on pas assisté ahuris, aux déclarations incendiaires du prince qatari contre le régime libyen? Le Qatar s’est impliqué directement dans l’effort international contre le régime d’El Gueddafi en participant aux frappes aériennes. Des avions arabes pour casser de l’Arabe.
On n’a pas entendu la moindre contestation de ces mêmes pays, de ce même Conseil lorsque les Israéliens massacraient les populations à Ghaza en 2008. Les incursions de ces pays, notamment au Bahreïn, n’ont pas été du goût de l’Iran qui a violemment contesté cette situation.
Entre le groupement régional et Téhéran, les relations n’ont jamais été au top. Elles se sont envenimées depuis l’intervention des troupes de la Force commune du Golfe à Bahreïn. D’ailleurs, lors de la réunion du CCG du 10 mars dernier, le dossier de l’Iran a été largement abordé.
Les propos tenus récemment par du chef d’état-major des armées en Iran, le général Hassan Firouzabadi, qui a dénoncé le «front des dictatures arabes» du Golfe, ont suscité l’ire des rois. En général, les monarques arabes quand ils s’énervent, se mordent la queue. C’est ce qui s’appelle une colère royale.
Brahim TAKHEROUBT