Le marché de la sécurité sous monopole

Le marché de la sécurité sous monopole

Une «demande énorme» en Algérie pour un marché de la sécurité «très juteux» mais dont l’accès est réservé à ceux qui réussissent à obtenir le «sésame» du ministère de l’Intérieur ou de la Défense.

L’offre de services dans le marché de la sécurité en Algérie demeure insuffisante. Le nombre de sociétés exerçant dans ce domaine n’arrive pas à satisfaire la demande, que ce soit celle des industriels ou des particuliers. «La demande est de plus en plus importante et dans certains cas on a du mal à satisfaire notre clientèle», nous a indiqué M. Hassani Touati, directeur de SVP ISO, une société spécialisée dans la fourniture et l’installation des systèmes de sécurité.

La demande du marché serait «énorme» pour ce qui concerne notamment les systèmes anti-intrusion, le contrôle des accès et la vidéosurveillance. La croissance de ce marché spécialisé et très juteux n’a pas été sans attirer l’attention des pouvoirs publics qui ont décidé de soumettre cette activité à agrément. Un décrét exécutif, publié au journal officiel du 10 décembre 2009, classe les caméras de surveillance dans la catégorie des «équipements sensibles» dont l’installation est sujette à un agrément, un «sésame», délivré par les services du ministère de l’Intérieur.

L’enjeu du marché de sécurisation de l’autoroute est-ouest

Si l’on se fie aux déclarations de notre interlocuteur, cette mesure vise «la mise du marché de la sécurité sous monopole d’un groupe restreint d’opérateurs à la veille du lancement de l’opération de sécurisation de l’autoroute est-ouest qui sera équipée en caméras de télésurveillance».

Le patron de SVP, implantée à Arzew dans la wilaya d’Oran, a soutenu, en ce sens, que «l’obtention de cet agrément relève de l’impossible pour les sociétés qui n’ont pas de ‘relais’ au sein de l’administration». L’agrément pour l’installation des équipements de détection de métaux est encore plus inaccessible puisqu’il faut le demander auprès du ministère de la Défense nationale, explique encore M. Touati en marge des travaux d’un séminaire international sur la sécurité des infrastructures industrielles, organisé par le cabinet d’expertise industrielle Halfaoui. A cet événement, qui s’est tenu les 2 et 3 mars au Palais des Expositions des Pins maritimes à Alger, il y avait une présence remarquée de nombreux officiers retraités de l’armée algérienne.

« L’Etat devrait se charger des dégâts causés par les émeutiers »

A noter que les participants à ce séminaire étaient unanimes à considérer que le marché de la sécurité en Algérie offre des possibilités indéniables de croissance.

Pour l’expert français Jean-Claude Déranlot, le savoir-faire algérien en la matière existe mais il a besoin d’être développé pour se hisser aux standards internationaux. De son côté, le manager général de BRCC (un bureau d’études spécialisé en «environnement et sécurité industrielle»), M. Ghedjati, a tenu à souligner que «les entreprises algériennes ont un grand besoin de mise à niveau et nous sommes de plus en plus sollicités pour faire des études et donner des conseils qui traitent de la sécurité industrielle».

La réglementation régissant cet aspect de l’activité économique oblige les entreprises à respecter les normes de sécurité et la protection de l’environnement mais elle demeure assez « souple ».Les entreprises, a-t-il expliqué, ont la possibilité de se doter d’un plan évolutif qui leur permettra de se conformer de manière graduelle aux lois se rapportant à la sécurité des lieux du travail et à la pollution.

Signalons enfin que les participants à ce séminaire ont estimé que la prise en charge du risque des émeutes relève des responsabilités de l’Etat et non pas des entreprises. M. Lotfi Halfaoui, «le maître d’œuvre» de cette rencontre, a indiqué à ce propos que «les émeutes sont un risque émergent que l’on peut prévoir au moyen d’une veille stratégique».

Ce risque, a-t-il encore expliqué, est «détectable à travers des signaux traitant entre autres du niveau de vie de la population et des conditions locales de gouvernance». Il a enfin également considéré que «les risques d’émeutes n’étant pas pris en charge dans le cadre des contrats d’assurance, l’Etat a le devoir d’indemniser les entrprises qui ont fait l’objet d’actes de vandalisme en janvier dernier».