En décidant de plafonner les prix du kilo de sucre à 90 dinars et le bidon de litres d’huile de table à 600 dinars, les autorités n’avaient-elles pas effectué une simulation pour mesurer l’impact des mesures, annoncées dans la foulée, sur le prix de vente des deux produits ?
En décidant de plafonner les prix du kilo de sucre à 90 dinars et le bidon de litres d’huile de table à 600 dinars, les autorités n’avaient-elles pas effectué une simulation pour mesurer l’impact des mesures, annoncées dans la foulée, sur le prix de vente des deux produits ?
Ce qui est sûr, c’est que si l’on se fie aux prix affichés, après l’annonce de ces mesures gouvernementales, par l’un des plus gros producteurs de sucre et d’huile dans le pays, en l’occurrence Cevital, l’on se rend compte que les prix fixés par l’Etat reste élevés. Jugeons-en. Le groupe agroalimentaire a, en effet, décidé de fixer le prix du kilogramme de sucre à 69,50 dinars et celui du bidon d’huile de 5 litres à 495 dinars. Des prix donc bien plus intéressants que ceux annoncés par le gouvernement. En appliquant les mesures annoncées par les pouvoirs publics, le groupe Cevital s’est rendu compte, comme l’ont fait certains observateurs auparavant, que l’on pouvait descendre encore « plus bas » dans le plafonnement du prix des deux produits de large consommation.
« Nous avons soustrait les taxes supprimées par le gouvernement aux anciens prix », s’est expliqué hier, M. Issad Rebrab, le patron de Cevital dans le journal électronique TSA. C’est là une réaction à une interpellation dont il a fait l’objet de la part du ministère du Commerce. Selon l’agence APS, le groupe agroalimentaire a été « sommé » hier par le ministère du Commerce « pour se conformer à l’accord conclu dimanche dernier avec les opérateurs économiques (producteurs et importateurs) du sucre et d’huile pour faire baisser les prix de ces deux produits ». « Les équipes de contrôle dépêchées par la Direction du contrôle commercial et de la répression de la fraude pour vérifier l’application de cet accord ont constaté que les prix appliqués par Cevital sur le sucre et l’huile ne sont pas conformes aux termes de l’accord », précise le ministère du Commerce. Le gouvernement réclame donc de Cevital, tenez-vous bien, de vendre plus cher son produit.
Le ridicule ne tue donc plus. Alors que l’on se plaignait de la hausse des prix, maintenant on ne veut pas de la baisse. Mais que cache en réalité cette sortie pour le moins hasardeuse ? « Nous avons tout de suite appliqué la décision du gouvernement de plafonner les prix de ces produits. Cevital s’était engagé à le faire. Il l’a fait », s’est défendu hier M. Rebrab. Qu’est ce qui aurait empêché l’exécutif d’aller au bout de sa logique et de fixer le prix découlant d’une simulation de prix après abattement des taxes et impôts ? La question demeure posée.
Ce qui en tout cas clair, c’est que les mesures prises par le gouvernement concerne un « plafonnement » du prix. Autrement dit, l’essentiel c’est le prix du produit sur le marché ne doit pas dépasser celui fixé par les autorités. Ces dernières se sont-elles fait piéger par la formulation des décisions prises ? Que risque un opérateur qui mettrait sur le marché un produit à un prix plus bas que celui fixé par l’Etat ? Il faut dire que les mesures prises posent plus de question qu’elles n’en résolvent. L’autre interrogation que suscitent ces mesures a trait aux exonérations et avantages accordés aux importateurs dans le sillage de ceux offerts aux transformateurs. Il s’agit de la suppression de toutes les taxes sur l’importation de sucre blanc, soit un total de 52,1 %.
Les transformateurs ont-ils trop tôt crié victoire sans prendre la mesure de l’impact du dispositif exceptionnel sur leur activité ? Le temps semble commencer à donner raison à ceux, plus sceptiques, qui estimaient que la batterie de mesures compte un revers qui n’est pas forcément bénéfique à la filière. Les importateurs risquent donc de noyer le marché et la première conséquence d’une telle option c’est casser les petits producteurs et transformateurs qui ne pourraient pas survivre à une telle concurrence pour le moins déloyale.
Le lobby des importateurs, qui n’a pas cessé ces derniers mois de dénoncer la décision du gouvernement prise en septembre dernier de rétablir les droits de douane sur le sucre importé de l’Union européenne, peut aujourd’hui crier victoire.