L’ancien premier responsable de l’institution militaire algérienne se dit «au coeur d’une conspiration».
Le général à la retraite Khaled Nezzar est revenu, dans un long entretien paru hier dans Le Soir d’Algérie, sur sa gestion du conflit des années 1990, alors qu’il était à la tête de l’Armée nationale populaire (ANP). Après son interpellation en Suisse suite à une plainte de l’ONG Trial, Nezzar fait ainsi sa première sortie publique. Selon lui, les commanditaires de cette conspiration ne sont, peut-être, autres que les anciens chefs de l’ex-FIS. «Rien n’est plus gratifiant pour ceux auxquels l’ANP a jadis barré la route que de voir un de ses anciens chefs sur la sellette. Quelque part, c’est une tentative d’obtenir par ricochet la condamnation par la justice des nations», affirme-t-il.
Le principal artisan de l’arrêt du processus électoral en 1992 revient pour défendre ses positions. «L’armée, héritière de l’ALN, est intervenue contre la violence dans le cadre de la loi sans recourir aux méthodes qui ont déshonoré tant d’autres armées dans nos régions», a-t-il indiqué.
«L’ANP, et cela je le revendique et je l’assume, a empêché la kaboulisation de l’Algérie. Que des mémoires à oeillères le perçoivent différemment, maintenant que le danger est passé, c’est dans la nature des choses. On peut s’en indigner, mais il faut faire avec», explique Khaled Nezzar. Reprenant les deux citations connues du numéro deux du parti islamiste, Ali Belhadj en l’occurence, «La démocratie est mécréance» et «si le peuple vote contre la loi de Dieu (la Charia) cela n’est rien d’autre qu’un blasphème. Dans ce cas, il faut tuer ces mécréants…», M. Nezzar a voulu rappeler ainsi que la violence que réservaient les anciens dirigeants du Front islamique du salut (FIS, dissous) au peuple algérien pouvait être terrible.
Selon l’ex-militaire, l’Armée nationale «a conforté le multipartisme (…); elle a tout fait pour que le dialogue entre les Algériens soit le moyen de régler les différends; elle a surtout initié une politique de la main tendue et du pardon en direction de ceux qui ont pris les armes contre leur propre pays».
Le fait qu’il soit accusé en tant qu’ancien chef de l’armée c’est, selon lui, toute l’institution militaire qui est visée à travers cette affaire.
Il se défend d’ailleurs par le fait qu’ «on ne peut pas citer à comparaître toute l’armée. On incrimine donc celui qui la commandait», soutient-il.
Khaled Nezzar, à travers cet entretien, veut réaffirmer qu’il est totalement innocent des faits qui lui ont été reprochés. «Ce sont des faits auxquels je suis complètement étranger et contre lesquels la justice de mon pays a sévi à chaque fois qu’elle en a eu connaissance», a-t-il indiqué.
Quant à l’organisation suisse Trial, Khaled Nezzar a souligné que les ONG étrangères sont perçues comme étant «la bonne conscience sélective de l’Occident» par nos opinions publiques. Il réaffirme aussi qu’il sera prêt à répondre à toutes les convocations de la justice suisse.
Dans l’affaire dite «suisse» où Khaled Nezzar a cité Aït Ahmed, le général-major à la retraite n’a pas raté encore une fois l’occasion pour accabler l’homme historique, Aït Ahmed. «Ses positions politiques sont un peu difficiles à suivre pour ceux qui sont habitués à une certaine constance dans les idées», a-t-il dit, avant de poursuivre: «Je n’ai jamais compris son animosité à l’égard de l’ANP, mais c’est son problème.»
I. T.