Les deux grands partis au pouvoir ont remporté les élections législatives en Algérie, loin devant les islamistes qui crient à la fraude, selon les résultats officiels annoncés vendredi.
Le ministre de l’Intérieur, Dahou Ould Kablia, a déclaré que l’ancien parti unique du Front de libération nationale (FLN) du président Abdelaziz Bouteflika et le Rassemblement national démocratique (RND) du Premier ministre Ahmed Ouyahia remportaient la majorité des 462 sièges à l’Assemblée, avec 220 députés pour le FLN et 68 pour le RND. Le FLN était déjà la première force dans l’Assemblée sortante, avec 136 députés sur 388.
L’Alliance de l’Algérie verte, qui regroupe le Mouvement de la société pour la paix (MSP), El-Islah et Ennahda, n’obtient que 48 représentants, contre 62 dans l’Assemblée sortante. La coalition islamiste a dénoncé une vaste fraude et menacé de prendre « les mesures appropriées », sans plus de précision.
Le Front des forces socialistes d’Hocine Aït Ahmed, l’un des leaders historiques de l’indépendance, qui a décidé de participer au scrutin à la dernière minute, ne glane que 20 sièges, tout comme le Parti des travailleurs (PT, trotskiste) de Louisa Hanoun, qui perd six députés par rapport à l’Assemblée sortante. Les sièges restants sont répartis entre les petites formations et autres listes indépendantes.
La nouvelle Assemblée, qui comptera 145 femmes en raison de l’obligation pour les partis politiques de présenter un tiers de femmes sur les listes, sera chargée de réécrire la Constitution et d’organiser l’élection présidentielle de 2014. Agé de 75 ans, Abdelaziz Bouteflika dirige le pays depuis 1999.
L’une des grandes inconnues de ces législatives était la participation, le désintérêt affiché par les Algériens semblant annoncer une abstention massive. Finalement, 42,36% des quelque 21,6 millions d’électeurs inscrits ont voté, soit davantage que les maigres 35% de 2007, mais l’abstention reste élevée et atteint près de 70% dans les principales villes du pays.
Les islamistes avaient quant à eux espéré obtenir un très bon score, comme cela a été le cas au Maroc, en Tunisie et en Egypte après les mouvements de réforme du Printemps arabe l’an dernier. Ils avaient tablé sur une deuxième place derrière le FLN avec 80 à 100 députés selon leurs observateurs aux bureaux de vote.
L’Algérie n’a pas connu de manifestations de masse comme la Tunisie ou l’Egypte mais elle n’est pas épargnée par les manifestations et émeutes liées au chômage, aux services publics déficients et manque de logements. Officiellement, le chômage frappe 10% de la population active, mais ce chiffre grimpe à 20% au moins chez les diplômés, et 70% des 33 millions d’Algériens sont âgés de moins de 35 ans.
Le président avait promis des législatives libres dans le cadre d’un processus de réforme, soulignant que 500 observateurs internationaux s’étaient déplacés, et la moitié des 44 partis qui présentaient des candidats ont été légalisés cette année. Les dernières élections libres remontaient à 1991 mais l’armée avait annulé le scrutin que le Front islamique du salut (FIS) était en passe de remporter. Le pays avait plongé dans dix ans de guerre civile qui avaient fait quelque 200.000 morts.
De nombreux Algériens interrogés ces derniers jours ont exprimé leur scepticisme au sujet des réformes promises et souligné que les élections étaient truquées depuis des décennies.
« Le peuple algérien a accompli son devoir patriotique et montré qu’il était prêt à prendre son destin en mains », a déclaré vendredi le ministre de l’Intérieur en annonçant les résultats.