Le consultant international en nouvelles technologies, Roslane Bencharif, estime que le contexte économique actuel ne favorise pas l’introduction de la 4G. Il y a lieu, dit-t-il, de s’intéresser à l’opportunité du marché existant notamment celui du contenu local ou encore le e-paiement.
L’Econews : La quatrième génération de réseaux mobiles fournira des débits jusqu’à dix fois supérieurs à la 3G actuelle. Selon vous, coûtera-t-elle plus chère ?
Roslane Bencharif : La possibilité des augmentations des prix de la 4G revient en premier lieux à la décision de l’opérateur. En fait, tout dépend de sa stratégie envisagé. Les prix pourraient garder le même niveau si l’opérateur subventionnait une grande partie de ses investissements. Il est probable aussi que ces prix connaissent une hausse dans le cas où il décide de revoir sa stratégie commerciale de sorte à ce qu’il puisse rentabiliser son investissement.
Par contre, la question qui se pose actuellement c’est celle de savoir s’il existe un marché réel qui peut absorber une telle technologie ? Quel est la taille de ce marché, sa capacité de paiement et qu’en est-il de ses besoins par rapport à l’offre ? A mon avis l’ensemble de ces éléments n’ont pas été traités. Ceci pourrait nous emmener droit vers la dépense d’un denier public qui pourrait être utile pour développer d’autres projets beaucoup plus constructifs.
Où réside la faille dans ce cas-là ?
Cette technologie demande de gros investissements. Ce qu’ont consenti les pouvoirs publics pour le développement de la 4G est estimé à plusieurs millions d’euros. En outre, l’absence de contenus locaux et d’un système e-paiement performant ne favorise pas la mise en place de cette technologie. Y a-t-il un besoin réel de cette technologie ? Ceci permettrait-t-il un retour d’investissement ? Au moment où les décideurs parlent d’austérité, ils mettent tout leur poids à l’effet du lancement de cette technologie au lieu de s’intéresser à l’opportunité du marché existant, notamment celui du contenu local ou encore le déploiement du e-paiement dans nos administrations.
Je m’explique : les pays développés ont eu recours à cette technologie pour répondre à un besoin de saturation des bandes passantes causée par un surplus d’applications qui rendaient leur utilisation de plus en plus complexe. La 4G était une solution pour pouvoir exploiter ce contenu à bon escient.
Ceci n’est absolument pas le cas chez nous. Avant de créer une culture numérique ou encore un marché numérique, nous devons d’abord déployer le e-paiement et la convertibilité du dinar dans un second lieu. Je pense que c’est très difficile de rentabiliser l’investissement consentis dans ce sens. Aujourd’hui, il y a lieu de s’intéresser, à mon avis, au marché étant donné que c’est lui qui accueille ce type de technologie (4G).
Trois grandes marques électroniques, qui sont aujourd’hui le centre des échanges technologiques, représentent 95% du marché de mobiles au niveau mondial. Leur présence en Algérie est quasi-limitée ou inexistante. S’associer avec ces marques à savoir Apple, Google ou Infosat ne peut être que bénéfique pour accompagner ce secteur
Que préconisez-vous pour rendre son utilisation plus rentable ?
La 4G mobile est une nouvelle technologie de réseaux sans fil qui permet de véhiculer, grâce à sa bande passante, un maximum de paquets de données à une grande capacité. Ceci donnerait aussi un marché important pour les créateurs de contenus. Sauf que personne n’ira vers cette création de contenus en sachant qu’il ne pourra pas la monnayer. Aujourd’hui, le besoin du consommateur est minime. Tous simplement parce que ce besoin s’exprime en fonction du contenu disponible. Les applications proposées actuellement sont simples et sont limitées à la vie de tous les jours. La réalisation de certaines applications, qui impliquent l’accès à d’autres données quelconques, nécessitent un savoir-faire de sociétés spécialisées. Ces dernières permettraient, ainsi, à l’ensemble des utilisateurs d’accéder à toutes ces applications. L’e-paiement est un élément primordial qui nécessite un développement, car c’est dans ce domaine que nous avons pris du retard. Les décideurs politiques devraient commencer par le développement des systèmes électroniques qui créent de l’économie numérique avant d’aller vers l’installation d’outils qui pourraient faire avancer cette économie. Le taux de pénétration serait beaucoup plus grand et gagnerait plus d’utilisateurs.