L’Algérie boucle sa 49e année après l’indépendance. Quel regard portez-vous sur le parcours que notre pays a connu depuis ?
Sur le plan politique, je vous dirais que l’Algérie entame une nouvelle phase après 22 ans d’expérimentations démocratiques initiées à travers les réformes constitutionnelles, et notamment dans la Constitution de 1989. Aujourd’hui, l’Algérie est en phase de revoir et d’une manière plus profonde le changement structurant de cette démocratisation. Le discours du Président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, le 15 avril dernier, a énuméré un nombre de principes fondamentaux. Des principes qui vont orienter l’Algérie vers un Etat de droit qui garantira la citoyenneté des citoyens, une justice libre, égalité des chances de productivité et une destination politique pour établir un système de démocratie délégataire.
Faites-vous allusion aux dernières consultations politiques ?
Effectivement. En fait, ces reformes ont initié des consultations que j’estime larges, qui nécessitent aussi un encadrement d’experts et d’expérience. C’est-à-dire que, après la commission de Bensalah qui a vu la réception d’un grand nombre de personnalités, on passera à la deuxième phase de cette initiative, cette deuxième phase devrait être réservée à la mise en place d’une sorte de commission qui serait composée d’hommes politiques et d’experts en droit et en sciences politiques et cela pour établir une feuille de route.

Quelles seraient les grandes lignes de cette feuille de route à votre avis ?
A mon avis, elle concernerait les réformes à entreprendre sur les lois et la Constitution. D’ailleurs, l’énoncé du discours du Président de la République et le communiqué du Conseil des ministres du 2 mai dernier, a essentiellement lancé un grand chantier sur les réformes qui vont remplacer le système actuel, celui de la démocratie constitutionnelle par le système de démocratie structurelle. J’estime qu’on peut retenir au moins trois choses de cette future transformation de la vie politique algérienne : La première certainement plus de clarté en ce qui concerne les objectifs de ces réformes, la deuxième, une ouverture plus large aux acteurs politique et les intellectuels de ce pays et la troisième chose c’est que ces réformes doivent être essentiellement le début d’une refonte de l Etat
Ces réformes sont venues au moment où l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient traversent une période particulière. Comment analysez-vous ce qui se passe dans ces régions ?
Le cas de l’Algérie n’est pas lié directement à ce qui se passe actuellement dans ces pays.
Les Etats arabes n’ont pas la même architecture politique, déjà sur le plan de la nature des Etats, il y a quatorze républiques et huit monarchies, sur le plan des systèmes politiques, il y a aussi le système parlementaire, comme par exemple, celui de la Jordanie et prochainement pour le Maroc, et il y a également les Etats républicains qui fonctionnent avec le système présidentiel comme c’est le cas pour l’Irak et le Liban. Aussi, j’estime que ce qui se passe dans ces Etats arabes peut être expliqué par deux facteurs déterminants : La volonté des populations d’aller vers un système moins autarcique et autocratique sans qu’il y est des chamboulements profonds, comme cela a été le cas pour la Jordanie au début des manifestations, et même en Egypte où il y a eu le rejet des symboles de ce système politique et ses clientélistes sans qu’il y ait une confrontation, d’où la prise de pouvoir par les militaires.
Le deuxième facteur vient de l’étranger en fait, puisque depuis 2004, il y a une certaine volonté des Occidentaux, notamment après la réunion du G8, organisée aux Etat-Unis sur l’aide aux réformes politiques dans le monde arabe. Les reformes de ces pays sont désormais voulues et publiquement annoncées, si l’on se réfère aux propos du Président des Etats-Unis, Barak Obama dans son discours de 19 mai 2011.
Qu’en est-il pour l’Algérie, risque t-elle de subir l’onde de choc ?
Aucunement, l’Algérie n’est pas touchée directement par ces événements et elle ne sera pas touchée, l’explication est simple : Les réformes politiques actuelles constituent une phase dans le développement et la maturation du système démocratique, mais aussi les conditions économiques et sociales ne sont pas les mêmes.
L’Algérie qui a eu un recul dans le classement international en matière de pratique de la démocratie et le développement humain, mais tout de même ! On voit bien qu’il y a une volonté de la majorité des cadres représentatifs de ce pays pour faire avancer ces reformes. Ce qui se passe actuellement dans les autres pays, au lieu d’encourager, va pousser les Algériens à plus de retenue, mais aussi à plus de nationalisme.
Interview réalisée par Makhlouf. A.