Dans une conférence de presse tenue jeudi dernier, à Washington, et consacrée aux économies de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (Mena), le directeur du Fonds monétaire internationale (FMI), le Français Dominique Strauss-Kahn, cité par l’APS, estime, au sujet de l’évolution de l’économie algérienne, que l’année 2011 sera «favorable» pour l’Algérie, sur les plans «économique» et «financier», et que l’évaluation de sa situation économique par le FMI est «positive». Ce tableau reluisant, Strauss-Kahn le lie au redressement des marchés pétrolier et gazier.
Pour lui, l’Algérie est un cas spécial par rapport à ses voisins immédiats du fait du modèle d’utilisation des «énormes» ressources provenant du secteur pétrolier, qui doit aider à financer l’important plan d’investissements quinquennal 2010-2014. Il estime ainsi que les «énormes» réserves que la Banque centrale d’Algérie a accumulées permettent de «protéger» l’Algérie contre «tout type» de problèmes en termes de choc externe. Strauss-Kahn note également que le développement des infrastructures à travers le plan quinquennal aura un impact aussi bien sur l’Algérie que sur toute la région, car l’Algérie est non seulement le «plus grand» pays, mais aussi, géographiquement, le pays «central» de la région. «Tout ce qui pourrait être créé en Algérie profiterait à toute la région», résume-t-il.
Le directeur général du Fonds monétaire recommande, par ailleurs, qu’une grande partie des ressources financières de l’Algérie soit utilisée «en direction des infrastructures» et des «investissements à long terme», et qu’une autre partie soit mobilisée pour «l’amélioration de l’environnement des entreprises», susceptible d’attirer les investissements étrangers. Strauss-Kahn ne pouvait pas ne pas évoquer les effets produits par les bouleversements politiques que connaît actuellement la région Mena.
A ses yeux, ces changements constituaient un moment historique en termes de démocratie et de libertés, notamment. Ils ont créé des défis nouveaux non seulement sur le plan politique, mais aussi sur le plan économique. Pour lui, les pays importateurs de pétrole pourraient souffrir plus que d’autres dans cette région et une évaluation de l’impact de la hausse des cours de pétrole devrait être opérée. Le DG du FMI a cité les pays touchés par ces mutations politiques suite à plusieurs jours de violence, dont les ressources en devises dépendaient grandement du tourisme, telles l’Egypte et la Tunisie. Il conseille aux nouveaux gouvernements de ces pays de répondre aux besoins immédiats de leurs populations tels les produits alimentaires et les carburants, alors que les cours mondiaux de ces derniers connaissent une importante hausse.
Cette situation créera des défis à relever en termes de subventions, lesquelles auront un impact sur les budgets de ces pays. Selon ses estimations, les subventions des prix des produits de première nécessité coûteront aux pays de la région l’équivalent de 3% de leurs PIB respectifs, et la croissance économique devra être révisée à la baisse pour la région sauf pour les pays exportateurs de pétrole.
Y. S.
Le FMI parle de pénurie pétrolière
Le marché pétrolier mondial est entré dans une phase de raréfaction de la ressource due à la poussée de la demande de pétrole dans les pays émergents et à la décélération tendancielle de la croissance de l’offre pétrolière, selon le Fonds monétaire international (FMI). Une situation conjoncturelle ? Beaucoup plus grave que cela. Il s’agirait d’une crise persistante de l’offre qui aurait pour effet d’amplifier les mouvements de capitaux mondiaux et de creuser les déséquilibres extérieurs courants, note le rapport sur les perspectives de l’économie mondiale publié
à l’approche des réunions de printemps du FMI et de la BM, prévues du 15 au 17 avril à Washington. Pour le Fonds, les politiques devraient viser à faciliter «l’adaptation» à une évolution inattendue de la pénurie pétrolière et à diminuer les risques associés à une raréfaction plus importante que prévu de la ressource à moyen terme. L’institution de Bretton Woods explique que la hausse récente des cours du pétrole indique que le marché pétrolier mondial est entré dans une phase de raréfaction causée par les effets contradictoires de l’accélération de la croissance de la consommation mondiale de pétrole due à l’essor des pays émergents et des blocages de l’offre, qui ont entraîné un ralentissement de la croissance de la production pétrolière. Une situation plus complexe, semble-t-il, que celle qu’avait connue le marché en 2008. En juillet 2008, les cours du baril de brut avaient atteint un record à plus de 147 dollars à New York et à Londres. Une tendance qui s’est effilochée : les prix sont redescendus, mais pas pour longtemps. Les cours ont de nouveau dépassé les 100 dollars en janvier dernier à Londres et en février à New York. Et il n’est pas exclu qu’ils s’envolent, au cas où la situation en Libye empirait.