Le déficit commercial s’accentue en 2015, Le spectre du retour à l’endettement plane

Le déficit commercial s’accentue en 2015, Le spectre du retour à l’endettement plane

Le déficit de la balance commerciale s’accentue en 2015. Engrangeant moins de revenus d’exportation et donc des réserves de change qui fondent, le déficit budgétaire s’aggravant, le risque de retour à l’endettement planant, l’Algérie est dans une situation critique. 

Selon le Centre national de l’informatique et des statistiques (Cnis, relevant des Douanes algériennes), les exportations de l’Algérie se sont établies durant les quatre premiers mois de l’année à 13,4 milliards de dollars contre 22,72 milliards de dollars à la même période de l’année 2014. Soit une baisse de plus de 41% des exportations.

Quant aux importations, le Cnis indique un volume de 17,73 milliards de dollars contre 19,32 milliards de dollars durant la même période de l’année écoulée, en baisse de 8,26%. Ainsi, la balance commerciale a enregistré un déficit de 4,32 milliards de dollars entre janvier et avril 2015 contre un excédent de 3,4 milliards de dollars, les exportations ne couvrant que 76% de ces importations contre 118% à la même période de l’année 2014.

Dans la mesure où les cours du pétrole ont été assez baissiers, fluctuant autour de 50 à 60 dollars le baril, et que les quantités exportées ont été moins importantes, les exportations d’hydrocarbures seront établies à 12,54% milliards de dollars contre près de 21,93 milliards de dollars durant la même période de comparaison, en recul de 42,83%.

Or, le déficit commercial risque encore de s’aggraver en 2015. Il pourrait être estimé à hauteur de 15, voire 20 milliards de dollars, si la tendance à la baisse des cours, des recettes et des quantités d’exportation se poursuit.

Ainsi, les exportations d’hydrocarbures pourraient s’établir à hauteur de 30 à 40 milliards de dollars à la fin de l’année, tandis que les importations pourraient atteindre un volume de l’ordre de 55 milliards dollars. Sans omettre un déficit également important de la balance des services.

En d’autres termes, l’Algérie engrangera moins de réserves de change, celles-ci risquant de fondre d’au moins 20 milliards de dollars à la fin 2015. De fait, la pression sur la balance des paiements sera accrue, considère l’économiste et spécialiste des questions énergétiques, Mustapha Mékidèche. Néanmoins, le plus préoccupant, selon ce dernier, concerne la politique budgétaire.

Déjà accentué en 2014, le déficit du budget devrait s’accroître davantage durant les prochains mois, aux alentours de 40% du produit intérieur brut (PIB, la richesse nationale). Ce déficit s’accentuera fortement si l’actuelle politique budgétaire (dépenses publiques, transferts sociaux…) est maintenue.

En effet, il ne pourra être résorbé qu’en puisant dans les disponibilités du Fonds de régulation des recettes (FRR). Alimenté par la fiscalité pétrolière non budgétisée, le FRR a été déjà utilisé pour compenser le déficit en 2014 et en 2015 et risque à terme de «s’épuiser», avertit Mustapha Mékidèche. D’où la nécessité, considère cet économiste, de mesures idoines pour inverser la situation et de s’interroger sur la possibilité ou non d’arbitrages budgétaires dans le cadre de la loi de finances complémentaire pour 2015 annoncée.

Or, à moins de prendre des mesures de rationalisation budgétaire, de lancer des réformes sur le plan fiscal, monétaire et financier notamment et de stimuler l’investissement direct étranger et l’apport de devises, observe cet expert, la capacité de l’Algérie à maintenir son rythme de dépenses publiques, financer son programme de développement social et économique et préserver son épargne s’avère incertaine, voire nulle à terme. D’où le risque du retour à l’endettement d’ici quelques années, faute de capacités financières suffisantes en monnaie nationale locale, la dette publique interne s’aggravant.

Un endettement dont les conditions seront de surcroît draconiennes, non-avantageuses pour l’Algérie, selon Mustapha Mékidèche. Ce qui implique en somme une réactivité autre des pouvoirs publics, de l’establishment économique et de la société. Cela même si le retour à l’endettement ne constitue pas en soi une fatalité, considère un autre économiste et statisticien.

Estimant que la conjoncture baissière actuelle était prévisible au regard de l’évolution des cours de l’or noir, des prix plutôt économiques que spéculatifs selon lui, ce statisticien admet que cette baisse soit inopportune pour le financement des programmes de développement comme il n’écarte pas une baisse des réserves de changes plus importante que celle enregistrée en 2014, de l’ordre de 30 à 50%.

Pour autant, c et économiste estime que le recours à l’endettement ne sera pas contraignant, l’Algérie devant «aller à l’international» en bénéficiant de conditions avantageuses selon lui. Voire, le retour à l’endettement serait positif dans la mesure où il pourrait impulser davantage de dynamique économique, tant au niveau du secteur public que dans le privé.

Engrangeant moins de revenus d’exportation et donc des réserves de changes qui fondent, le déficit budgétaire s’aggravant, le risque de retour à l’endettement planant, l’Algérie est ainsi dans une situation critique, incertaine.

C. B.