C’est une tripartite de campagne que le gouvernement a organisée. En dépit d’une dévaluation continue du dinar, d’une inflation accélérée, d’une augmentation décidée des tarifs de carburant et d’électricité, l’Exécutif conteste la baisse du revenu réel du citoyen. Et tout en se délestant de projets programmés, il atteste que la baisse des revenus pétroliers est sans effet sur le budget. Et malgré la règle des 51/49%, le ministre prédit au pays un avenir de “mecque des IDE”. Parole du FMI et de la Banque mondiale, assure-t-il !
Ce n’était pas utile de réunir une tripartite pour dire que tout est dans la loi de finances complémentaire pour 2015 et dans le projet de loi de finances pour 2016 !
Impuissant à rassurer sur le plan de la gouvernance, le pouvoir, pour se défendre, se rabat sur ce qu’il sait faire de mieux : tenter de museler toute expression critique ou toute proposition d’alternative au régime de la faillite. L’argumentaire est vieux comme la dictature et Ouyahia l’a exhibé une nouvelle fois ce week-end : des dangers extérieurs et intérieurs “guettent” le pays et toute remise en cause de l’ordre en place est assimilée à cette menace qui pèse sur lui. Il n’a pas hésité à qualifier l’opposition légale de “danger” pour le simple fait qu’elle plaide pour une “transition”. Dans son réquisitoire, il a accablé de malveillance tous ceux qui contestent et critiquent. Tous, sauf Madani Mezrag dont l’effort de modération sémantique a, semble-t-il, suffi à atténuer l’affront fait à la plus haute institution de l’État. Alors que Ferhat M’henni, qui n’a jamais tenu une arme ni recouru à l’offense et use, somme toute, de méthodes démocratiques dans sa revendication, est accablé de trahison !
En tout état de cause, aucun motif ne semble l’emporter quand il s’agit de contester la gestion autoritaire dont le pays souffre. Pas même les péripéties troubles du statut de propriété du complexe d’El-Hadjar. Il n’y a pas longtemps, Ouyahia appelait à ce qu’on apprenne, enfin, à dire la vérité au peuple. En ordonnant ainsi, sous la menace, à tout le monde de se taire, il montre qu’il n’a pas mis beaucoup de temps à réintégrer la nature du système absolutiste pour qui la seule vérité que le peuple doit entendre est la vérité du régime.
Étrangement, et dès le lendemain, Saâdani, son allié, a employé le même ton accablant à l’encontre des opposants du FLN. Tout laisse croire que la compétition à l’intérieur du régime prend des allures de concours du plus agressif dans la défense de la stabilité du régime. Un régime qui a décidé de se confondre avec la nation et de mettre au ban de la patrie tous ceux qui le contestent.
Le véritable danger vient en fait de la perte de sang-froid du régime qui n’a plus d’autre moyen de s’imposer que la méthode de l’exclusion.