Quelque 250 000 AlgĂ©riens ont pu s’acheter une voiture par le moyen du crĂ©dit auto depuis son institution en 2005, soit en moyenne 60 000 clients par an, selon des sources bancaires.
Cela reprĂ©sente en rĂ©alitĂ© quelque 90% de l’ensemble des crĂ©dits Ă la consommation distribuĂ©s par les banques, dont le nombre avoisine les 280 000 unitĂ©s.
Il faut dire que la demande de crédit auto a connu annuellement une évolution de quelque 30% depuis son lancement, il y a 4 ans.
Ainsi, avec la suppression de ce crédit décidée à la faveur de la loi de finances complémentaire 2009, ce sont donc près de 60 000 demandeurs potentiels qui sont exclus annuellement du crédit auto.
La mĂŞme source a rĂ©vĂ©lĂ© que le marchĂ© du crĂ©dit Ă la consommation est estimĂ© Ă près de 100 milliards de dinars, alors que le marchĂ© bancaire s’Ă©value Ă quelque 2600 milliards de dinars.
C’est dire la très faible part qu’occupe ce type de crĂ©dit dans le portefeuille global des banques de la place.
En outre, le gouvernement a mĂŞme osĂ© un argument d’une fragilitĂ© extrĂŞme pour motiver sa dĂ©cision : le surendettement des mĂ©nages.
Sauf que cet argument, au regard des statistiques bancaires, ne tient pas la route.
Selon nos sources toujours, le taux d’impayĂ©s, comme instrument de mesure du surendettement, ne dĂ©passe pas les 10%.
Ce qui, selon les banquiers, reste un taux marginal du fait que les les consommateurs algériens sont de « bons » payeurs.
Ce qui veut dire, en d’autres termes, que la majoritĂ© Ă©crasante des mĂ©nages qui avaient contractĂ© des crĂ©dits Ă la consommation se sont acquittĂ©s de leurs crĂ©dits et, de ce fait, ils ne sont plus en situation d’endettement.
L’argument du ministre des Finances paraĂ®t court et est vite battu en brèche. Le gouvernement devrait alors chercher ailleurs les raisons de sa dĂ©cision pour mieux convaincre.
Par ailleurs, si les consommateurs payent lourdement les conséquences de cette mesure, les concessionnaires automobiles, eux, ne sont pas en reste.
L’impact est tel qu’ils sont appelĂ©s Ă revoir leurs ambitions Ă la baisse. Le prĂ©sident de l’Association des concessionnaires automobiles d’AlgĂ©rie (AC2A), Mohamed BaĂŻri, le confirme et parle d’une baisse de ventes qui avoisinera les 40%.
« Nous sommes en train de rĂ©colter les informations auprès des concessionnaires pour mieux mesurer l’impact rĂ©el sur le marchĂ© de l’automobile. Une chose est sĂ»re, nous allons constater une baisse sensible des ventes, elle atteindra facilement les 40% », a-t-il assurĂ©.
Il a regretté cette mesure « hasardeuse » prise sans associer son organisation. Son propos est appuyé par ses confrères.
Toyota Algérie, qui occupe la troisième position en termes de ventes durant les sept premiers mois de 2009, va connaître une baisse de 15 à 20%, selon le représentant de la marque en Algérie, Nouredine Hassaim.
Il estime que la suppression du crĂ©dit automobile va engendrer, en plus de la baisse des ventes, « le retour en grâce du marchĂ© de l’occasion. Les AlgĂ©riens, pour qui la voiture est une nĂ©cessitĂ©, vont devoir se rabattre sur le vĂ©hicule vieux et usĂ©. Ce qui va inĂ©luctablement provoquer une hausse des prix des vĂ©hicules d’occasion et c’est dĂ©jĂ fait », assure-t-il.
Selon M. Hassaim, cette mesure va « favoriser les constructeurs europĂ©ens en raison de la proximitĂ© gĂ©ographique, ce qui rĂ©duira le coĂ»t du transport. Aussi, il faut dire que beaucoup d’AlgĂ©riens vont se diriger vers le marchĂ© europĂ©en, français notamment, pour s’acheter des vĂ©hicules », argue-t-il.
Omar Rebrab, représentant du groupe Hyundai, qui se place en seconde position après Renault cette année, abonde dans le même sens : « Il est clair que cette mesure profite aux constructeurs européens ».
Pour ce qui est de l’impact de la suppression du crĂ©dit auto sur les ventes de Hyundai, il a indiquĂ© : « On ne va pas vraiment ressentir le coup, car les ventes Ă crĂ©dit ne sont pas tellement importantes. MĂŞme si on connaĂ®tra une baisse, elle ne sera pas Ă©norme. Elle devrait ĂŞtre de l’ordre de 10% ».
Les pertes seront plus importantes pour le concessionnaire Sovac, par contre. Selon son représentant, Mourad Oulmi, elles atteindront les 30%. Des pertes énormes, estime-t-il.
« Nous devrons faire avec. De toute manière, les clients vont trouver d’autres moyens d’acquĂ©rir une voiture », a-t-il ajoutĂ©.
En somme, il convient de signaler que, au vu des statistiques citĂ©es, la suppression du crĂ©dit Ă la consommation est synonyme d’annulation du crĂ©dit auto, tandis que les importations de vĂ©hicules seront toujours le fait des concessionnaires qui auront comme clients les marchĂ©s publics, les entreprises ou les nantis.
En un mot, la suppression du crĂ©dit auto signifie l’exclusion du crĂ©dit des bourses moyennes.
Hacen Ouali