La présidence de la République a tenté, via un communiqué de presse publié avant-hier, de justifier les changements opérés dernièrement au sein du Département du renseignement et de la sécurité (DRS) comme étant un symbole éclairant de la réforme de l’Etat.
Le communiqué, comme pour appuyer cette thèse, a annoncé que cette réforme était dans les tiroirs depuis 25 ans. C’est-à-dire bien avant la naissance du DRS et sous le pouvoir de Chadli. Alors une question fort légitime se pose. Doit-on comprendre que la réforme du renseignement était un grand chantier de l’Etat en 1990 ?
Que l’ex-patron du DRS était, depuis sa nomination à ce poste en 1990, juste en intérim et que ses supposés pouvoirs étaient surfaits ? Qui veut-on leurrer ? Pourquoi dès lors attendre plus d’un mois après le départ à la retraite de l’ex-patron du DRS, Mohamed Mediene, alias Toufik, annoncé dans une laconique dépêche, pour faire admettre (à qui ?) que son départ n’est lié à aucune purge ou règlement de comptes et qu’il entre dans un schéma fort établi depuis longtemps.
Or, selon quelques indiscrétions, le deuxième communiqué « était fin prêt » depuis le jour de l’annonce du départ du général-major. Qui a décidé de le « geler » et pour quelles raisons d’Etat a-t-on décidé de séparer le deuxième texte du premier ?

Selon un observateur averti, le président Bouteflika, rompu aux manœuvres, est coutumier de cet usage. Il ne s’avance jamais à visage découvert. Il lance d’abord la nouvelle et attend en retour les échos provenant surtout de l’extérieur pour amorcer la deuxième étape, celle de la « normalisation ». Ainsi le chef de l’Etat joue sur du velours et se donne une certaine marge de manœuvre pour entourer cette opération.
Déjà en 2001, lors des évènements de Kabylie, il avait suggéré à son chef du gouvernement de l’époque, Ali Benflis, de partir à l’assaut de la citadelle APN, qui était contre l’officialisation de tamazight, pour inverser la tendance et en retour il publierait un communiqué annonçant l’officialisation de tamazight.
Plus d’un mois s’était écoulé et aucune réaction du chef de l’Etat. Il a fallu un conciliabule de quelques jours au plus haut sommet de l’Etat pour que le Président daigne enfin signer l’officialisation de tamazight.
Le deuxième communiqué de la présidence de la République a fait réagir deux personnalités-clés du système. Ahmed Ouyahia, chef de cabinet de la présidence (auteur du communiqué ?) et accessoirement SG du RND, et Amar Saadani, SG du FLN, parti majoritaire. L’un comme l’autre n’ont pas la même lecture des changements au sein du DRS.
Si pour Saadani, grand pourfendeur de Mohamed Mediene, ces changements sont la suite logique des réformes en profondeur engagées par le président Bouteflika pour la construction d’un Etat civil, le patron du RND s’est dit, lui, « étonné » des interprétations données aux changements opérés par le chef de l’État au sein des services du renseignement : « Qui aurait imaginé que le président voulait casser ce département ? », a-t-il affirmé, battant en brèche la thèse de Saadani. Ouyahia a tenu à ajouter que ces réformes étaient entamées depuis plusieurs années et ont concerné d’abord le secteur de la justice avant d’être élargies à d’autres domaines pour toucher le DRS ».
Le deuxième texte de la présidence de la République a également coïncidé avec la montée au créneau du vice-ministre de la Défense et chef d’état-major de l’armée, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah, qui a mis en garde contre « les dangers » émanant de l’extérieur et de l’intérieur.
Le général Ahmed Gaïd Salah, en visite hier au siège de la deuxième région militaire à Oran, a jugé « primordial que les troupes soient au courant des dangers engendrés » par les changements dans le monde. Dans la foulée, il a mis en garde contre « toute tentative de division » de l’Algérie. A qui s’adressait cet avertissement ? A l’évidence quelque chose se prépare contre le pays, selon le message crypté de Gaïd Salah.