Le combat d’Aminatou Haider et les œillères marocaines

Le combat d’Aminatou Haider et les œillères marocaines

Qui sème la répression récolte la tempête de l’indignation

Au 29e jour de la grève de la faim, la «Ghandi sahraouie» a conquis le monde convaincu de la justesse de son «combat non violent» et de l’universalité des droits de l’homme soumis à l’épreuve du droit au retour jugé inaliénable et imprescriptible à l’exclusion de la logique répressive et discriminatoire des Etats coloniaux anachroniques du Machrek et du Maghreb.

Lors de la célébration de la journée internationale des droits de l’homme, commémorant les 60 ans de la déclaration universelle, le message d’Aminatou Haider affirme les convictions pleinement assumées. «Aujourd’hui, comme chaque jour qui passe, écrit-elle dans une lettre ouverte, je souffre, en pensant à mes compagnons emprisonnés. Je souffre en pensant également aux 7 militants des droits de l’homme qui, par décision arbitraire du gouvernement marocain, vont comparaître devant un tribunal militaire et qui risquent la peine de mort.

Je pense également à la population sahraouie, opprimée et réprimée quotidiennement par la police marocaine dans les territoires occupés ». Dans ce lien charnel entre le combat d’Aminatou Haider et la réalité du fait national sahraoui occulté, le drame de Lanzarote participe à éclairer davantage sur le caractère liberticide d’un royaume accroché aux chimères du « Grand Maroc » et érigeant le mur de l’indifférence au drame de Lanzarote après avoir dressé le « mur de la honte ».

La dérive coloniale n’a plus aucune limite : la répression tous azimuts de l’Intifada dans les territoires occupés, les arrestations systématiques comme ce fut le cas à l’aéroport, en octobre dernier, du groupe des 7 (Ali Salem Tamek, Brahim Dahane, Ahmed Naceri, Idagja Lachgare, Salah Loubbihi, Yahdith Ettarouzi et Tachid Seghayer), le refoulement des 6 Sahraouis (Sidi Mohamed Dadach, Larbi Messaoud, l’étudiante éborgnée Soultana Khaya, Ahmed Sebaï, Brahimi Smaïli et Attigo Barray) empêchés de regagner le Sahara occidental de retour d’un voyage effectué en Mauritanie. En pleine tourmente de Lanzarote, la militante des droits de l’homme, El-Ghalia Dejini, a été empêchée de rencontrer la leader espagnole de l’UPD (Union, progrès, démocratie) venue lui transmettre une lettre de la Ghandi sahraouie adressée à ses enfants.

Loin d’être un « acte isolé », le combat d’Aminatou Haidar a brisé le mur du silence de la communauté internationale fortement mobilisée pour défendre le droit au retour et la nécessité d’un règlement de la question sahraouie. Confiné dans un splendide isolement, concrétisé par l’avertissement européen, l’implication du Département US, l’indignation de l’Union africaine et des ONG et les appels adressé par le président Mohamed Abdelaziz aux memebres du Conseil de sécurité, le Maroc a irrémédiablement perdu la bataille des droits de l’homme et, conséquemment, le soutien de certaines puissances à l’image du PSOE qualifiant d’«inadmissible» la position de Rabat et revendiquant ouvertement la nécessité d’un «règlement juste et définitif devant respecter l’autodétermination».Indéniablement, cette avancée sert la cause sahraouie confortée par la vague de solidarité internationale.

Elle permet en outre de montrer l’absence de volonté de paix et la mauvaise foi de Rabat tenu désormais responsable des conséquences du drame de Lanzarote. Dans son message à l’ONU, le représentant sahraoui, Mohamed Boukhari, a clairement indiqué que la relance du processus de négociations «ne se fera pas sur le cadavre d’Aminatou Haider». L’heure du choix a largement sonné.

Larbi Chaâbouni.