L’article 270, dans ses alinéas 1 et 2, fait état de privation des droits civiques et politiques à l’encontre des auteurs de maltraitance des femmes, lorsqu’il est résulté des coups et blessures volontaires, voies de faits ayant engendré une incapacité de travail de plus de 15 jours.
«La violence, une violence sous diverses formes, contre les femmes, prend de l’ampleur. Il y a même des cas de décès et il y a eu un développement au niveau des armes utilisées ».
Ce constat est partagé par les médecins légistes et les associations de soutien aux femmes battues ou en détresse. On ne compte plus les appels de détresse des femmes qui subissent à longueur d’année des sévices émanant du mari, du père et même des frères pour une raison ou une autre. Un tabou tenace est brisé.
Depuis quelques années, de plus en plus de femmes victimes de violence, notamment conjugale, prennent leur courage à deux et dénoncent l’auteur de la maltraitance. Des enquêtes réalisées par certaines associations d’aide aux victimes de brutalités, très actives sur le terrain, contribuent fortement à une prise de conscience de l’opinion publique.
Cependant, le poids des mentalités fait que les avancées se font à petits pas dans ce domaine. Il reste que les chiffres fournis par diverses sources font état d’une hausse d’année en année de la violence conjugale. Les témoignages des victimes se ressemblent.
Des coups reçus sur les différentes parties du corps de la malheureuse, des blessures et des pleurs en silence dans le foyer conjugal. Les plus téméraires font un saut à l’hôpital et se font délivrer un certificat par le médecin légiste et tout s’arrête, pour la plupart d’entre-elles, à ce niveau.
Qu’est-ce qui les retient de faire respecter leurs droits ? Les enfants, leur avenir, les qu’on-dira-t-on d’une société qui voit d’un mauvais œil une femme porter plainte contre le mari, le père ou le frère ou peut-être un système judiciaire laxiste qui ne défend pas leur droit.
Pour Me Fatma Zohra Filalia Benbraham, « le phénomène des femmes battues ne touche pas seulement les femmes fragiles socialement, il touche les femmes quel que soit leur niveau ou statut », soulignant que « c’est un phénomène international auquel on n’a pas trouvé de solution ».
Selon cette avocate, le phénomène baisserait en intensité si « on apprenait aux gens à discuter », expliquant que « la violence contre les femmes est générée par des causes endogènes et exogènes », et qu’ « il faut la comprendre et la canaliser ». Elle regrette dans ce sens qu’il n’y a pas de « support », déplorant aussi le fait que « l’Etat ne fait rien ».
Il reste que Me Benbraham s’élève contre les avis émis par certains de ses confrères qui estiment que les textes de loi qui considèrent que les coups et blessures sont considérés comme un délit puni d’une peine qui peut aller jusqu’à 10 années de prison quand il y a préméditation ou port d’armes (article 266 du code pénal), sont insuffisants pour enrayer la violence à l’égard des femmes, surtout que les victimes, par peur du divorce, d’une vengeance, hésitent souvent à porter plainte.
Pour elle, « la loi n’est pas appliquée dans toute sa rigueur », relevant qu’« aucun magistrat n’a pensé à appliquer l’article 270 du code pénal amendé par l’ordonnance 75 /47 du 17 juin 1975″. Elle se dit convaincue que si « cet article est appliqué à la lettre, les hommes y réfléchiraient à deux fois avant de maltraiter la femme ».
Que dit cet article ? Outre les peines privatives qui varient entre au moins 3 ans et plus de 10 ans, l’article 270 dans ses alinéas 1 et 2, fait état de privation des droits civiques et politiques à l’encontre des auteurs de maltraitance des femmes, lorsqu’il est résulté des coups et blessures volontaires, voies de faits ayant engendré une incapacité de travail de plus de 15 jours.
En clair, les condamnés pour violences contre les femmes sont interdits d’être électeurs, éligibles, de porter toute décoration, d’être assesseurs, experts en général, de servir de témoins, de jurés, de déposer en justice autrement que pour les renseignements et d’interdiction d’exercer de certaines fonctions.
Me Benbraham est convaincue que l’application de cet article dans ses deux aliénas par les magistrats atténuerait grandement le phénomène de la violence contre les femmes. Elle interpelle dans ce sens le ministre de la Justice à instruire les juges à appliquer dans toute sa rigueur l’article 270 dans ses alinéas 1 et 2. Les textes de loi promulgués à ce jour protègent suffisamment les droits de la femmes battue, a-t-elle certifié.
Sadek belhocine