Le ciment était vendu à 800 DA le sac au marché parallèle

Le ciment était vendu à 800 DA le sac au marché parallèle
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Cinq cimenteries impliquées dans un scandale qui a perduré durant trois ans.

Un nouveau scandale vient ébranler le secteur fragile de la cimenterie en Algérie. Plus de 265.000 tonnes de ciment, d’une valeur globale de plus de 169 milliards de centimes ont été détournées à des fins spéculatives depuis 2007, indiquera le colonel Mohamed Tahar Benaâmane, chef d’état-major du 5e Commandement régional de la gendarmerie nationale (CRGN), à Constantine.

Cette même quantité détournée sur la base de faux dossiers et de registres du commerce a été écoulée sur le marché informel pour près de 400 milliards de centimes au prix de 800 DA les 50 kilogrammes de ciment, ce qui a rapporté aux spéculateurs un gain net de plus 228 milliards de centimes. Des sommes colossales qui ont ouvert aux spéculateurs les portes de la richesse d’une manière facile et rapide.

Une perte sèche pour l’économie nationale. Avec une quantité pareille, l’Etat aurait pu réaliser près de 9.000 logements sociaux de type F3 avec toutes les commodités nécessaires, et inclure ce nombre de logements au programme quinquennal, ajoutera le haut gradé qui dira que ces calculs ont été effectués sur la base des besoins d’un logement F3 en ciment. Un logement « consomme » 30 tonnes de ciment.

LG Algérie

Le conférencier précisera que cette affaire de détournement a éclaté après que le Commandement régional ait été destinataire d’une information importante, faisant état de la présence de plusieurs personnes impliquée dans le détournement de milliers de tonnes de ciment à des fins spéculatives en triplant le prix du sachet du ciment pour le mettre au prix de 800 DA, alors que son prix réel ne dépasse guère les 320 DA.

En effet, les mis en cause spéculaient sur le prix du ciment au niveau de plusieurs cimenteries de l’Est du pays, il s’agit de la cimenterie de Aïn Touta, à Batna, El Maa Labiedh, à Tébessa, Hadjar Essoud, à Skikda, Aïn El Kebira, à Sétif, et Hamma Bouziane, à Constantine. Informations confirmées, le Commandement régional donnera des instructions bien précises au Groupement des cinq wilayas pour la création de groupes d’enquêteurs afin d’interpeller les personnes impliquées dans cette « opération » spéculative à grand échelle. Des spéculations ayant porté énormément préjudice à l’économie nationale, particulièrement aux cimenteries.

L’enquête des gendarmes, qui a duré un peu plus de six mois, a permis d’identifier pas moins de 258 personnes impliquées, dont des cadres des cimenteries incriminées, des entrepreneurs originaires du Sud du pays et des grossistes et détaillants dans la vente de matériaux de construction.

Lors des investigations, il a été relevé 13 chefs d’inculpations contre les personnes impliquées, création d’associations de malfaiteurs, faux usage de faux, escroquerie, non dénonciation de crime, usurpation d’identité, rédaction de faux rapports, spéculation illégale sur le prix du ciment, évasion fiscale, défaut de registre du commerce, et utilisation de faux cachet de l’Etat.

L’enquête close, les représentants de la loi ont présenté devant la justice les 258 personnes impliquées parmi lesquelles 42 ont été placées sous mandat de dépôt (5 hauts cadres des 5 cimenteries, deux banquiers, 27 entrepreneurs et 8 artisans et chômeurs), 88 ont été placées sous contrôle judiciaire et 93 ont bénéficié de la liberté provisoire, en attendant leur jugement. Notre source indiquera que 35 autres mis en cause se trouvent toujours en cavale.

Par ailleurs, à l’issue de l’enquête et la mise hors d’état de nuire des groupes spéculateurs, le prix du ciment a connu, une nouvelle fois, une baisse pour se vendre sur le marché national au prix de 340 DA. Lors de l’enquête des auxiliaires de la justice, il a été relevé 207 dossiers falsifiés déposés par des entrepreneurs pour l’achat de grandes quantités de ciment. Ces derniers, pour ouvrir droit à de telles quantités, faisaient croire, avec une complicité interne, qu’ils étaient sur le point de réaliser de grands projets de logements dans le Sud du pays.

« Notre travail a donné ses fruits non seulement en matière de neutralisation des personnes ayant porté atteinte à notre économie, mais nous avons à travers notre enquête permis aux cimenteries de durcir les mesures de commercialisation de ce produit pour éviter, un tant soit peu, les arnaques et autres détournements », conclura le colonel Benaâmane.

La quantité de ciment obtenue de manière illégale auprès des 5 cimenteries de l’est du pays, et vendue sur le marché parallèle, suffirait à subvenir aux besoins de la construction de près de 9.000 logements de type F3.

L’enquête diligentée par la gendarmerie nationale a permis d’appréhender et de présenter devant la justice, 258 suspects dont 42 ont été écroués, 88 placés sous contrôle judiciaire tandis que 93 autres ont bénéficié de la liberté provisoire.

Les quantités totales de ciment soustraites illégalement au cours des trois dernières années, au niveau des cimenteries de Ain El Kebira (Sétif), Hadjar Essoud (Skikda), Hamma Bouziane (Constantine), Ain Touta (Batna) et El Ma Labiad (Tébessa) sont estimées à plus de 265. 000 tonnes, représentant un coût de 1,7 milliard de dinars environ.

Cette spéculation qui a permis aux mis en cause, dont 5 cadres activant dans les cimenteries concernées, 2 fonctionnaires de banque, 27 entrepreneurs et 8 artisans sans emploi, de s’enrichir  »démesurément et illégalement », en cédant cette quantité au prix du marché noir estimé, en moyenne, à 750 dinars le sac de 50 kg, au lieu de son prix légal de 320 dinars, réalisant un bénéfice net de plus de 2,28 milliards de dinars, a ajouté le colonel Benaâmane. S’agissant de l’impact de cette enquête, qualifiée  »d’investigation de longue haleine ». Cette opération a  »permis de rééquilibrer le prix du sac de ciment de 50 kg à son seuil réel qui ne dépasse pas les 320 dinars, d’assurer une disponibilité suffisante de ce matériau de construction sur le marché et de conduire les responsables des cimenteries à prendre des mesures plus rigoureuses et surtout plus  »hermétiques » aux éventuels spéculateurs pour la préservation et la protection de l’économie nationale.

Le bilan des activités des unités relevant des compétences territoriales du commandement pour les trois premiers trimestres de l’année 2010 a été également présenté.

Ce territoire s’étale sur 80.726,69 km2, comprenant une bande frontalière avec la République tunisienne longue de 486 km et une façade maritime de 488 km, a relevé le même officier supérieur, précisant que la compétence du commandement couvre 15 wilayas de l’Est du pays grâce à la présence de 439 brigades, soit une moyenne d’un gendarme pour 500 habitants.