Pendant que le pouvoir tergiverse sur la normalisation de la vie politique, les islamistes radicaux complotent pour semer le chaos, espérant ainsi accéder au pouvoir par la voie de la violence en s’associant au diable s’il le faut pour atteindre leur objectif, même au prix de notre souveraineté nationale.
Le mouvement islamiste attend en embuscade pour profiter de la situation. Comme en 1988.
Les signes pour la reconduction du statu quo à l’occasion des présidentielles de 2014 se précisent de jour en jour. Bouteflika, sans se prononcer ouvertement sur son éventuelle candidature, est déjà en train de défricher le parcours par une campagne électorale non avouée, pour une reconduction certaine du statu quo. Laissant entrevoir en perspective une trajectoire parsemée de lièvres en quête de seconds rôles. Même Benflis et Hamrouche ou d’autres nantis du système n’auront aucun pouvoir réel pour agir au profit du changement, s’ils sont amenés à se porter candidats pour pallier une éventuelle défection de Bouteflika. Benbitour, déjà parti en campagne, même s’il venait à être élu d’une façon ou d’une autre, serait inévitablement acculé à une inconfortable imposture qui, pour pouvoir appliquer son riche programme de sortie de crise partielle, sera dans l’obligation de faire des concessions essentielles au nationalisme conservateur promu par les militaires, qui n’aura aucune incidence sur le système de pouvoir. Reste à savoir, si Benbitour est disposé à jouer le jeu du pouvoir. Dans ce cas de figure, cela permettra néanmoins d’atténuer les tensions sociales et de rétablir une confiance relative dans la conscience collective. Face à ces éventualités, il y a les islamistes radicaux, qui sont embusqués en complotant sous couvert de la CNDDC pour semer le chaos à travers un soulèvement populaire, en espérant prendre ainsi le pouvoir par la violence avec l’aide des puissances impérialistes, embusquées à leur tour, en guettant nos perclusions pour notre recolonisation.
À défaut de changement radical du système de pouvoir, donc, le statu quo profitera inéluctablement aux islamistes radicaux, qui s’activent sous couvert de la CNDDC pour semer le chaos en poussant la population à se révolter. Dans ce cas, un soulèvement populaire bénéficiera directement à un FIS dissous et toujours actif, qui va reprendre du service à cette occasion et ce sont les islamistes radicaux embusqués qui vont investir le terrain et semer le chaos. C’est surtout les forces impérialistes et leurs vassaux Arabes qui vont apporter leur soutien conséquent aux réseaux islamistes avec lesquels ils entretiennent déjà des relations de compromis et de promesses d’accès au pouvoir en perspective de la chute de la dictature algérienne. Leur soutien intéressé, qui n’est plus un secret pour personne, vise ouvertement à contrôler à leur compte les richesses nationales pour les Américains et la progression de leur projet de Califat pour les Arabes.
C’est une erreur de considérer que les Algériens se sont définitivement détournés de l’islamisme radical, comme le laissent entendre la presse et la propagande du pouvoir, et que les visées impérialistes n’auront pas de relais à l’intérieur du territoire national. D’ailleurs, c’est cette même presse qui fait aujourd’hui l’apologie du mouvement des chômeurs sans mesurer les conséquences de leurs actes. La population algérienne a été maintenue suffisamment longtemps sous l’emprise de l’idéologie religieuse par le discours officiel du pouvoir, véhiculé par les médias lourds, l’école et les mosquées, qu’ils n’auront aucune défense pour être manipulés et adhérer massivement à la propagande des nouveaux leaders du FIS dissous. D’autant que la population algérienne, fragilisée par l’état d’indigence et d’exclusion où elle a été acculée, serait facilement maniable pour s’engager dans la rébellion sans regarder qui est à sa tête. Il ne lui importe, dans la situation où elle a été réduite, que d’en découdre avec un pouvoir dont elle a consommé la rupture jusqu’à la lie.
C’est justement sur l’exploitation de cet état de fait que jouent les comploteurs contre la souveraineté nationale, pour pousser la population à se soulever, considérant que c’est le moment idéal pour agir. Un moment marqué par le pourrissement de la moralité du pouvoir, accablé par des scandales de corruption spectaculaires, qui a poussé la conscience populaire jusqu’à un écœurement excessif vis-à-vis de lui. Ce moment est aussi choisi par précipitation devant l’évolution de la situation politique récente qui laisse augurer une sortie de crise pacifique, qui sera néfaste pour leur projet de prise du pouvoir par la violence avec l’appui des forces impérialistes. Cette éventuelle sortie de crise, même partielle, est représentée par l’irruption sur la scène politique de l’initiative de changement initié par Ahmed Benbitour, qui laisse planer un probable « mouvement dans le statu quo ». Bien que rien n’est définitif à ce jour. La dernière décision du pouvoir à vouloir réviser la constitution unilatéralement, malgré les quatre « non » annoncés par le camp adverse de Benbitour, est un signe d’affirmation de son autoritarisme et de son hégémonisme, inconditionnels et non négociables, quelle que soit la pression exercée par ses adversaires. Cette position non négociable sur son hégémonisme sera renforcée par l’affirmation de l’étendue de son autoritarisme, qui a été annoncé par Sellal, affirmant que la révision de la Constitution sera illimitée, laissant entendre que le pouvoir est le seul maître devant les décisions à prendre, sans partage. Quant à la formalité du référendum en perspective, pour la validation de la révision constitutionnelle, est plutôt adressé à l’opinion internationale. C’est donc à un changement dans la continuité que Benbitour est convié s’il est amené à être élu dans le cas d’une défection de Bouteflika.
De toute évidence l’équation de la candidature de Benbitour a semé la panique chez les islamistes radicaux en les poussant à accélérer la mise en pratique de leur plan subversif. Confirmé par le fait que l’on assiste depuis début mars à une intensification du mouvement de contestation des chômeurs mené par la CNDDC sous leur influence, qui s’oriente de plus en plus vers la contamination d’autres mouvements syndicaux et de droit de l’homme acquis à leur cause, pour provoquer un soulèvement général de la population.
Il apparaît clairement que leur précipitation par l’intensification des révoltes des chômeurs vise à torpiller cette initiative en incitant la population au soulèvement généralisé, pour rendre inopérante une élection présidentielle qui leur serait fatale. La seule solution qui leur reste pour atteindre leur objectif serait de provoquer des conditions de changement par la violence. C’est ce qui explique leur grossière précipitation à semer le chaos en avançant un argument absurde. Celui de ne cesser leur révolte que si le pouvoir aura procédé à des réformes pouvant garantir l’amélioration des conditions socio-économiques des chômeurs. Ce qui est impossible à réaliser dans un court terme. En fait, ils lui demandent de réaliser à très court terme, ce qu’il n’a pas su ou put faire en cinquante ans de monopole de la gouvernance et même s’il se résout à jouer le jeu, il n’aura ni les moyens techniques, ni les conditions politiques pour le faire. De ce fait leur objectif est des plus clairs, ils veulent faire des révoltes des chômeurs du Sud un point de départ pour un soulèvement généralisé à l’échelle de tout le territoire national. Car, c’est par des formules religieuses qu’ils incitent les populations du Sud à se révolter, à l’occasion de leur compagne de sensibilisation en faisant du porte-à-porte, en précisant que leurs revendications ne sont que d’ordre socio-économique et non politique, sans garantie de résultat que de provoquer un climat de violence. Allant jusqu’au refus de l’invitation du pouvoir pour la négociation en exigeant du concret sur le terrain et dans l’immédiat, sachant que cela est impossible dans les conditions actuelles. Au lieu d’activer à la mobilisation citoyenne pour une initiation à la résistance politique pacifique et une politisation de la population, qui aura de fortes chances d’aboutir à un résultat à long terme. C’est donc à leur insu que les chômeurs sont instrumentalisés sournoisement par les islamistes.
Il faut aussi tenir compte du maillage de la population par un vaste réseau d’associations et d’organisations civiles, disséminées sur tout le territoire national et à l’étranger. Auquel il faut ajouter un réseau conséquent de journaux en ligne, des sites webs et des chaînes de télévision satellitaires, qui inondent en permanence l’espace médiatique par l’idéologie islamiste. Enfin, le levier qu’ils ont choisi pour leur offensive sur le terrain en infiltrant le mouvement des chômeurs encadré par la CNDDC, qui reçoit directement ses directives du noyau dur de ce mouvement islamiste radical. Il ne faut pas également oublier les réseaux dormants de Djihadistes, ceux qui étaient élargis par la Loi dite de la concorde civile, qui se comptent par milliers et qui sont prêts à reprendre du service dès que l’occasion se présente.
C’est à une situation à la libyenne que les comploteurs contre la souveraineté nationale veulent embarquer l’Algérie, même s’ils sont persuadés qu’elle ne pourra déboucher que sur une situation à la syrienne, étant donné la puissance militaire de l’ANP et des alliances géostratégiques de l’Algérie avec la Chine et la Russie. Mais les islamistes du FIS dissous ne s’embarrassent pas d’un éventuel échec d’accès au pouvoir pour le moment, c’est avec un esprit de la terre brûlée qu’ils s’entêtent à vouloir provoquer le chaos en Algérie. C’est surtout pour se venger de la frustration engendrée par leur privation de la consommation de leur victoire électorale en 1991, en espérant que le dénouement de la crise sera en leur faveur à long terme, par essoufflement du pouvoir sous la pression des forces impérialistes, comme cela est en train de se passer pour le régime syrien.
Youcef Benzatat