L’époque que nous vivions est une période de grave crise économique et de récession sans précédent depuis la crise de 1929, à un tel point que les citoyens de la planète Terre n’arrivent plus à joindre les deux bouts.
Paradoxalement, on n’a jamais autant joué aux jeux d’argent que lors de ce XXIe siècle à tel point que des sites de pari et de poker en ligne fleurissent un peu partout et se portent tellement bien qu’ils sponsorisent quelques-uns des plus grands clubs de football de la planète. Mais pour nous Algériens, c’est surtout l’épilogue de la partie de poker, commencée depuis plusieurs mois entre Eric Gerets et Abdelhak Benchikha et qui connaîtra son dénouement samedi soir dans le stade de Marrakech qui nous intéresse au plus haut point, car cette double confrontation algéro-marocaine contient tous les ingrédients sulfureux d’une partie de poker professionnel.
Tout d’abord, chaque joueur a reçu des cartes qu’il a eu le droit de changer à sa guise, comme par exemple les cartes Mesloub ou Benyamina rendue au croupier en échange des cartes Ferradj et Soudani ou encore les cartes Aït Fana et Souleymani rendue du côté marocain. Après la distribution des 23 cartes s’en est suivie une longue période de bluff des deux hommes par conférence de presse interposée. Mais maintenant, il ne s’agit plus de stratégie, seuls les atouts présents dans les mains des deux hommes feront foi samedi soir et malheur au perdant qui perdra définitivement pas seulement cette partie, mais tous les jetons de la CAN-2012. Ce qui perturbe Gerets et qu’il feint d’ignorer, c’est que dans son jeu, Abdelhak Benchikha dispose d’un carré d’as.
RAÏS OUAHAB MBOLHI :L’AS DE TREFLE
Qui aurait pu prévoir que ce jeune garçon, de mère algérienne et de père congolais, qui arpentait les cités et les stades de ses Hauts-de-Seine natales, en banlieue de Paris, réussirait, à force de travail et surtout de persévérance, après des passages à l’OM, au Japon, en Grèce, pour enfin trouver la stabilité en Europe de l’Est, à devenir un footballeur professionnel de talent. Pire encore, qui aurait pu prévoir, au soir du 18 novembre 2009, après que Faouzi Chaouchi, touché par la grâce, ait causé la perte des coéquipiers d’Ahmed Hassan et autres Aboutrika à lui tout seul, que six mois plus tard, lors du Mondial 2010, c’est le petit Mbolhi de la banlieue parisienne qui aurait rendez-vous avec un fabuleux destin à la Mehdi Cerbah ou à la Nasser Eddine Drid en éclaboussant de sa classe, et en mondovision, la planète football, l’espace d’un match Algérie-Angleterre, de sa cage du stade de Cape Town, alors que Chaouchi, le héros d’Oumdourman, n’aurait droit qu’à un destin à la Arconada, après sa «boulette slovène» de Polokwane. Ce soir-là, Mbolhi, après une minute trente de fébrilité somme toute normale pour quelqu’un qui se voit offrir une première titularisation en Coupe du monde et face à l’Angleterre s’il vous plaît, s’emparerait de la place de gardien numéro 1 de l’équipe nationale et deviendrait le gardien incontestable et incontesté jusqu’à aujourd’hui et écraserait la concurrence à son poste tel un cycliste échappé qui aurait 20 minutes d’avance sur le peloton à cinq kilomètres de l’arrivée d’une étape de plat, car il faut bien le reconnaître, même s’ils sont talentueux, Zemmamouche et Doukha sont encore loin de celui que la rue algérienne surnomme Spiderman. Dans la main de Benchikha, Raïs Mbolhi sera l’As de trèfle, car ce jeune homme ne laisse rien transparaître de ses émotions. On ne lit jamais rien sur son visage, ni inquiétude, ni fébrilité, ni joie et ni peine.
Il se contente de bien faire son «boulot» sans fioriture et sans plongeon. Et quel boulot, il suffit de regarder ses placements, ses plongeons, le positionnement de ses jambes, la manière sûre avec laquelle il capte le ballon pour le mettre dans la «niche» et surtout ses dégagements, pour comprendre que ce garçon, dans les centres de formation dans lesquels il est passé, a assimilé le cursus total de ce que l’on doit apprendre lorsqu’on est gardien de but de haut niveau. Si le nom de Mbolhi se retrouve dans le carré d’as, ce n’est pas par le fruit du hasard, c’est parce que comme face à l’Angleterre ou en Centrafrique et bien sûr à Annaba, face au Maroc, il est capable avec une seule intervention dont il a le secret, de changer le destin de l’équipe d’Algérie toute entière. C’est pour cela qu’il entrera ce soir sur le terrain et c’est pour cela que c’est notre As de trèfle.
MADJID BOUGHERRA :L’AS DE CARREAU
Magic, the Rock, the Warrior, si tous ces surnoms guerriers lui ont été donnés par des supporters britanniques pour qui le fighting spirit et le combat ne sont pas des mots pris à la légère, c’est parce que notre Madjid Bougherra met du cœur à l’ouvrage. C’est pour cette raison que nous l’avons choisi comme As de cœur. Sur le terrain, Madjid Bougherra est plus qu’un défenseur central, c’est plus que ce «déménageur» que décrivent les médias qui n’est sur le terrain que pour déménager les attaquants adverses de notre zone de vérité vers le rond central.
Bougherra, ce n’est pas la «masse sans cervelle» qu’ont voulu faire de lui les dirigeants du FC Gueugnon qui, à la manière du football français, adorent étiqueter des gens et les enfermer dans des cases. Bien au contraire, Madjid Bougherra, c’est l’alliance du physique et du mental, car si le spectateur lambda ne voit que le tacle ou la tête qui sauve un but tout fait pour l’adversaire, un observateur plus avisé et aguerri va, lui, voir toutes les anticipations de Bougherra dans sa zone de contrôle qui nous évite 80% de désagrément. En plus, Bougherra, avec ses confrontations avec Wayne Rooney cette saison en sont l’exemple parfait, a le don de «dégoûter» l’attaquant adverse, fusse-t-il le plus pugnace et le plus motivé par sa rage de vaincre qui fait qu’il ne lâche rien tant que l’arbitre n’a pas sifflé le coup de sifflet final. Cette rage de vaincre, Madjid l’a tient des années galères, à l’âge de 17 ans, lorsqu’il évoluait en DH à Longvic, dans la région de Dijon et qu’il espérait qu’on lui donne enfin sa chance. C’est cette rage de vaincre qu’il transmet à toute l’équipe et qui lui permet d’inscrire des buts et de débloquer ou sauver des situations difficiles à tout moment, qui lui vaut la place d’As de cœur dans le jeu de Benchikha.
HASSAN YEBDA :L’AS DE COEUR
Ce n’est pas le plus ancien des Fennecs, mais c’est celui qui a pris une importance capitale le plus rapidement. Dès sa première sélection, face au Rwanda, Hassan Yebda a démontré par A+B qu’il était désormais inamovible et indéboulonnable à son poste, à savoir le poste de milieu récupérateur, et que sauf blessure, les autres récupérateurs devraient se contenter de se battre pour la place restante.
Il ne faut pas oublier que si à une époque le poste stratégique, c’était celui d’ailier, aujourd’hui, et des joueurs comme Steven Gerrard le prouvent au quotidien, le poste clef du football moderne c’est celui qu’occupe Hassan Yebda. Il est partout, se bat sous tous les ballons à la manière d’un joueur sud-américain, avec ténacité, qui ne lâche rien aussi bien sur le plan défensif qu’offensif. Toujours la petite demie faute intelligente, toujours le petit tirage de maillot qui échappe à l’arbitre, la petite contestation pour laisser ses coéquipiers se replacer et bien sûr l’utilisation de «sa grande carcasse», son gabarit et ses longs bras qu’il utilise au maximum.
Sur le plan offensif, il répond toujours présent, offre des solutions en permanence et il lui arrive même de marquer. Concernant les balles arrêtées, ses récents penalties ont été tirés de manière nette et sans bavure. Ce sont ces qualités défensives et offensives qui ont fait qu’en Serie A italienne cette saison, avec le club de Naples, Hassan Yebda a vraiment explosé et s’est vraiment révélé à la planète foot faisant remonter son nom au premier plan des regrets de la DTN de la Fédération française de football qui se mort les doigts de ne pas lui avoir donné le maillot frappé du coq gaulois. C’est cette confiance en lui acquise en Italie qui a décomplexé Yebda en équipe nationale et lui a fait prendre plus de responsabilités qui lui donnent le statut d’As de carreau dans le jeu de Benchikha.
KARIM ZIANI :L’AS DE PIQUE
Nous ne vous ferons pas l’affront de vous présenter Karim Ziani et vous dire pourquoi il est l’élément clef du dispositif d’Abdelhak Benchikha. Karim Ziani n’a pas été baptisé «cœur de Lion» pour rien. C’est la figure de proue de l’équipe nationale, «l’ancien combattant», celui qui a toujours cru aux lendemains qui chantent, même au moment où ça déchantait sévèrement. Karim Ziani, c’est l’âme de l’équipe nationale algérienne. Et si toute une génération de jeunes supportrices et supporters l’a pris comme idole absolue, ce n’est pas pour rien.
D’ailleurs, la génération actuelle n’est pas appelée «la génération Ziani» pour rien. Karim Ziani, c’est l’élément clef par excellence. Il est le fennec qui a débloqué le plus de situation en équipe nationale, soit par ses buts, comme il marque beaucoup, ou soit par ses passes décisives souvent en cloche qui sont à 70% dans la qualification des Verts au Mondial. Si Karim Ziani n’est pas grand par la taille, il est grand par le talent et par un patriotisme sans faille qui fait que lorsqu’il entre sur le terrain avec le maillot des Fennecs, ce n’est plus un footballeur, mais un « pitbull » prêt à mourir pour son pays et pour la victoire. C’est parce qu’il pique l’adversaire là où ça fait mal, que Karim Ziani est l’As de pique du carré d’As de Benchikha qui fera tout ce soir pour rafler la mise et faire sauter la banque.
M. B.