Son inscription à l’ordre du jour du Sénat, dix ans après son passage devant l’Assemblée, a suscité un débat passionné, souvent marqué par une forte émotion, sur fond de polémiques sur le passé colonial de la France. Mais la proposition de loi socialiste qui fait du 19 mars, date anniversaire du cessez-le-feu en 1962, la « journée nationale du souvenir » en mémoire des victimes de la guerre d’Algérie, a finalement été adoptée définitivement par le Parlement, jeudi 8 novembre, après un vote en ce sens au Sénat. Le texte a été adopté par 181 voix contre 155, la gauche sénatoriale s’étant prononcée pour, la droite contre.
Déjà votée en janvier 2002, et dans les mêmes termes, par l’Assemblée nationale, la proposition de loi est donc définitivement adoptée après le vote du Sénat et ne retourne pas devant les députés. En deux courts articles, le texte institue chaque 19 mars une journée « à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc ».
« HOMMAGE » OU « DIVISION »
La gauche a défendu un texte qui, selon elle, rassemble et rend hommage à toutes les victimes du conflit. L’UMP a dénoncé pour sa part un texte de division et a accusé la gauche d’instrumentaliser l’histoire à quelques jours du voyage du président François Hollande, le mois prochain, en Algérie. Le 19 mars, date du cessez-le-feu au lendemain des accords d’Evian, le 18 mars 1962, est un sujet de tensions entre la droite et la gauche, mais aussi entre associations d’anciens combattants et de rapatriés d’Algérie.
Dernier signe de cette tension partisane autour de ce sujet : le mystérieux bras d’honneur du sénateur UMP Gérard Longuet en réaction à une dépêche de l’AFP indiquant que l’Algérie demandait une « reconnaissance franche des crimes perpétrés par le colonialisme français ». Un geste qu’il a expliqué en déclarant : « La France n’a pas à avoir honte de sa présence en Algérie pendant la colonisation, en tout cas c’est ma conviction. » Et d’ajouter : « Refaire l’histoire, cent quatre-vingt-deux ans plus tard, ne permet pas d’aller de l’avant. Je souhaite une relation apaisée entre la France et l’Algérie, mais cela paraît impossible si à chaque fois que l’on se rencontre, on refait le procès de la colonisation. »
L’une des principales associations, la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (Fnaca), qui représente 350 000 adhérents, notamment d’anciens appelés du contingent, militait depuis de nombreuses années en faveur d’une journée d’hommage le 19 mars. Une quarantaine d’autres associations, qui revendiquent plus de un million de membres, défendaient en revanche la date du 5 décembre, officiellement retenue depuis 2003, pour rendre hommage aux victimes, mais qui ne correspond à aucun événement de la guerre d’Algérie.