Les otages emmenés par leurs tortionnaires pour être décapités
L’intervention militaire contre Daesh en Libye marque l’ouverture d’un nouveau front pour l’armée égyptienne.
Il a eu ses Rafales et sa guerre. Le chef de l’Etat égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, est un maréchal accompli. En août prochain, à l’occasion de l’élargissement du Canal de Suez, il fera voler ses 24 chasseurs Rafale cliquants neufs sortis des usines du constructeur Dassault en France. Il aura également deux frégates Gowind et une frégate Fremm (construites par les chantiers navals Dcns) et comme monnaie de poche un lot de missiles de défense anti-aérienne de courte et moyenne portée fournis par Mbda. Ceci pour le matériel. Pour la guerre, c’est la multinationale du crime estampillée Daesh qui lui en offre une. Avant-hier, le groupe Etat islamique (EI) a diffusé une vidéo d’une rare violence. La vidéo, d’une rare monstruosité, montre la décapitation des 21 Egyptiens de confession chrétienne copte récemment kidnappés en Libye. Avec ces exécutions revendiquées par sa branche libyenne, quelques jours seulement après l’annonce de la décapitation de huit personnes par sa branche égyptienne, l’organisation djihadiste démontre qu’elle a exporté ses méthodes d’extrême brutalité en dehors de sa «base», dans les régions qu’elle contrôle en Syrie et en Irak et où elle a multiplié les atrocités.
Le Caire a annoncé un deuil national de sept jours alors que la mosquée Al-Azhar, l’une des plus prestigieuses institutions théologiques de l’islam sunnite, a qualifié ces exécutions de «barbares». Les représailles de l’armée égyptienne n’ont pas tardé. L’aviation égyptienne est aussitôt entrée en action. Des avions de combat ont bombardé la ville de Derna, contrôlée par Daesh. L’intervention contre la branche de l’EI en Libye marque l’ouverture d’un nouveau front pour l’armée égyptienne, qui peine déjà à contrer sur son territoire des djihadistes affiliés à l’EI menant des attentats spectaculaires contre les forces de l’ordre. «Nos forces armées ont mené lundi des frappes aériennes ciblées contre des camps et des lieux de rassemblement ou des dépôts d’armes de Daesh (acronyme en arabe de l’EI) en Libye», a annoncé l’armée égyptienne. Les militaires ont rendu publiques des images montrant des avions de combat -manifestement des F-16 de fabrication américaine- décollant en pleine nuit. Des témoins ont assuré à l’AFP en Libye que des avions avaient frappé à Derna, fief des djihadistes à 1300 km à l’est de Tripoli.
Ces frappes, conduites avec l’armée libyenne, ont tué 50 djihadistes, a indiqué le chef de l’armée de l’air libyenne Saqr al-Jaroushi à une chaîne de télévision égyptienne CBC Extra. Mais il était impossible de confirmer ce bilan de source indépendante. Ce ne serait pas la première fois que l’aviation militaire égyptienne intervient en Libye. Entre le 18 et le 27 août 2014, les Etats-Unis avaient affirmé que l’Egypte et les Emirats arabes unis avaient mené en Libye des frappes aériennes visant des milices islamistes.
Au Caire, c’est un état de guerre. Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a convoqué d’urgence le Conseil national de la Défense et a appelé hier, la communauté internationale à adopter une position unifiée pour faire face aux groupes terroristes. Selon un communiqué du ministère égyptien des Affaires étrangères, le ministre égyptien des AE Sameh Choukri s’ est rendu à New York, hier, pour des entretiens avec le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, et d’autres hauts responsables sur les moyens pour faire face au terrorisme.
Sur la vidéo, diffusée sur Internet, des hommes portant des combinaisons oranges, sont alignés sur une plage les mains menottées dans le dos, avant que leurs bourreaux ne les décapitent au couteau. Sur la même vidéo, on ne voit avec certitude que l’exécution de 10 hommes, sans pouvoir dire s’il y a d’autres suppliciés ou non. Au milieu de l’alignement, un des bourreaux masqués s’adresse en anglais à la caméra en brandissant un couteau et déclare: «Aujourd’hui, nous sommes au sud de Rome, sur la terre musulmane de la Libye (…) cette mer dans laquelle vous avez caché le corps du cheikh Oussama ben Laden, nous jurons devant Allah que nous allons la mêler à votre sang.»
La dernière vidéo d’exécution diffusée par l’EI remontait au 3 février, lorsque le groupe djihadiste avait montré un pilote jordanien brûlé vif dans une cage. Le groupe Etat islamique a profité de la guerre civile en Syrie et de l’instabilité en Irak pour s’emparer de vastes régions dans ces deux pays, sur lesquelles il a proclamé en juin un «Califat» et où il impose sa loi. Depuis l’été dernier, cette organisation a notamment décapité cinq otages occidentaux enlevés en Syrie, trois Américains et deux Britanniques. Il a également exécuté deux otages japonais en janvier. La Libye est plongée dans le chaos depuis la chute en 2011 du colonel El Gueddafi. Le pays est dirigé par deux Parlements et deux gouvernements rivaux.