C’est la première fois depuis l’avènement du multipartisme en 1989 qu’une élection tourne en «farce» généralisée
Il y a eu beaucoup de promesses, il y a eu de la fraude, de l’argent et surtout un marchandage éhonté à coup de milliards, sans foi ni loi.
«Tant qu’on ne s’entendait pas, on s’entendait très bien. Mais dès qu’on a voulu s’entendre on ne s’entendait plus…». Voilà un extrait du spectacle inoubliable, «djurdjurasique bled» du célèbre comique algérien Fellag qui exprime parfaitement le «spectacle» des alliances qu’ont provoqué les précédentes élections locales. En effet, il s’agit bel bien d’un «spectacle». C’est la première fois depuis l’avènement du multipartisme en 1989 qu’une élection tourne en «farce» généralisée. Tout est permis! De la campagne électorale jusqu’au scrutin en passant par les tractations autour des alliances jusqu’à l’installation des nouveaux exécutifs, c’est la mascarade! Les candidats de tous les partis ont promis au peuple monts et merveilles.
Il y a eu beaucoup de promesses et toutes formes de discours, il y a eu de la fraude, de l’argent et surtout un marchandage éhontée à coup de milliards, sans fois ni loi. Deux semaines plus tard, on se retrouve face aux résultats du double scrutin local du 29 novembre: la majorité des communes algériennes sont bloquées. Les tractations en vue des élections des présidents et du reste des membres des Assemblées communales ne cessent de faire des ravages. L’article 80 de la nouvelle loi électorale, qui soumet la désignation du P/APC au vote de l’ensemble des élus, a fait tourner les négociations entre les élus de tous les partis en comédie burlesque.
La guéguerre des communes
Les alliances, si elles n’ont pas accouché bien des surprises dans certains cas, dans la majorité des communes c’est l’avortement
certain. Commençons par la commune d’Alger, le coeur de la capitale. Abdelhakim Bettache, l’élu du MPA, un transfuge du RND, n’a pas encore entamé son exercice de maire qu’il est appelé par ses pairs à répondre de «la fraude à laquelle il s’est adonné pour usurper son élection».
Dans cette commune, la plus symbolique d’Algérie et qui compte 23 membres, la liste MPA, arrivée en tête avec 8 sièges mais sans atteindre les 35% des suffrages, ne devait compter lors de l’élection du P/APC que sur ses propres voix et celles de Djil El Djadid de Sofiane Djilali, le tout faisant 10 voix. Les 13 élus de la coalition contre Abdelhakim Bettache, ont affirmé avoir voté pour le candidat du FLN. Pour eux, il ne fait aucun doute que l’élu MPA a fraudé. Spoliés de leur victoire, les 13 élus ont décidé de geler leurs sièges à l’assemblée tant que le tort n’est pas réparé. Les exemples de pareilles situations se sont réédités à l’échelle nationale. Pratiquement dans toutes les communes où il n’y a pas eu de majorité, c’est la guerre qui a sévi pour désigner le nouveau maire. La police a même dû intervenir dans certains cas, pour éviter des émeutes. Pis, certaines communes sont encore sans… maire. Mais bien avant qu’on arrive à cette situation, les tiraillements post-électoraux présageaient le désordre qui s’en est suivi. Le FNA a, par son apparition spectaculaire, crié au vol de centaines de ses listes électorales par un autre parti qu’il ne se gênera pas de citer, accusant ouvertement le MPA.
Que Dieu protège les enfants
Moussa Touati a publiquement accusé le parti d’Amara Benyounès d’avoir profité du désarroi créé chez les candidats FNA par une désinformation d’Ennahar TV pour parrainer 312 listes confectionnées par son parti. «A quelques jours du délai imparti au dépôt des listes de candidatures, Ennahar TV a annoncé que les activités du FNA ont été gelées par le ministère de l’Intérieur. Nos listes sont alors allées chercher parrainage auprès d’autres partis politiques et 312 l’ont trouvé chez le MPA», a affirmé Moussa Touati.
Le PRA a porté la même accusation, par la voix de son secrétaire général Bensalem, qui n’a pas été jusqu’à citer les voleurs de ses listes électorales. «On nous a chipé 300 listes à la veille du dépôt des candidatures!», a-t-il regretté. Et de s’expliquer: «Nous avons pour habitude de nous présenter dans 800 communes au minimum mais cette fois-ci. Faute de moyens, nous nous sommes limités à seulement 84 communes et 9 wilayas». Dans une déclaration rendue publique hier, Samir Bouakouir, ancien militant et cadre du FFS, a écrit que «un accord politique vient d’être signé entre le FFS, le RND et le FLN, notamment dans la wilaya de Tizi Ouzou. Contrairement aux mandatures locales précédentes, cet accord a reçu l’aval de l’appareil politique du FFS», confirmant qu’il «s’agit bel et bien d’une alliance politique et non d’un simple accord de gestion», une notion au demeurant floue et qui veut accréditer une conception totalement renversante et stupéfiante de l’acte politique. Samir Bouakouir a tenu à dénoncer «cette alliance politique avec des partis du système» qui porte un coup supplémentaire à la résistance démocratique dans le pays. Enfin, la certitude est que tout les élus, tentent de gagner des présidences, des commissions ou des sous-commissions aux sein des APC. Le peuple est botté en touche définitivement tout en tentant d’évoquer d’autres problématiques qui cachent très mal la gène des élus devants la réalités de leurs motivations… l’affairisme! Fellag l’a aussi dit: Dans le monde entier, on dit et c’est devenu un proverbe, «lorsqu’un peuple coule, lorsqu’il arrive au fond il remonte, nous quand on arrive au fond, on creuse….». Quelle belle caricature, quels mauvais présage pour le pays quand on est face à 1500 bombes à retardement! Que Dieu protège les enfants.