L’autre facette de Vahid

L’autre facette de Vahid

Dans un long entretien paru dans Jeune Afrique, le sélectionneur algérien, Vahid Halilhodzic, s’est lâché, révélant des choses qu’il n’a jamais dites auparavant.

Quand il a parlé de l’Algérie et des Algériens, Vahid Halilhodzic a déclaré : «En Algérie, les gens sont passionnés, fiers et parfois excessifs. Beaucoup ont des difficultés quotidiennes, et le foot prend beaucoup d’importance. La passion contribue à la motivation, cela ne me fait pas peur.» Et pourtant, quelques jours après son éviction de son poste de sélectionneur de la Côte d’Ivoire, l’ex-buteur de Mostar a décidé de ne jamais retravailler un jour en Afrique. «Je ne pensais plus entraîner un jour en Afrique. En septembre 2010, après la démission de Rabah Saâdane, Mohamed Raouraoua m’avait fait une offre. Il paraît qu’Anouma lui avait dit du bien de moi. J’avais refusé, d’autant que j’étais sous contrat au Dynamo Zagreb. En juin 2011, quand l’ancien sélectionneur, Abdelhak Benchikha, a démissionné après la défaite de 4 à 0 face au Maroc, il m’a recontacté. Je l’ai rencontré à Paris, on a discuté…», explique Halilhodzic.

«Le règlement intérieur existait avant ma venue, mais il n’était pas appliqué»

A propos de ses rapports avec Mohamed Raouraoua, le Bosniaque avoue : «Le président est un rassembleur et un réaliste. Il ne m’a pas demandé de qualifier l’équipe pour la phase finale de la Coupe d’Afrique des nations (CAN-2012), car la situation comptable était alors très compliquée. Il m’a parlé de la CAN-2013 et du Mondial 2014. Trois ans, c’est une durée raisonnable pour travailler. Avant d’accepter, j’ai consulté des amis, regardé quelques matchs de l’Algérie en DVD. Le président Raouraoua est lucide, il sait comme moi qu’il y a une bonne dizaine d’équipes qui sont supérieures à l’Algérie en Afrique et autant qui sont de son niveau. Il ne faut pas se mentir, l’Algérie ne fait plus partie des meilleures. Cette décision n’a pas été facile à prendre, surtout que j’avais en même temps des propositions en France, mais aussi en Afrique. Cela doit être mon destin d’entraîner souvent des équipes qui doutent. Je dois avoir une étiquette. Croyez-moi, je préfère des situations plus tranquilles. Je ne suis pas maso. Mais le projet algérien est excitant. Difficile, mais excitant.»

«De grâce, ne me comparez plus aux militaires»

Par ailleurs, et en ce qui concerne son tempérament et l’étiquette qu’il traîne d’un entraîneur dur et intransigeant, Vahid Halilhodzic s’est presque mis en colère et dira à son intervieweur : «Militaire aussi?! Et ça, je ne le supporte pas. Je déteste qu’on me traite de militaire. Pourquoi ?. Parce que je viens de l’Est de l’Europe?? Mais c’est nul de penser cela. Je n’aime pas beaucoup tout ce qui est militaire. La guerre, je l’ai connue dans mon pays, en Bosnie-Herzégovine. Qu’on me traite de militaire, c’est… une provocation. Seulement, en France, on préfère les entraîneurs dociles. Des moutons», avant d’ajouter : «Il en faut de la discipline dans la vie d’un groupe. Pour la sélection algérienne, il y avait un règlement intérieur, mais il n’était pas appliqué. Moi, je veux qu’il le soit, rien de plus. Pour mon premier rassemblement à Marcoussis en août, Ryad Boudebouz n’est pas venu faire constater sa blessure. Et trois jours plus tard, il jouait avec son club. Je ne l’ai donc pas sélectionné contre la Tanzanie et contre la Centrafrique. Quand j’entraînais la Côte d’Ivoire, un joueur avait prétexté une panne de réveil pour expliquer son absence. Eh bien, il a dormi six mois, la durée de la période où je ne l’ai pas appelé en sélection.» Quand il est arrivé en sélection, l’équipe nationale ne marquait presque plus. Aujourd’hui, après trois mois de travail seulement avec Vahid, elle réapprend de nouveau… à marquer. «J’ai vu des DVD où l’équipe ne faisait pas plus de deux cents passes dans le match. Lorient, en France, c’est six cents. En Tanzanie, on en a fait quatre cents. C’est mieux, mais on doit progresser. Je veux que mon équipe prenne des risques et marque des buts. J’ai envie de révolutionner son jeu. L’Algérie a de bons joueurs. Pas de grandes stars, mais de bons joueurs. On peut faire du bon travail. J’ai assisté à plusieurs matchs du championnat. Et j’ai l’impression que beaucoup jouent contre nature, parce que les entraîneurs savent qu’ils peuvent être virés n’importe quand et n’hésitent pas à faire prendre des risques à leur équipe», explique l’ex-entraîneur du PSG.

«Oui, j’ai fait Ramadhan avec Cyril Moine à Marcoussis par solidarité avec les joueurs»

La question sur les binationaux a mis en colère le sélectionneur algérien qui, d’un ton très élevé, dira : «Ah, le débat sur les quotas en France?! Mais ce n’est pas une maladresse, c’est du racisme pur et dur. La binationalité, aujourd’hui, c’est presque une règle de société. Alors oui, si je peux convaincre certains joueurs qui possèdent la double nationalité franco-algérienne de jouer pour les Fennecs, je ne vais pas m’en priver. J’ai déjà une liste de trois ou quatre joueurs.» Avant de clore cet entretien, le journaliste de Jeune Afrique a voulu savoir si c’est vrai que le Franco-Bosniaque avait jeûné à Marcoussis, alors qu’il n’est pas pratiquant, Halilhodzic lui a répondu tout simplement : «Oui, c’est exact, je l’ai fait avec mon adjoint (Cyril Moine) par solidarité avec les joueurs qui le faisaient. Je n’ai pas voulu en parler, parce que cela est une démarche personnelle. Je ne l’ai pas fait pour me faire bien voir.»

Synthèse Amirouche B.