10 000 missiles sol-air, près de 200 000 kalachnikovs, plus de 100 000 armes de poing, des milliers de coffres de munitions, des camions dotés de batteries anti-aériennes, des véhicules 4X4, des fûts de produits chimiques et des caisses entières de Semtex, matière hautement explosive d’origine tchèque, ont disparu des casernes de Kadhafi dès les premiers jours de la révolution, et après la chute de Tripoli, pour prendre le chemin du Mali.
Au lendemain de la chute de Tripoli et sa prise en main par les islamistes du Groupe islamique libyen combattant-GICL-, dirigé par un ancien sous-fifre du GIA algérien, Abdelhakim Belhaj, pour Alger et les autres pays dits « du champ » -Mali, Niger et Mauritanie, il s’agissait surtout de mettre sur pied un groupe de travail en vue de faire l’inventaire du matériel de guerre volé en Libye et des armes qui circulaient au Sahel. Evidemment, en l’absence d’une collaboration étroite de la Libye avec Alger, la tâche ne paraissait pas commode, mais on est déjà sur plusieurs pistes, dont celle des marchands d’armes au Niger et au Tchad, qui donnent des indications intéressantes à ce sujet.
La première voix à s’élever pour mettre en garde le Conseil de sécurité de l’ONU, a été celle de l’Algérie. Et ce n’est que lorsque les Etats-Unis ont confirmé ces énormes disparitions de matériel de guerre, que les autres pays, comme la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne ont commencé, très timidement, à parler des dangers de ce transfert dangereux de l’arsenal de Kadhafi vers les fiefs d’AQMI et des groupes rebelles du Sahel.
Le CNT libyen, lui, attendra la fin septembre 2011 pour avouer la disparition de 5 000 missiles sol-air, alors que le chiffre était double, selon les estimations les plus optimistes. Un service de recensement de l’armement qui fera l’inventaire des armes volées et des armes encore en circulation en Libye, a été installé au sein du ministère de la Défense relevant du défunt CNT, mais sa collaboration avec Alger a été «quasiment nulle », selon les termes d’un haut officier algérien.
Des camions, des véhicules 4X4 et des armes d’assaut ont été localisés en Mauritanie, au Niger et au Mali, ainsi qu’au Tchad. Les pièces les plus lourdes, entendre les plus dangereuses, comme les missiles et les batteries anti-aériennes, capables d’atteindre des avions civils en plein vol, n’ont jamais été retrouvées.
Selon des indications fournies par des marchands d’armes au Tchad, des rebelles libyens se sont engraissés en vendant des stocks d’armement volés dans les casernes de Kadhafi, désertées par les militaires après l’assaut des rebelles.
Ces stocks ont transité vers le Niger et le Mali via le Tibesti, où pullule une faune de seigneurs de la guerre, des vétérans des guerres successives de Ndjamena et des groupes d’opposition armés.
Fayçal Oukaci