La sortie médiatique de l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles interpelle à plus d’un titre le Maroc à respecter l’Acte constitutif qu’il a ratifié dans le cadre de sa demande d’adhésion à l’UA.
L’arrêt de la Cour de justice européenne doit peser lourd dans la balance lorsque les chefs d’Etats africains trancheront en ce qui concerne la demande d’adhésion du Maroc. Sera-t-il déterminant? On le saura dans moins de 48 heures en principe. A moins que l’on décide de jouer les prolongations car le retour du royaume au sein de la famille africaine est réellement problématique. «La demande du Maroc est un cas spécial et requiert par conséquent des organes de l’Union africaine un traitement spécial et différent», relève le ministre sahraoui des Affaires étrangères. Pourquoi?
«Le Maroc est le seul pays d’Afrique qui ne reconnaît pas le principe de l’OUA-UA relatif au respect des frontières établies lors du recouvrement de l’indépendance stipulé dans l’alinéa 4 (b) du statut», a expliqué Mohamed Salem Ould Salek, lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 27 janvier au siège de l’Union africaine.
La sortie médiatique de l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles interpelle donc à plus d’un titre le Maroc à respecter l’Acte constitutif qu’il a ratifié dans le cadre de sa demande d’adhésion à l’UA. Il met dans l’obligation ses pays membres à respecter les frontières héritées de la colonisation. En annexant les territoires du Sahara occidental, le Maroc transgresse donc le socle sur lequel repose l’Union africaine et devient l’unique pays du continent à coloniser un pays d’Afrique. Le Sahara occidental figure dans la liste de l’ONU des territoires non autonomes qui restent à décoloniser, ce que souligne l’arrêt de la Cour de justice européenne. «… Compte tenu du statut séparé et distinct garanti au territoire du Sahara occidental en vertu de la Charte des Nations unies et du principe d’autodétermination des peuples, il est exclu de considérer que l’expression «territoire du royaume du Maroc», qui définit le champ territorial des Accords d’association et de libéralisation, englobe le Sahara occidental et, partant, que ces accords sont applicables à ce territoire», a conclu la Cjue dans son arrêt rendu le 21 décembre 2016. L’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles s’y réfère pour argumenter son analyse.
«La Cjue a affirmé clairement et sans contestation possible, qu’au regard du droit international et du principe d’autodétermination des peuples, le Maroc n’a pas et ne peut prétendre à aucune forme de souveraineté sur le territoire du Sahara occidental en tant que territoire autonome séparé et distinct», a déclaré Amar Belani lors d’une rencontre -débat, qui a eu lieu jeudi dernier au Parlement européen, en présence d’ambassadeurs des pays de la rive sud de la Méditerranée et de hauts responsables européens. Il souligne «clairement» et «sans contestation possible» que le Sahara occidental est un territoire non autonome, dont le peuple a le droit légitime à l’autodétermination et par conséquent le Maroc ne peut prétendre à «aucune forme de souveraineté», a indiqué l’ex-porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Mohammed VI sera incontestablement dos au mur à Addis-Abeba où débute aujourd’hui le 28ème Sommet de l’Union africaine. La décision prononcée par les magistrats européens le mois dernier aura probablement un impact sur la demande d’adhésion du Maroc à l’Union africaine. Amar Belani n’en doute pas. «C’est loin d’être acquis…», a-t-il estimé. «Le Maroc ne serait que le 55ème Etat membre de l’UA et son éventuelle adhésion sera conditionnée par son acceptation formelle des critères et des principes consignés dans l’Acte constitutif de l’UA (notamment l’acceptation et le respect des frontières héritées du colonialisme)…», a fait remarquer l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles dans un entretien au magazine Afrique Asie, publié le 23 décembre 2016.
Le Maroc est incontestablement sur un volcan qui sommeille. Il pourrait cracher ses premières laves dès aujourd’hui…