Les forces gouvernementales continuent leur avancée vers l’est libyen. Après avoir repris Brega, les troupes du colonel Kaddafi s’acheminent vers la ville d’Ajdabiya, dernier verrou avant Benghazi, fief de la contestation libyenne.
Mouammar Kaddafi reprend le contrôle de son pays, après l’avoir perdu au début de la révolution au profit des rebelles. Au train où vont les choses, l’indéboulonnable Kaddafi, au pouvoir depuis 1969, continuera à régner quelques années encore, défiant ainsi la communauté internationale qui ne cesse de réclamer sa chute. En effet, les villes contrôlées par les rebelles tombent l’une après l’autre aux mains des troupes du colonel Mouammar Kaddafi, qui s’est dit déterminé à venir à bout de l’insurrection malgré les protestations et sanctions internationales.
La percée des forces pro-Kaddafi en territoire insurgé s’est poursuivie hier. Après les reconquêtes de Ras Lanouf et de Brega, à coups d’artillerie lourde et de raids aériens, la ligne de front se déplace davantage vers l’est, signe de la détermination du colonel Kaddafi à venir à bout de l’insurrection. Désormais en première ligne, Ajdabiya s’apprête à être visée. Les rebelles, repliés à bord de véhicules transportant des batteries anti-aériennes, se préparent à défendre cette «ville vitale», selon le commandant des insurgés, le général Abdel Fattah Younis. Dans la matinée, quatre obus sont tombés à la sortie ouest de la ville, véritable carrefour routier entre plusieurs villes de l’est, situé à 160 km seulement de Benghazi, le fief de l’insurrection. Ce premier coup de semonce n’a pas fait de victime mais, déjà, de nombreux civils fuient la ville à bord de camionnettes chargées de valises, de sacs et de matelas, alors qu’une tempête de sable souffle sur la région. L’armée de l’air libyenne a mené plusieurs raids contre Ajdabiya, nouvel objectif affiché du régime.
«Cette ville est vitale et sera défendue», a déclaré à l’AFP, le commandant des insurgés, le général Abdel Fattah Younis, reconnaissant implicitement que Brega était tombée aux mains des troupes du colonel Kaddafi. Selon Ali Saleh, un soldat rallié aux rebelles, ces derniers ont pris position au niveau des carrefours et des grandes avenues de la ville. «Ils ont dressé des barrages et des sacs de sable pour se protéger et pour contrecarrer un éventuel assaut», rapporte-t-il à France24.com. Sur la route reliant Ajdabiya à Benghazi, de nombreux civils fuyaient la ville en direction de l’Est, lundi matin, à bord de camionnettes chargées de valises et de matelas.
Inquiétudes et peur à Benghazi
Direction Benghazi, deuxième ville du pays à un millier de kilomètres à l’est de Tripoli. Dans la «capitale» des rebelles, l’euphorie des premières semaines de la révolte a fait place à l’inquiétude. Toutes les lignes de téléphones portables sont coupées. L’aide humanitaire arrive au compte-gouttes : le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a annoncé dimanche avoir envoyé depuis la Jordanie sept camions chargés de nourriture et de médicaments vers Benghazi. Dix camions supplémentaires doivent partir mercredi et vendredi.
Le commandant des insurgés, le général Abdel Fattah Younis, a assuré dimanche soir qu’Ajdabiya, désormais en première ligne, est «une ville vitale» et qu’elle serait défendue. Il a aussi estimé que les troupes gouvernementales, «très étirées» le long de la côte, allaient connaître «de sérieuses difficultés logistiques».
La communauté internationale tergiverse, Al-Qaïda soutient les insurgés
Sur le terrain diplomatique, la communauté internationale semblait cependant lente à agir. Après des réunions de l’Otan et l’Union européenne qui n’ont abouti à aucune décision concrète, une rencontre ministérielle du G8 était prévue hier à Paris, où la France comptait faire avancer l’idée d’une zone d’exclusion aérienne. Nicolas Sarkozy recevait d’ailleurs hier à 17 heures la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton, avant un entretien avec les autres ministres des Affaires étrangères des pays du G8.
Pressés par la progression des troupes fidèles au colonel Kaddafi dans l’est libyen, les ministres des Affaires étrangères du G8 doivent discuter des moyens de contraindre le régime de Tripoli à abandonner la force. Samedi, la Ligue arabe a apporté son soutien à une zone d’exclusion aérienne, réclamée avec force par l’opposition libyenne, et appelé le Conseil de sécurité de l’ONU à l’autoriser pour empêcher les bombardements et protéger les civils. Un responsable d’Al-Qaïda, Abou Yahya al-Libi, a appelé les insurgés à poursuivre leur combat «sans hésitation et sans peur», dans un enregistrement vidéo diffusé dimanche sur des sites islamistes, première réaction du réseau extrémiste depuis le début de l’insurrection le 15 février, que le colonel Kaddafi lui a régulièrement imputée.
H. L.
Kaddafi invite Inde, Chine et Russie à exploiter le pétrole
Le «guide», contesté par une révolte populaire, a invité des firmes de Chine, de Russie et de l’Inde à venir exploiter du pétrole en Libye, après le départ de la majorité des compagnies étrangères, a rapporté l’agence officielle Jana. «Le chef de la révolution a reçu dimanche les ambassadeurs de Chine, de Russie et de l’Inde avec lesquels il a examiné l’évolution des relations bilatérales et l’invitation de compagnies de ces pays à venir exploiter le pétrole libyen», écrit Jana.
Le 2 mars, le colonel Kaddafi avait affirmé que la production pétrolière en Libye était «au plus bas» et menacé de remplacer les firmes occidentales par des sociétés de Chine et d’Inde. «Nous sommes prêts à faire venir des compagnies indiennes et chinoises à la place des firmes occidentales», avait dit le dirigeant libyen, après le départ des compagnies pétrolières étrangères opérant dans le pays en proie à une insurrection depuis le 15 février.
La dernière cargaison de pétrole à avoir quitté la région pétrolifère de l’est libyen remonte au 19 février. Des régions dans l’Est sont encore aux mains des insurgés malgré les revers subis face aux raids des forces loyalistes. Le président de la Compagnie pétrolière nationale libyenne, Choukri Ghanem, avait affirmé le 9 mars que son pays produisait actuellement 500 000 barils de pétrole par jour, contre 1,6 million avant le début, mi-février, de la révolte populaire contre le régime.
Les soldats pro-rébellion «graciés»
Les soldats qui ont rejoint les insurgés contre le dirigeant libyen Mouammar Kaddafi seront «graciés» s’ils se rendent, a annoncé lundi la télévision d’Etat, citant l’armée libyenne. L’armée libyenne affirme que les soldats qui se sont joints aux «bandes armées» et qui rendent leurs armes seront graciés, a indiqué la télévision. De nombreux soldats se sont joints à l’insurrection déclenchée le 15 février contre Mouammar Kaddafi.
H. L.