Quelques jours après l’élection de François Hollande à la Présidence de la République française, parallèlement aux préparatifs, en Algérie, de la célébration du cinquantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, et moins d’une semaine de la victoire du Front de libération nationale (FLN) aux législatives du 10 mai, l’armée française revient, aux Invalides, dans la capitale française, sur ses 132 années d’occupation de la terre algérienne.
Cinq sujets sensibles seront débattus au Musée de l’armée française, dès après-demain, date d’ouverture de la première exposition d’ampleur consacrée à l’occupation militaire française de l’Algérie. Il s’agit de la torture, de l’OAS (Organisation de l’armée secrète), les harkis, la «colonisation positive» et les chiffres.
La vérité sera-t-elle dite sur la colonisation qui a duré 132 ans ? Les instruments de torture seront-ils exposés, témoignant des horreurs commises par le colonialisme ?
Le quotidien de droite Le Figaro, qui parle de «présence militaire française» en terre algérienne, au lieu d’occupation, nous apprend, dans son édition d’hier, qu’«après débat au sein du comité scientifique, la présence d’une gégène dans les vitrines n’a pas été retenue».
«Il s’agit en fait d’une dynamo électrique manuelle pour alimenter les téléphones de campagne de l’armée française. Son utilisation première a été dévoyée et elle n’apparaît ainsi que de manière guère probante sur les rares photos de séances de torture existantes», dit Christophe Bertrand, cité par le journal.
Pour ce qui est de l’OAS, connue pour ses crimes commis en sol algérien à la veille de l’indépendance, l’exposition explique, autour d’une tenue du général putschiste Raoul Salan, d’un uniforme de légionnaire du Ier REP, d’affiches et d’archives surtout filmées, comment «une infime partie des officiers présents en Algérie, parmi les plus passionnés de cette terre, a décidé de ne plus obéir à Paris», écrit la même source. «Depuis 1940, ils avaient passé leur vie à combattre. Ils ne voulaient pas renouveler la défaite subie en Indochine.
Ils tenaient compte de cet enseignement et ont tenté d’appliquer les principes de la guerre révolutionnaire», commente Christophe Bertrand, cité par le journal. «Certains étaient d’autant plus frustrés qu’ils avaient favorisé le retour de de Gaulle en 1958. Ils croyaient qu’il était garant d’une pérennisation de l’Algérie française», ajoute Le Figaro.
Le «sort tragique» des harkis
Quant au sujet des harkis, abordé, d’ailleurs, par Nicolas Sarkozy dans son dernier meeting tenu dans le cadre de la campagne électorale pour le deuxième tour des récentes élections présidentielles françaises, une salle est dédiée pour l’exposition, à leur «sort» qualifié de «tragique» par Le Figaro. Nicolas Sarkozy avait, rappelle-t-on, lancé, au cours du meeting, que «la France aurait dû accueillir, ici (en France), les harkis, et non pas les laisser là-bas (en Algérie)
L’exposition qui sera ouverte, demain, au Musée de l’armée française, abonde dans le même sens. C’est ainsi que Le Figaro écrit que «l’exposition montre l’importance de ces soldats indigènes intégrés dans l’armée française», ajoutant qu’«en fin de parcours, une salle est dédiée à leur sort tragique au lendemain de l’indépendance». «Elle ne porte toutefois pas sur la situation actuelle. Par ailleurs, le destin des pieds-noirs n’est que brièvement évoqué car l’exposition porte avant tout sur l’armée», selon le journal.
«La colonisation positive» est un autre sujet programmé pour l’exposition.
Pour cet aspect «seuls les chantiers auxquels l’armée a contribué sont traités. Une section du parcours porte sur les bureaux arabes, lieux privilégiés de rencontre entre militaires et indigènes», est-il annoncé.
L’exposition s’intéressera aux chiffres liés à l’occupation française de l’Algérie, 132 ans, durant. Les massacres du 8 Mai 1945 seront de la partie avec, probablement, une certaine volonté de «contester» les chiffres des victimes. Le Figaro annonce la couleur, écrivant, que «chaque fois, le nombre des victimes est donné», que «souvent ce sont des fourchettes.
Et parfois, comme pour les massacres de Sétif, en 1945, où les historiens divergent, les différentes comptabilités sont détaillées», au cours de l’exposition. Le même journal estime que «bien qu’élaboré par un collectif d’historiens comme une synthèse des plus objectives -loin de toute visée hagiographique en tout cas-, le rappel de ces 132 années souvent violentes et toujours injustes (puisque, dans l’Algérie devenue département français, le vote musulman n’a jamais eu le même poids que dans l’Hexagone) risque de réveiller bien des tensions».
Par Mounir Abi