L’Iran a-t-elle réussi un retour en force sur la scène internationale ? Face à la stratégie d’isolement internationale, imposée par les puissances occidentales, inquiètes de l’influence grandissante de Téhéran dans la région et de ses ambitions nucléaires redoutées, le come-back iranien s’interprète comme un sérieux revers diplomatique pour les États-unis et leurs alliés.
Dans ce qui est considéré par Téhéran comme étant « le plus grand succès dans l’histoire de l’Iran », la mobilisation de la communauté des Non-alignés, réanimée à la faveur de la nouvelle « guerre froide » qui a pour théâtre d’opération la Syrie, contribue au lifting de la République islamique qui compte encore « des amis et des partenaires en dépit des efforts internationaux pour l’isoler », comme le reconnaît Dina Esfandiary, analyste à l’Institut international des études stratégiques (IISS) de Londres. C’est donc tout bénéfice pour l’Iran, qui a redoré son blason et confirmé le statut de puissance régionale incontournable. Dans le dossier syrien, qui ne fait pas consensus au sein des Non-alignés, adoptant majoritairement une résolution de l’assemblé générale dénonçant le régime d’El Assad, il est clairement affirmé le rôle central de l’Iran dans le dénouement de la crise, validé par la Russie et confirmé par l’Egypte préconisant la création d’un groupe de contact constitué de l’Iran, l’Egypte, l’Arabie saoudite et la Turquie. C’est que la nature hétéroclite du mouvement des Non-alignés et la bataille de leadership régional, suscitent nécessairement des divergences et des critiques inévitables. « Personne ne devait s’attendre à ce que tous les participants au sommet pensent et parlent comme Téhéran le souhaitait », souligne Mohammad Saleh Sedghian, directeur du Centre arabe d’études iraniennes, basé à Téhéran. Le malaise palestinien, exprimé par la participation de Mahmoud Abbas et la mise à l’écart de Ismaël Haniyeh, le leader de Hamas, renseigne sur l’état des divisions d’un mouvement qui ne parle pas de la même voix. Le cas de l’Egypte, tirant à boulets rouges sur le régime de Bachar El Assad, capitalise une présence qui, même si elle se présente sous des formes protocolaires, participe finalement au dégel des relations rompues depuis trois décennies. C’est tout l’avantage du Sommet des Non-alignés qui tend ainsi à desserrer l’étau occidental sur l’Iran, dénonçant « les actes criminels du régime sioniste » et pointant l’index accusateur sur les États-Unis et Isarël, rendus responsable de la crise en Syrie. Mais cette offensive diplomatique iranienne a tourné court. La thèse de la « conspiration » occidentale n’a pas convaincu la majorité des participants. Elle a également soulevé le courroux du secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, qui a profité de la tribune des Non-alignés pour fustiger le programme nucléaire iranien et exhorter Téhéran à respecter les résolutions de l’Onu, au moment même où l’AIEA est montée au créneau pour dénoncer les entraves à ses missions d’inspection. Dans un rapport publié à l’ouverture du sommet et destiné à « éclipser la réunion de Téhéran », selon le député Kacem Jalili, l’état des lieux de l’AIEA aborde la question du doublement en 3 mois du nombre des centrifugeuses à la centrale souterraine de Fordow. Cette attaque en règle a relancé le camp occidental, acquis au renforcement des sanctions. Retour à la case départ ?
Larbi Chaabouni