Mohamed Samraoui, ancien dissident du DRS, avait commencé un travail de rapprochement avec la présidence depuis 2 ans. Bouteflika compte bien utiliser le témoignage de cet ex-colonel pour neutraliser les services de renseignement.
Mohamed Samraoui voulait obtenir des protections sûres auprès de la présidence pour rentrer au pays en contrepartie de renseignement sur des enquêtes particulièrement sensibles. Ces informations, nous les avions déjà révélées (*) en août 2010. Elles viennent d’être confirmées par le très informé Maghreb confidentiel. Ainsi donc l’officier honni du régime a fini par trouver un modus vivendi avec le clan de Bouteflika pour solder ses comptes.
Le retour au pays de Mohamed Samraoui en novembre dernier a été révélé aussi par un journal arabophone sans qu’il soit démenti. C’est dans un vol de la Lufthansa que l’ex- colonel a rejoint Alger au courant du mois de novembre dernier. Sur ordre de la présidence de la république, l’ex colonel du DRS a franchi les frontières aéroportuaires avec un passeport algérien temporaire, qui lui avait été délivré récemment par l’ambassade d’Algérie a Berlin sous le nom de Samraoui Abdelwahab. Dès qu’il a foulé le sol algérien il a immédiatement été pris en charge par un colonel du DRS prénommé « Mostafa », et qui apparemment été en contact régulier avec Mohamed Samraoui depuis quelques années déjà. Selon Maghreb intelligence, l’ex-colonel aurait séjourné une semaine dans une villa du quartier Draria en compagnie de quelques membres de sa famille venus le rejoindre.
L’ex-dissident s’est entretenu pendant son séjour avec un fonctionnaire de la présidence sur un certain nombre de dossiers en lien notamment avec sa collaboration sur le dossier Ziane Hassani alias le commandant « Rachid », et le très sensible dossier de l’organisation secrète du DRS et ses activités clandestines. Le colonel Samraoui Mohamed dit Habib a maintenu les accusations qu’il a portées contre trois des agents du Département du contre espionnage, et compte demander personnellement au président Abdelaziz Bouteflika leur témoignage sur le dossier « Cristal8 ».
Rappelons aussi qu’Abdelaziz Bouteflika avait par le biais de l’ancien lieutenant colonel du Département du renseignement et sécurité (DRS), Mohamed Chafik Mosbah, accusé réception au courant du mois de juin dernier, d’un courrier en provenance de Mohamed Samraoui. Un courrier dans lequel ce dernier négocierait quelques détails et conditions restés encore en suspens et qui, apparemment, entravent son potentiel retour au pays. Cette démarche entreprise par l’ex-colonel du DRS s’ajoute dans les pourparlers engagés entre lui et le président Bouteflika, après avoir reçu au courant de cette année des garanties de son immunité et l’éventualité certaine de l’annulation des poursuites engagées à son encontre. Ces rapprochements viennent en échange de sa collaboration avec les services présidentiels dans l’affaire du diplomate algérien Ziane Hassani, soupçonné d’avoir établi un ordre de mission au tueur présumé du militant algérien André Mecili, mais aussi, sur d’autres dossiers sensibles comme celui de l’assassinat du feu président Mohamed Boudiaf, du général Fodhil Saïdi, en plus de son témoignage sur une branche secrète du Département du renseignement et de la sécurité.
Un rapport détaillé sur les activités du DRS
Dans son courrier, le colonel Samraoui Mohamed a exprimé son grand regret au président Bouteflika et a vivement déploré la dissolution de la commission d’enquête instaurée il y a un an et demi par ce dernier en vue de faire toute la lumière et lever entièrement le voile sur un organisme secret des services spéciaux algériens créé par la vieille garde de l’ancienne puissante Sécurité Militaire. Un organe fermé et impliqué dans certains assassinats politiques au milieu des années 1990, et accusé dans le passé par le président Bouteflika et son entourage d’avoir tenté de le renverser à trois reprises depuis son intronisation a la magistrature suprême. Dans son courrier, le colonel Mohamed Samraoui a joint un rapport détaillé sur les activités de l’organisme secret du DRS dans les années 1990, ainsi qu’une liste nominative d’agents spéciaux qui y auraient officié.
Neutraliser la cellule secrète
Cette fois le colonel Samraoui a mis l’accent sur des points qu’il juge de grande importance pour la suite de sa collaboration avec la présidence. Comme la nécessité de neutraliser définitivement certains agents spéciaux appartenant au noyau dur de cet organisme secret du DRS, qu’il a qualifiés d’éléments dangereux et incontrôlables. Mohamed Samraoui a demandé au président Bouteflika de donner l’ordre à ses services de procéder aux auditions de trois agents du contre-espionnage à la suite de leurs activités antécédentes au sein de cette structure secrète dépendant de la haute hiérarchie du Département du renseignement et de la sécurité.
Dans son rapport le colonel Samraoui accuse Hakim Beloucif, l’un des agents du service Action et infiltration. Le colonel Samraoui affirme dans sa déclaration avoir échappé à plusieurs tentatives visant à l’éliminer physiquement par des membres de cette structure secrète après son feuilleton mouvementé avec feu le général Smaïn Lamari. Il a pointé du doigt cet agent comme étant celui qui était chargé du traitement opérationnel des renseignements concernant le dossier Samraoui Mohamed désigné dans le temps par la codification « Cristal 8 ». L’ex-colonel du DRS déclare qu’il a eu, au courant des années 1990, plusieurs rencontres avec l’agent Hakim dans le cadre d’entretiens professionnels au sein de la direction du contre-espionnage, et qu’il n’avait aucun contentieux au préalable avec ce dernier. Mohamed Samraoui a démenti catégoriquement les accusations qui lui sont portées par son ancienne hiérarchie. Notamment celles faisant état de son implication dans ce qu’il appelle la guerre des services.
Le colonel Samraoui estime avoir été victime d’une immense conspiration et d’un complot fomentés par le feu général Smaïn Lamari, et que des agents du contre-espionnage appartenant à la branche secrète ont exécuté. Il est certain que dans cette guerre entre le DRS et la présidence, la récupération d’un ancien officier comme Mohamed Samraoui constitue une belle prise pour la présidence.
L.M./Maghrebintelligence